LA FRANCE ET LES MIGRANTS: VOICI VENU LE TEMPS DES FOSSOYEUIRS D'UNE CERTAINE IDEE DE LA FRANCE

LA FRANCE ET LES MIGRANTS : VOICI VENU LE TEMPS DES FOSSOYEURS D’UNE CERTAINE IDÉE DE LA FRANCE Il faut, maintenant, dépasser la photo de ce petit corps sans vie, échoué sur une plage. Il faut dépasser l’immense émotion qui a étreint le monde entier. Au-delà des indignations, il faut commencer une introspection de ces Français prisonniers des peurs et de la frilosité ambiante, abusés par les vociférations irresponsables de certains politiciens. De ceux qui promettent « le grand remplacement de la population » par des éléments allogènes, susceptibles de transformer la Fille aînée de l’Église en « Fatma tchadorisée »… Des sondages douteux et manipulateurs fleurissent de partout. Et font croire qu’une grande majorité des Français, rétrécissant leur horizon, sont devenus xénophobes et racistes. La France aurait-elle perdu son âme généreuse ? Pourquoi avoir attendu, avant de réagir, l’insoutenable photo du cadavre du petit Syrien ? Pourquoi ne pas avoir pris en compte plus tôt l’immense détresse des migrants qui n’ont pas cessé de venir se fracasser aux frontières d’une Europe barricadée ? Ceuta, Melilla, Lampedusa…LA FRANCE DES POPULISTES En France, on n’entend que trop les vociférations nauséabondes de certains politiciens de droite qui courent derrière l’échalote du Front National, reprenant sa sémantique d’exclusion et de xénophobie. Ce sont les véritables fossoyeurs des idées nobles qui ont été forgées par la Révolution française. Les Morano, les Sarkozy, les Ciotti et bien d’autres encore auraient-ils oublié d’où ils sont venus ? Si la France avait fermé ses frontières à leurs ancêtres, ils ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui. Ils aiment à rappeler, de façon démagogique, que leur mouvement « Les Républicains » se réclame du gaullisme. En réalité, ils n’en sont que les enfants putatifs. Le Gaullisme s’est fondé sur « une certaine idée noble de la France ». Aujourd’hui, on a mal pour ce pays. Quand on entend les inepties et les vociférations de Nadine Morano, quand on apprend qu’elle veut se présenter à l’élection présidentielle, on s’étrangle. Quand on constate, avec effroi, que les idées d’exclusion et de xénophobie portées par le Front National séduisent de plus en plus de Français, on se dit que l’héritage du Siècle des Lumières est bien menacé. Les Français ont-ils la mémoire courte ? Avant le vaudeville familial ridicule des Le Pen, la fille et le père buvaient le même vin : celui de l’exclusion, de l’antisémitisme, du racisme et de la xénophobie. Il ne faut pas oublier que c’est Jean Marie Le Pen qui a porté sa fille Marine à la présidence du Front National. UNE AUTRE FRANCE EXISTE-T-ELLE ? Les partis de gauche, les intellectuels, les humanistes ont une part de responsabilité dans l’abandon par la France des idées de Liberté, d’Egalité et de Fraternité qui ont façonné son universalisme. La Gauche, en panne d’arguments à apporter aux Français pour contrecarrer les idées du Front National, donne l’impression, elle aussi, de suivre sa charrette infernale. Les plateaux de télévision, ceux de la radio aussi, se sont appauvris en débats républicains. Ils seraient pourtant indispensables pour éclairer les citoyens déboussolés et frileux. Pour leur apporter un éclairage sur les grandes mutations du monde. Pour leur faire prendre conscience que leur pays a les moyens de relever les défis qui assaillent l’humanité et peut redevenir un modèle de tolérance, d’humanisme et de fraternité, comme il le fut jadis. La théorie du déclin n’a pas lieu d’être dans un pays comme la France. Il ne faudrait pas qu’il soit rangé aux côtés des pays déviants et fascisants comme la Hongrie. Personne ne lui suggère d’ouvrir en grand ses frontières, comme le claironnent Marine Le Pen, Nadine Morano et les autres tenants de « la France aux Français ». Mais le monde est devenu un village planétaire. La preuve en a été dernièrement assénée par l’économie chinoise, qui s’est enrhumée. Ce qui a eu pour conséquence immédiate de faire attraper à l’économie mondiale une fièvre de cheval. Comment feront-ils, ceux qui veulent fermer les frontières, quand ils arriveront au pouvoir ? Comment feront-ils pour donner du travail aux seuls Français en se barricadant dans la petite France ? Aucun pays, aujourd’hui, ne peut se targuer d’être autosuffisant. Les populations du village-monde sont interdépendantes. Nous serons peut-être les migrants de demain.A. DE KITIKI (5septembre 2015)