ET PYROMANES …
…pendant qu’une population abandonnée agonise dans l’indifférence générale.
Impasse, intrigues et messes basses politicardes ont débuté. Les rumeurs les plus folles circulent : François Bozizé, le président centrafricain déchu, serait à Paris pour rendre visite à sa famille qui y vit, grâce à un visa délivré en 2012, nous dit-on. Dans un entretien à Radio France Internationale, il exprime le souhait de reprendre le pouvoir dans son pays. Au cours de l’entretien, l’ex-homme fort de Bangui annonce la mise sur pied d’une nouvelle structure : Le Front pour le retour constitutionnel en Centrafrique (Frocca) « L’objectif, c’est suivre de près et de dénoncer tout ce qui se passe au pays, afin d’informer l’ensemble de la communauté internationale. » Interrogé sur sa volonté de reprendre le pouvoir, il répond, sans une once d’hésitation : « Oui. Si l’occasion se présente, je ferai ce qu’il faut.» Il a ensuite accusé le Tchad et son président, Idriss Déby, d’être responsable de la déroute de son armée devant Bangui…
Si l’ex-dirigeant centrafricain s’exprime aussi librement, dans un grand média international français , il y a, vraisemblablement, anguille sous roche. On peut penser que la France restera encore longtemps le véritable arbitre du jeu politique en R.C.A. D’ailleurs, dans sa déclaration à R.F.I., François Bozizé a estimé « que la France pourrait jouer un rôle pour résoudre la crise dans son pays. Ce pays a été à nos côtés depuis toujours (…) La France est la nation la mieux placée pour résoudre le problème avec la contribution de l’Union africaine… » Si ce n’est pas un appel à la France pour l’aider à reprendre le pouvoir à Bangui, cela y ressemble. L’ancien président a même annoncé des rendez-vous avec les autorités françaises à la rentrée – alors que, dans le même temps, le Quai d’Orsay faisait savoir que rien n’était prévu en ce sens. Humm…
Une question se pose : pourquoi la France n’a-t-elle pas répondu à l’appel au secours de François Bozizé quand les rebelles de la Séléka étaient aux portes de Bangui ? A ce moment-là, il était encore, malgré ses errements et son autoritarisme, un président élu, à la suite d’élections qualifiées de « régulières» par les observateurs internationaux - même si des erreurs avaient été signalées ici et là
La France dispose, de façon permanente en Centrafrique, d’environ 600 hommes, dont des éléments des forces spéciales. Depuis l’indépendance de ce pays, la France a été, est et sera une des clés de voûte, si non la principale, qui soutient l’édifice Centrafrique. La preuve en est qu’après la diffusion de l’entretien accordé à Radio France Internationale, une certaine nervosité a gagné le gouvernement de transition, soumis à de lourdes interrogations. Des éléments dissidents de la Séléka s’en sont pris, comme toujours, à la population, en tirant sur un groupe de citoyens. A Bangui, beaucoup se prennent à espérer le retour de François Bozizé, considéré comme un messie. La situation en République Centrafricaine est véritablement devenue dédaléenne. Tous ceux qui, dans ce pays, se réclament de la démocratie, devraient se poser la question suivante : pourquoi, un peu partout en Afrique, laisse-t-on destituer par la force des présidents, ou des partis politiques, investis par des élections régulières, cautionnées par les observateurs internationaux ? Pourquoi le Conseil de Sécurité n’empêche-t-il pas ces violations des règles démocratiques ? Ces comportements graves s’apparentent à des démissions face aux responsabilités qui incombent et, de cette façon, cristallisent les ressentiments, plongeant certaines nations dans une instabilité sanglante.
Algérie, Tunisie et, aujourd’hui, Egypte. Ces pays sont depuis longtemps confrontés à des turbulences, après que les islamistes se sont emparés du pouvoir à la suite d’élections dites « régulières », approuvées par les experts internationaux. Même si les idéologies de ces fanatiques Fous de Dieu, sont incompatibles avec la démocratie, était-il utile de les priver de leur victoire ? Tous les démocrates conviennent que la charia impose des textes qui violent les Droits de l’Homme. Oui, mais voilà ! Le Front Islamique du Salut en Algérie, les Frères Musulmans en Egypte ont été démocratiquement élus. Pouvait-on les laisser plonger leur pays dans l’obscurantisme ? Pour les en empêcher, fallait-il recourir à la force ? N’était-on pas capable d’engager le dialogue avec eux, de tenter de les convaincre que couper la main d’un voleur et traiter les femmes comme des sous-personnes est inhumain et inacceptable ?
Les défis futurs, pour les Nations-Unies et l’Union Africaine, seront de créer des espaces de dialogue, afin d’essayer de prévenir les violences qui frappent d’abord les citoyens démunis.
En Centrafrique, la configuration, même si elle n’est pas totalement comparable à celle de l’Algérie, de la Tunisie et de l’Egypte, est, toutefois, similaire. Un groupe de rebelles, aidé par un pays voisin, et des mercenaires financés par les pétromonarchies du Golfe, s’emparent, par la violence, du pouvoir. Le président, devenu autocrate, mais, néanmoins, élu démocratiquement, est destitué et prend la fuite. La France ne répond pas à son appel au secours - ce qui s’explique peut-être par l’engagement de ses forces dans le bourbier malien.. Les pyromanes allument alors le feu en Centrafrique. Le pays s’embrase et se transforme en enfer…
La République Centrafricaine ne sortira pas des abysses sans l’aide de l’Union Africaine, des Nations-Unies et de la France le principal pays ami. Peut-être une mise sous tutelle, pendant quelque temps, est-elle impérative,( c’est terrible pour un adepte de Barthélémy Boganda, d’arriver à souhaiter cette ignominie) afin de réorganiser l’administration, les forces armées, l’économie, les services de santé etc.… Et, surtout, de s’occuper d’une population prise en tenaille, entre les dissidents de la Séléka qui les terrorisent et un gouvernement de transition en difficulté, incapable d’assurer la sécurité du territoire. Il faut d’urgence sortir des luttes intestines d’influence, les intrigues, les messes basses, des querelles autour de la répartition des biens, pour entendre les gémissements de la population, sous les rafales des Kalachnikov.
Il faut aussi demander à l’Ouganda de rapatrier ses troupes qui occupent le Haut-Mbomou et le terrorisent. Renvoyer tous les mercenaires étrangers dans leur pays. Organiser rapidement une table ronde avec tous les acteurs, autrement dit les représentants de tous les Centrafricains sans exclusive. Avancer la date des élections pour que la R.C.A. se dote d’institutions démocratiques etc.
Le pays ne peut plus attendre. Sinon le chaos va s’installer et, avec lui, les souffrances insupportables du peuple centrafricain, qui dure depuis l’aube de l’indépendance. Avec le concours de la France, le Mali s’est mis sur les rails de l’espoir. Il faut maintenant qu’elle saisisse le Conseil de Sécurité de l’O.N.U. dont elle est membre, pour qu’il prenne en compte l’urgence de la situation chaotique en République Centrafricaine. Avant que cette acédie, cet accablement, ne deviennent permanents.
Il faut, activer le dialogue permanent avec le peuple. Le sonder, le consulter, appréhender ses désirs, de liberté et de dignité. Apparemment on n’en prend pas le chemin. Nous apprenons par l’A.F.P. que le Président de transition Michel Djotodia, va prêter serment le 18 Aout, en présence du médiateur Monsieur Sassou Nguesso Président du Congo Brazzaville. Après la prise du pouvoir par la SELEKA, la Constitution Centrafricaine a été suspendue sans consultation du peuple. Un président de transition ne peut s’autoproclamer et prêter serment, sans élections Présidentielles. En agissant ainsi, Monsieur Michel Djotodia et La C.N.T. violent les droits élémentaires des Centrafricains. Ce sont là, des signes précurseurs d’un Etat autocratique, ce qui peut anéantir l’espoir de sortir du chaos.
- DE Kitiki 16/O8/20013
(15 août 2013)