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Billet de blog 29 octobre 2023

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Israël - Palestine dans un contexte géopolitique et géostratégique complexe.

L'acharnement contre Gaza du pouvoir israélien discrédité sous tutelle de Tsahal, prend place dans un environnement et une séquence géostratégique complexe. Nous tenterons de dresser de façon non exhaustive un point d'étape.

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D'abord commençons par voir dans la tragédie qui se poursuit à Gaza et en Palestine le naufrage de Netanyahou dont le pouvoir fascisant, corrompu porte les mêmes stigmates que les pouvoirs européens, canadiens portent également. On retrouve derrière la déroute de Tsahal et du Mossad le 7 Octobre 2023, les cabinets-conseils et Mc Kinsey autant que chez Atos en France, l'affaiblissement des services que Netanyahou lui même reconnaît évidemment à dessein en parlant d'un État à genoux lors de l'attaque du Hamas.

Ces déclarations n'ont pas le sens d'une repentance. Elles ont pour but de stigmatiser le mouvement massif, populaire, avec le raccord des mouvements judéos - arabes en Israël  qui ont mis à mal le pouvoir israélien. Ce dernier d'après les témoignages de Hadash (la coalition de gauche judéo arabe) a déclenché une véritable répression en Judée Samarie, avec une chasse aux sorcières dans les services israéliens dont l'Éducation. 

Outre le naufrage de la politique d'apartheid, de constitutions de "bantoustans" dans les territoires palestiniens par Israel avec des colonies qui se répandent par la violence, cette séquence ne peut être lue indépendamment de la dynamique enclenchée voici 12 ans par les printemps arabes, mouvements révolutionnaires, qui vont dans leur sillage entraîner des répliques voir, grossir cette tendance exigeante en matière d'émancipation. 

Dans la région proche et moyen-orientale l'orientation fascisante, élitiste et raciste du pouvoir de Netanyahou se mêle à une corruption, une offensive puissante pour la sauvegarde "des marchés" en pleine tourmente, où on retrouve Mc Kinsey, le FMI, qui ont continué d'affaiblir les Etats, dont largement celui d'Israël avec un affaiblissement de l'armée, qui s'est traduit par une tentative de privatisation du joug imposé aux Palestiniens ; le mur, le technicisme sécuritaire, mais aussi la colonisation accélérée  sont des signaux de cette privatisation. 

La colonisation est à la fois une privatisation de la répression par Netanyahou et son pouvoir, et d'une politique de l'Etat, d'apartheid (selon Tamir Pardo ancien n°1 du Mossad). 

De sorte que, le pouvoir israélien se situe dans le sillage contre-révolutionnaire qui tente de contrer un mouvement révolutionnaire largement jeune en Orient, plus âgé en occident, qui s'exprime aussi en Israël avec le mouvement prodémocratique qui agrège tout ce qui bouge contre la fascisation du pays et la démolition de toute démocratie dans le pays. 

De l'autre côté le Hamas a réprimé les répliques palestiniennes de 2019 et 2021, avec des grèves générales qui ont pris dans l'ensemble des territoires alliant les arabes israéliens et les Palestiniens. Il est remarquable que la religion n'a pas divisé le mouvement. Hamas a poursuivi cette répression tout en perfectionnant sa ponction en continu des aides internationales ce que dénonçaient les Palestiniens de Gaza. 

Lors de la Révolution syrienne réprimée comme on le sait avec le concours du Hamas et du Hezbollah (qui réprima aussi le mouvement libanais) on a vu l'émergence de cette force révolutionnaire dans la région avec aussi au Liban un profond mouvement contre les banques et le pouvoir sanctionnant le naufrage des séquelles de la politique pétrole contre nourriture émergé du conflit irakien. Irak où la Turquie et l'Iran se font face, où les pro Téhéran sont au pouvoir, et où les bases US sont pilonnées. On connaît aussi, la montée révolutionnaire en Iran avec cette tentative du régime de renouer avec sa politique du "martyr" - la thanatocratie iranienne - afin de légitimer la répression du mouvement en cours. 

Tout ceci se passe dans un contexte où la Chine gagne du terrain dans sa progression vers l'hégémonie marchande, qu'on voit en Afrique en Amérique latine. Elle craint le piège de Thucydide ce moment historique particulier où le "second" tente de passer le premier et où le premier pour éviter la relégation déclenche la guerre. 

La Chine actuellement est dans cette optique avec une tentative de faire tout ce qu'elle peut pour empêcher les USA d'avoir la force de lui faire la guerre : cela passe par la prise des accès à l'énergie et aux matières premières, par le ralentissement des livraisons de fournitures industrielles, par une guerre monétaire et du crédit qui ralentissent aussi la production. 

Nous savons que cette tendance a eu ses conséquences en Europe avec notamment en France le mouvement des Gilets jaunes avec son retour de bâton et le second mandat de Macron (donc à ranger côté réactionnaire en voie de fascisation), mais aussi le mouvement anglais actuel puissant et qui se retrouve largement dans le mouvement pro palestine. 

Pour le faire vite, le Brexit a été poussé par les réactionnaires autant que par les "révolutionnaires" contre le bloc libéral anglais, avec la tendance travailliste comme celle des conservateurs. Aujourd'hui le mouvement libéral fait face à une dynamique sociale pour l'hégémonie contre lui. Les réactionnaires, sont contraints de soutenir Sunak.. On a une séquence analogue au Canada. 

En Orient, le mouvement révolutionnaire s'est exprimé en Inde contre Modi (le mouvement des paysans, mais aussi contre la refonte du code de nationalité). Modi anime la tendance contre révolutionnaire et se lance dans un soutien oscillant du plus fervent au plus modéré pour Israël. Ce qui fait craindre de nouvelles tensions sanglantes contre les musulmans qu'on voit déjà dans le Kashmir face au Pakistan. Le Bangladesh a aussi connu des mouvements populaires puissants, ainsi que le Sri Lanka, on s'en souvient, la Thailande (avec des manifs pro palestiniennes inédites) etc. Une Inde qui "fait jouer la concurrence" en tant que point de départ des IMEC (Indian Middle East Corridor) débouchant à Haifa première ville arabe d'Israël. 

En Chine, on voit un pouvoir Xi Jinping qui purge : deux ministres stratégiques viennent d'être évincés à la défense, aux affaires étrangères. Li Keqiang qui avait pris la tête de la contestation contre Xi au dernier congrès et qui avait été limogé, meurt d'une crise cardiaque comme certains cadres de la santé chinoise. Tous ces décès annoncés dans la presse chinoise précisent que les dernières volontés des défunts sont de ne pas engager des funérailles nationales. Il est même fortement recommander aux étudiants de ne pas commémorer la mort de Li Keqiang ancien premier ministre. 

Wang Yi, sur ces entrefaits rend visite  à Biden ces dernières heures. Ils préparent une rencontre au sommet Biden - Xi Jinping. On y lit une volonté (contrainte) de Biden de temporiser face à un emballement évident vers un conflit global. 

La Chine est le troisième partenaire commercial d'Israel. Ses relations avec la Palestine restent peu développées . La visite d'Abbas en début d'été a renoué des liens. Elle fut suivi en fin septembre de la visite d'Assad. C'était 10 jours avant l'offensive Hamas. On sait que la Chine suit de prêt la situation au Yemen. Que les Emirats Arabes Uni viennent d'annexer l'ïle Yéménite de Socotra. Qu'en face ou presque, l'Ethiopie qui contrôle le barrage sur le Nil construit par les Chinois, est en proie à une guerre qui n'en finit pas avec ses rebelles tigrés. 

Ce conflit mondial est d'autant plus menaçant après le discours martial et vindicatif d'Erdogan qui prend fait et cause pour la Palestine mais surtout pour le Hamas.  Là encore, il faut y lire la rivalité pour l'hégémonie d'Ankara face au Qatar (on se souvient de la tentative de prendre le contrôle de la ligne éditoriale d'Al Jazeera ces dernières années) mais surtout face à l'Iran que l'offensive azéri conjointe turco-israélienne, a fortement irritée, sentant une menace à sa frontière, étant donné les intentions des Azéris de dégager l'Arménie d'un corridor qui les séparent de l'Iran. 

La menace d'un second front après l'Ukraine est là en Azerbaïdjan avec des tensions évidentes avec l'Iran et la Turquie qui lorgne aussi sur la Mer Egée ,et sur Chypre. 

Et bien entendu l'Ukraine continue avec un pouvoir de plus en plus contesté de Zelenski. En face la Russie est également empêtrée. Le front israélien ne l'arrange pas.

Si on ajoute une situation peu stable dans les Balkans, et si on lit le dernier tableau des votes à l'ONU, on note que les USA et Israël ont recueilli 14 voix (les contre) pendant qu'une fraction derrière l'Allemagne et la Grande-Bretagne regroupaient 45 voix. Autrement dit 45 pour un gros bloc libéral. 14 pour les réactionnaires de l'ouest, et 120 regroupant les réactionnaires de l'est avec des émergents qui poussent à une refonte du fonctionnement régalien de l'ONU ce que la Chine impulse également. 

Évidemment l'autre front, c'est l'Afrique avec l'éviction qui se poursuit de la France notamment et la progression de l'influence sino-russo - turque. 

Il faudrait aussi évoquer les dernières tractations saoudiennes en stand by, pour devenir le centre névralgique des affaires dans la région, et sa volonté de développer sa filière nucléaire qu'elle était en train de négocier avec les USA, en l'échange d'un "assouplissement" sur la Palestine. Oui mais voilà, il y eut le 7 Octobre 2023. Le rôle que joue la filière nucléaire autant civile que militaire n'est pas neutre. 

C'est donc dans ce grand moment de conflictualité tous azimuts, des peuples contre leurs États, parfois à l'interne de ces peuples, de luttes des classes intenses (on pense à ceux du monde émergent mais aussi aux USA (UAW), en Grande-Bretagne, France,  etc ... des États entre eux, dans un contexte de repolarisation vers l'Orient de la géopolitique mondiale, que la séquence terrible entre Israël et la Palestine se déroule. 

La dangerosité du moment est d'autant plus intense, que tout a été dérégulé, jusqu'à l'ONU d'où les résolutions sortent mais n'ont aucun impact sur le déroulement historique des événements. 

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