CENTRAFRIQUE DURE EST LA NUIT On ne le répétera jamais assez : l’initiative de la France en Centrafrique - l'opération SANGARIS - menée sous l’égide des Nations-Unies, était une urgence humanitaire. Personne ne peut nier qu'elle était indispensable. Mais comment accepter les déclarations intempestives aux relents paternalistes et néocoloniaux qu'on entend depuis ? Le temps des opérations Barracuda est révolu. A l’époque, une escouade du 2e Régiment de Parachutistes avait suffi à détrôner Jean-Bedel Bokassa et à changer le personnel politique. Les Centrafricains n’avaient pas bronché et le diktat avait été accepté. Mais, depuis, les mentalités ont évolué. Les citoyens savent, maintenant, analyser les soubresauts politiques sociaux et économiques de leur pays. Ils souhaitent, désormais, qu’on les écoute. Qu’on prenne leurs attentes en considération. Même s'ils consentent que des nations amies les aident pour mettre un terme aux souffrances des populations, ils veulent que leur pays soit véritablement indépendant, avec des dirigeants integres. Certes, depuis plus d’un demi-siècle, il a été affaibli par des responsables centrafricains prédateurs et oligarques. Mais, aujourd'hui, il a, à sa tête, un gouvernement de transition, qui agit dans le cadre d'une constitution. Le Centrafrique est, aujourd'hui, un pays souverain, malgré la dure nuit.LES FORCES DE LA MISCA ET DE SANGARIS NE SUFFIRONT PAS Au début de l’opération SANGARIS, on a pu entendre, de la part des autorités françaises, des déclarations d’une grandiloquence insupportable : « L’intervention sera rapide. Elle n’a pas vocation à durer et je suis sûr de son succès… » (François Hollande, Président de la République Française. ) « L’intervention durera six mois… » (Jean-Yves le Drian, ministre des Armées. ) Méconnaissance des enjeux ? Erreur stratégique? L’Etat-major français a, semble-t-il, sous-estimé la complexité de la situation en Centrafrique. Certains ont cru que, comme aux temps anciens, un survol de Bangui en rase-mottes par quelques Rafales rugissants allait suffire à terroriser les habitants. A les mettre au garde-à- vous et à les ramener à la raison. En fait, le chaos est devenu abyssal. Des populations qui vivaient jusqu’alors en harmonie et fraternité ont commencé à s’entretuer. La barbarie s’est emparée du pays. Des images de corps démembrés et mutilés ont envahi les écrans des médias internationaux. Le Centrafrique a été renvoyé aux démons de son passé. Au récit de Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres, paru en 1899, qui présentait l’Oubangui comme un territoire éloigné de la civilisation et de l’humanité. Sauvage et primitif. Alimentant les commentaires de journalistes occidentaux méprisants, pétris d'arrogance : « pays de barbares... Ce sont des sanguinaires… » Désormais, pour justifier le quasi-échec de l’opération SANGARIS, on n'hésite plus à accabler les Centrafricains de tous les maux et à les couvrir d'ignominies aux relents racistes. Ce ne sont pas la MISCA et SANGARIS qui suffiront à ramener la paix et la sécurité en Centrafrique.OBAMA DOIT S’IMPLIQUER FORTEMENT Le Centrafrique est devenu un pays disloqué. Le temps presse. Il faut cesser de louvoyer. De multiplier les déclarations lénifiantes. Les promesses d’aides sans lendemain. Il faut changer de braquet et agir sans tergiverser. Il faut que tous les politicards cessent leurs manigances et s’associent pour apporter au Centrafrique la paix et la réconciliation. L’intérêt suprême du pays l’exige. Malheureusement, on en est encore loin. Malgré l’élection de la nouvelle équipe de transition. Malgré la nouvelle sémantique de fermeté adoptée par la nouvelle Présidente - la Dame de Fer de Bangui - la kyrielle des ossuaires et des corps mutilés continue. Les habitants de la capitale ne regagnent pas leurs quartiers. En province, les populations se terrent dans les forêts. Les éléments de la Séléka, repliés avec armes et bagages, sèment la terreur et menacent de faire sécession en prenant des provinces en otage. Les Anti-balakas, dont la résistance était, au départ, légitime, sont devenus une nébuleuse menaçante et cruelle, à l'égal de la Séléka. Ils pourchassent et massacrent des musulmans. Or, ce sont des Centrafricains, comme eux. Ils sont nés en Centrafrique. La Constitution centrafricaine leur garantit le droit d'exercer leur culte. Aujourd’hui, les Anti-balakas devraient tendre la main à leurs frères musulmans. Participer à des dialogues de réconciliation dans les quartiers et les provinces. Lancer un appel à ceux qui sont en exil pour qu'ils reviennent au pays. Aider à la reconstruction du Centrafrique et à la réconciliation de tous. Mais, pour atteindre ces objectifs, il faut, d'abord et avant tout, sécuriser le territoire. L’O.N.U. doit envoyer d’urgence en Centrafrique une armada de nouveaux Casques Bleus. Obama doit envoyer des Marins. Le temps presse. C’est une question d’assistance à population en danger : humanitaire, sanitaire et alimentaire. La responsabilité de tous est engagée. Aucune nation ne peut laisser le Centrafrique dans une telle souffrance.A. DE KITIKI (9 février 2014)
Billet de blog 11 février 2014
CENTRAFRIQUE: DURE EST LA NUIT
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