La troisième réunion de concertation dans le cadre de la CNDP sur le projet a eu lieu à Carentan les Marais le 13 septembre 2022 sur le thème de l’environnement.
Il faut dire que les promoteurs ont tenté d’impressionner le public en invitant et en faisant présenter ce thème par :
- Emilie CUESTA, juriste en ingénierie réglementaire.
- Alexia HAMMER, adjointe au chef de projet.
- Eric MEYER, Chef de projet sénior, environnementaliste.
Ils ont commencé par revenir sur la démarche ERC (EVITER RÉDUIRE COMPENSER) issue de la loi de 1976 et modifié par la loi de biodiversité de 2016 et la loi climat et résilience de 2022 pour être sans cesse rappelée dans les procédures d’élaboration des documents d’urbanisme.
Bien évidemment les intervenants juriste en tête nous ont rappelé certes le code de l’environnement notamment l’article L 110-1 (modifié par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 connue sous le nom de loi Climat et résilience).
Force est de constater que la lecture qu’ils en ont faite a due être rapide, mais qu’ils n’en ont pas compris le sens et les termes.
En effet le principe ERC est énoncé à l’article L 110-1, II-2° «Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n'ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées; »
A la page 44 de la présentation le 13 09 22, pompeusement appelée « Axes de réponse à la démarche ERC » il est question de réduction et de compensation, mais pas d’évitement.
Déjà lors de la première concertation je suis intervenu pour signaler la non compréhension du principe ERC, et lors de la réunion du 13 09 22, nous avons été 4 dans la salle à remettre le sujet au débat.
Nous avons eu les mêmes non réponses notamment sur l’évitement, qu’ils limitent aux atteintes à l’environnement, qui prouvent que manifestement ils n’ont compris ni la lettre ni l’esprit de la loi.
Dans un guide de l’Evitement rédigé par le Ministère de la transition écologique en mai 2021, voilà ce que déclarait en substance la secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique chargée de la biodiversité, Bérengère ABBA : « L’évitement c’est – ne pas faire – faire moins – faire ailleurs – ou faire autrement -. Ce guide opérationnel doit nous aider à atteindre les objectifs de zéro perte nette de biodiversité et de zéro artificialisation nette. »
Donc à aucun moment ils ne se sont posé la question « NE PAS FAIRE » ?
Bien évidemment j’ai rappelé également qu’artificialiser 16 ha de terres agricoles sur les 32 ha était un non sens dans la situation globale actuelle sur au moins ces deux points :
- Les effets du réchauffement climatique au niveau mondial qui posent le problème d’un changement de mode de production agricole vers la bio, l’agroforesterie, la permaculture, la biodynamie etc. - Les conséquences de la guerre en Ukraine provoquant une crise alimentaire mondiale et remettant urgemment au goût du jour la notion de souveraineté alimentaire et relocalisant ou en re développant des productions agricoles laissées de côté, uniquement sur l’aspect financier afin d’améliorer la rentabilité des exploitations agricoles productivistes axées principalement sur l’exportation, au détriment des productions vivrières de base au niveau national. Cela remet en cause bien évidemment l’OMC et la fixation des prix, uniquement sur des marchés financiers spéculatifs. Il est bon de rappeler : Sur l’artificialisation des terres : C’est environ 30000 ha de terres naturelles agricoles et forestières qui disparaissent par an en France, soit la surface d’un département moyen tous les 7 ans, soit encore 4 fois plus vite que l’augmentation de la population.
Sur la perte de biodiversité : 1 m² de terrain artificialisé (et trop souvent imperméabilisé) c’est une atteinte et une perte de biodiversité.
Sur le réchauffement climatique : Les sols agricoles absorbent du CO2, chaque perte diminue cette absorption.
Sur les risques d’inondation : Tout sol artificialisé et imperméabilisé diminue la capacité d’infiltration dans le sol des eaux de pluie. De plus le terrain est situé dans la baie des Veys, et une partie seulement de celui-ci est selon les courbes de niveau entre 21 et 27 m au dessus du niveau de la mer.
D’après les cartes officielles et les prévisions une grosse partie de ce territoire sera repris par la mer au risque à ce que le Cotentin devienne une île.
Concernant la protection bocagère, des haies, de la faune et de la flore, le discours est récurrent et nous l’avions déjà indiqué précédemment : fournissez nous dès maintenant les études que vous faites réaliser par des cabinets privés, et ce sans attendre l’enquête publique de vos demandes de permis d’aménager ou de construire car celles-ci ne pourront avoir lieu que si la mise en compatibilité du PLU de St Hilaire Petitville est réalisée ?
Ensuite ils ont présenté des plans initiaux d’aménagement et de gestion des linéaires de haies, qui ne sont inscrits que dans la réduction ou la compensation, c’est un peu léger !
D’autant que la plate forme de 400 m de long devant recevoir les panneaux scéniques et la tribune mobile, devrait être lourdement encaissée (et même relevée dans le bout vers nord) donc artificialisée et imperméabilisée pour recevoir notamment la tribune mobile devant supporter 1000 spectateurs, sachant de plus que celle-ci est mue à l’électricité !
Cette plate forme malgré leurs réponses non fondées et encore moins justifiées provoquera une rupture de biodiversité importante, entre deux zones humides que vous prétendez protéger, ainsi que les mares.
De grâce ne touchez pas à ce tènement immobilier de 32 ha, qui doit rester agricole et uniquement à usage agricole
C’est ce qui vous a été répété tout au long du débat long cette fois ci.
Cela dit vous avez été soutenus par les élus.
A commencer par le régional de l’étape Monsieur Lhonneur, maire de Carentan les Marais, qui s’est embarqué sur une explication vaseuse sur l’implantation à Méautis il y a 6 ans d’une structure nouvelle des Maitres Laitiers du Cotentin, sur des surfaces qui demandent à être vérifiées d’une part et qui d’autre part n’a rien à voir avec ce projet purement récréatif, alors qu’il s’agissait de produire du lait en poudre pour le marché asiatique, lequel s’est un peu effondré depuis !
Il a affirmé que ceci était prévu par le SCOT du Cotentin, encore faux, puisque ce document ancien ou révisé en attente d’approbation, ne prévoit que des surfaces globales par territoire et non sectorisées.
Voilà d’ailleurs ce qui figure sur le rapport des commissaires enquêteurs pour la révision du SCOT :
« Registre du siège du SCOT, Obs. n°1 Registre Baie du Cotentin : Obs. n° 3
Résumé fait par le syndicat mixte du SCoT du Cotentin : Les observations ci-dessus sont relatives au projet touristique d’initiative privée, intitulé « Hommage aux Héros »en projet sur le territoire de la C.C. de la baie du Cotentin, au regard de la consommation de terres agricoles engendrées par la réalisation du projet et de sa compatibilité avec les objectifs de réduction de la consommation d’espaces agricoles et naturels.
Sur ce point, le syndicat mixte répond:
- En raison notamment de l’état d’avancement du projet « Hommage aux Héros » celui-ci n’a pas été directement ciblé ni spécialisé dans le projet de SCOT, d’autant plus qu’il s’agit d’un projet d’initiative privée.
Sa réalisation éventuelle s’inscrira dans le respect des enveloppes foncières définies dans le SCOT, et notamment celle destinée aux grands équipements. La réalisation du projet n’engendrera pas de consommation de foncier supplémentaires à celles autorisées dans le SCOT qui s’inscrivent déjà dans une démarche de diminution par deux conformes aux objectifs nationaux. »
Ensuite ce fut l’intervention musclée du député local Monsieur Philippe Gosselin, affirmant « son soutien total à un projet qui va dynamiser le territoire, afin qu’il prospère, » tout cela dans la croissance exponentielle du monde capitaliste, alors que l’heure est à la sobriété et à la fin de l’abondance dixit Macron.
Les réactions dans la salle n’ont pas tardé, et reprenant la parole il a déclaré « qu’il ne voulait pas que le Cotentin devienne une réserve d’indiens ». Boudu, rien que cela, mais Monsieur vos propos sont extrêmement blessants, méprisants, discriminatoires, voir racistes, tant vis à vis des opposants présents dans la salle, que des indiens que vous semblez ne pas connaître et encore moins leur histoire.
Au fait nous notons que dans votre présentation vous indiquez avoir le soutien et la participation du mémorial de Caen ce qui est faux et qu’on vous avait signalé lors de la première concertation, il serait bon de rectifier vos documents.
Cette troisième réunion thématique ne peut que nous conforter dans l’inutilité et l’indécence de ce projet.
Ci-joint pour information l’intégralité de l’article L 110-1 du Code de l’Environnement :
Modifié par LOI n°2021-1104 du 22 août 2021 - art. 48
I. - Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, la qualité de l'eau, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage.
Les processus biologiques, les sols et la géodiversité concourent à la constitution de ce patrimoine.
On entend par biodiversité, ou diversité biologique, la variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques, ainsi que les complexes écologiques dont ils font partie. Elle comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces, la diversité des écosystèmes ainsi que les interactions entre les organismes vivants.
On entend par géodiversité la diversité géologique, géomorphologique, hydrologique et pédologique ainsi que l'ensemble des processus dynamiques qui les régissent, y compris dans leurs interactions avec la faune, la flore et le climat.
II. - Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants :
1° Le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable ;
2° Le principe d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n'ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées ;
Ce principe doit viser un objectif d'absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité ;
3° Le principe pollueur-payeur, selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ;
4° Le principe selon lequel toute personne a le droit d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques ;
5° Le principe de participation en vertu duquel toute personne est informée des projets de décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement dans des conditions lui permettant de formuler ses observations, qui sont prises en considération par l'autorité compétente ;
6° Le principe de solidarité écologique, qui appelle à prendre en compte, dans toute prise de décision publique ayant une incidence notable sur l'environnement des territoires concernés, les interactions des écosystèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés ;
7° Le principe de l'utilisation durable, selon lequel la pratique des usages peut être un instrument qui contribue à la biodiversité ;
8° Le principe de complémentarité entre l'environnement, l'agriculture, l'aquaculture et la gestion durable des forêts, selon lequel les surfaces agricoles, aquacoles et forestières sont porteuses d'une biodiversité spécifique et variée et les activités agricoles, aquacoles et forestières peuvent être vecteurs d'interactions écosystémiques garantissant, d'une part, la préservation des continuités écologiques et, d'autre part, des services environnementaux qui utilisent les fonctions écologiques d'un écosystème pour restaurer, maintenir ou créer de la biodiversité ;
9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment.
III. - L'objectif de développement durable, tel qu'indiqué au II est recherché, de façon concomitante et cohérente, grâce aux cinq engagements suivants :
1° La lutte contre le changement climatique ;
2° La préservation de la biodiversité, des milieux, des ressources ainsi que la sauvegarde des services qu'ils fournissent et des usages qui s'y rattachent ;
3° La cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations ;
4° L'épanouissement de tous les êtres humains ;
5° La transition vers une économie circulaire.
IV. - L'Agenda 21 est un projet territorial de développement durable.