LAMPEDUSA : CIMETIERE MARIN DES MIGRANTS AFRICAINS
Des morts sans nom.Quinze à dix-huit mille Africains, portés disparus au large de Lampedusa. Les requins et autres poissons carnassiers doivent être bien gras. Des images insoutenables de corps repêchés. Des survivants hagards, encerclés par des carabiniers à la mine patibulaire. Dans les médias européens, on ne s’inquiète que de l’efficacité de ce « Nouveau mur de l’Atlantique » qu’est devenue la Méditerranée. Les entrées maritimes de l’Europe se sont transformées en cimetières pour des Africains sans linceul.
L’Europe, pétrifiée de peur, tétanisée face au basculement du monde, renie ses valeurs humanistes. Certains dirigeants, qui n’hésitent pas à se présenter comme les gardiens des valeurs héritées des « années lumière » et donnent des leçons de démocraties au monde entier, envahis par l’appât du gain de futures élections, servent la soupe aux partis extrêmes.
Le gouvernement français, sans consultation préalable des autres membres de l’Union Européenne, remet en cause l’espace Schengen, sous prétexte qu’une horde de Tunisiens affamés est à nos portes… Y a-t-il vraiment danger d’envahissement du territoire français, pour qu’on en arrive là ? Ou, comme d’habitude, n’est-on pas tenté de défoncer la porte avant de frapper, sans penser que quelqu’un pourrait l’ouvrir ? Le spectaculaire et la précipitation sont devenus une science de gouvernement.
Le visage infâme et grimaçant de l’idéologie xénophobe et raciste, qui a plongé l’Europe dans les ténèbres en 1936, s’agite à nouveau. La Hongrie, membre de l’Union Européenne, vient d’adopter des lois conformes à cette doctrine. Mais l’Union Européenne reste muette. Les héritiers des Années Lumières regardent ailleurs. Prenons garde ! Demain, il sera peut-être trop tard.
L’Europe s’est émue de la «Révolution du jasmin» en Tunisie. En même temps, au lieu de tendre la main à ceux qui fuient un pays en proie à l’instabilité, elle se barricade. On nous serine, à longueur de déclarations et d’antennes, que ces Tunisiens qui échouent sur les plages de Lampedusa, n’ont aucune raison de partir. Ils ont fait la révolution, tout va bien, qu’ils restent chez eux !
L’histoire nous enseigne qu’un changement politique dans un pays s’accompagne forcément d’incertitude. N’aurait- il pas mieux valu garder chercher à savoir qui sont ces Tunisiens ayant fui leur pays, avant de les « rejeter à la mer » comme le préconise Mme Chantal Brunel, députée U.M.P. ? Ajoutez à cela les éructations fétides d’Eric Zemmour qui conseille aux Français d’origine étrangère de donner un prénom bien de chez nous à leurs enfants, afin de marquer leur appartenance à la communauté nationale. Il aurait pu commencer lui-même par changer Zemmour par Dupont. Le voilà rejoint désormais dans l’adoration du Front National par Robert Ménard, un des fondateurs de Reporters sans Frontières… La France va mal.les valeurs de la Républiques sont grignotées. Prenez garde citoyens !
« La perversion de la cité commence par la fraude des mots… La vraie tragédie, c’est quand les hommes ont peur de la lumière… » (Platon.)
L’Europe aurait-elle peur de la lumière ? La France, en particulier, serait-elle à ce point envahie par l’ingratitude qu’elle ferme sa porte aux descendants de ceux d’Afrique, venus combattre en 1918 et 1940 pour libérer la Mère Patrie occupée ? Il est vrai qu’à l’époque, indigènes de l’Empire, ils étaient de braves soldats de la République. Comme on dit en Afrique : « On ne regarde pas la couleur du bâton dont vous vous servez pour tuer le serpent qui est entré dans la case. ».
La France est en train de compromettre son influence sur le continent africain, déjà sérieusement entamée. Quoiqu’en pensent les «Afro-pessimistes », l’Afrique est, reste et demeurera le continent de toutes les promesses. Nous assistons à une nouvelle configuration de la géopolitique. D’un monde bipolaire dominé par l’Occident, nous entrons dans un «espace terre» multipolaire.
Les naufragés de Lampedusa sont peut-être les futurs décideurs de l’Afrique, avec lesquels l’Europe devra tisser des liens nouveaux. La France se doit d’être exemplaire, et courageuse en Europe, étant donné son passé colonial en Afrique.
Les élections présidentielles passent, la Nation et la République demeurent.
A. De KITIKI