«France Inter n’est ni de droite, ni de gauche», dit Adèle Van Reeth dans une interview accordée au journal Le Monde, Macron ne l’aurait pas formulé autrement.
Adèle Van Reeth dit assumer sa décision éditoriale à propos de l’arrêt de la diffusion quotidienne de l’émission «C’est encore nous». Assumer est un verbe dont Macron et ses ministres usent et abusent et qui n’engage à rien. Par contre, dire qu’elle a pris une décision éditoriale signifie bien qu’elle a pris position par rapport à l’émission.
Adèle Van Reeth explique sa décision par l’érosion des audiences de l’émission. Pour les chiffres que j’ai à ma disposition, en 2021, 1 million 250 000 auditeurs écoutaient l’émission. Pas mal pour un émission dont les audiences se délitent. Je rappelle aussi, et là, les chiffres sont plus récents, que le podcast de l’émission «C’est encore nous» est le plus écouté de France inter (Médiamétrie avril 2023) et le quatrième, toutes chaînes confondues. Donc, l’argument des audiences semble faiblard.
Alors, elle propose que «C’est encore nous» soit diffusée le dimanche à 18h. Si c’est pour relever les audiences, le pari est risqué. Je propose à l’équipe de l’émission de l’appeler «On est encore là mais pour combien de temps?».
Ensuite, comme un os donné à ronger, elle parle d’une «touche quotidienne» de l’émission. De quelle manière? Combien de temps? Un peu contradictoire si l’émission ne rencontre pas de succès, pourquoi en assurer une présence quotidienne.
Elle annonce aussi qu’un podcast serait donné à Charline Vanhoenacker et à Guillaume Meurice. Elle ajoute selon Le Parisien du 24 mai 2023 que c’est «un nouveau rendez-vous « extrêmement libre, extrêmement incisif, où la satire politique, l’outrance, la caricature auront toute leur place ». Adèle Van Reeth l’assure, « l’humour politique est inséparable de France Inter ». J’avoue que je comprends de moins en moins la logique de ces décisions et je remarque qu’elle a réussi à placer le terme d’outrance, peut-être, est-ce l’inconscient qui resurgit.
Peut-être un début de réponse aux 175 000 auditeurs qui ont signé la pétition contre le passage en hebdomadaire de l’émission ou encore simplement, promesses pour temporiser le temps que la contestation se calme.
Je ne sais pas si Adèle Van Reeth en est consciente mais son discours ressemble tellement à ceux des macronistes que l’on comprend mieux la relégation dominicale d’une émission qui nous fait rire et réfléchir sur la politique et la culture.
Ne pas supprimer mais s’arranger pour que moins d’auditeurs soient présents. Comme pour le grand débat: on veut faire croire que l’on tient compte des avis des citoyens mais sans aucun résultat à la clé. On fait porter la responsabilité sur l’équipe de l’émission comme les pauvres ou les sans-emploi sont responsables de leur situation. On donne un podcast à deux des animateurs de l’émission, on individualise le problème alors que le succès de l’émission réside dans le collectif (comme le reconnaissait d’ailleurs la directrice de France Inter dans sa réponse aux auditeurs inquiets). Bien sûr, comme je le disais déjà dans une autre billet, toute proportion gardée mais il y a bien, un fil conducteur de la logique macronienne dans le discours d’Adèle Van Reeth.
Ce qu’il faut retenir c’est que bien une prise de position de sa part rapport à l’émission, le reste ressemble aux éléments de langage que l’on retrouve dans beaucoup de discours politiques qui ne ont là que pour travestir les vrais enjeux des décisions qui sont prises.
Selon Libération du 24 mai 2023 qui relaie l’interview du Monde, il paraît qu’elle a dit: « Inter a du caractère, Inter dérange, et ce serait manquer de respect aux auditeurs que de la transformer en quelque chose de plus lisse.», qu’elle le prouve et qu’Inter respecte le choix de ses auditeurs. Et ajoutons, que là aussi, cela sent le disruptif macronien et le slogan publicitaire.