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Billet de blog 16 octobre 2025

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La présidente de l'Assemblée nationale parle institutions... Compétence ou acédie ?

La question institutionnelle est généralement abordée de manière politicienne : sondages indiquant les termes à employer pour se rendre populaire, opportunisme législatif censé engendrer pour les siens un avantage politique... Y. Braun Pivet ne fait pas exception, en ânonnant des principes galvaudés tant qu'ils ne sont pas assumés dans toute leur portée. Bref exposé des principaux enjeux.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Vidéo source : https://youtu.be/nQnTGgnlSCo 

"Horizontalité", "partage du pouvoir"... Ces enjeux sont abordés par les élites comme des hochets dont amuser le petit peuple. La question institutionnelle est majeure mais minorée par un personnel politique qui n'est pas à la hauteur. 

Sondages et orientations politiques mis à part, ce sont les principes fondamentaux de notre régime et de notre "contrat social" ( clairement malmené depuis des décennies ) qui doivent être mobilisés. Pour aller vite, je résume l'esprit des institutions de la Ve République à une "démocratie qui marche au pas". Pensée pour un militaire, avec exigence d'efficacité qui s'est transcrite par une forte verticalité ( ensuite accentuée plutôt qu'atténuée par des présidents mal plébiscités ) ; son enracinement dans le suffrage universel est incontestable, partant son principe démocratique. Néanmoins, en termes de gouvernance, la part laissée aux experts ( la Ve marque l'ascension des énarques en remplacement des juristes ) est gigantesque à l'étape opérationnelle de l'action politique.

Or, dans le même temps, le citoyen est devenu un néant juridique. Sauf en de rares circonstances, la République ne connaît plus que des administrés, également assujettis à l'administration centrale. Certes, elle se veut "bienveillante", elle n'est en aucun cas brutale à la mode bolchevique. Néanmoins, le principe est difficile à soutenir au regard de notre histoire républicaine, tandis que les résultats politiques et sociaux de son irénisme égalitariste apparaissent de plus en plus désastreux ( égalitarisme = perversion du principe d'égalité républicaine qui substitue l'égalité théorique entre humains à l'égalité politique entre citoyens ).

Dans l'inculture politique actuelle, on parle de "démocratie participative" : pléonasme niais. Si la démocratie est le pouvoir au peuple, nul ne saurait exercer le pouvoir sans participer soit à la désignation des (ir)responsables, soit à la pratique du pouvoir. C'est pourquoi la question qui monte de plus en plus, année après année d'incurie politique au sommet de l'Etat, c'est l'introduction de procédures de démocratie directe dans notre constitution. L'objectif n'est pas un renversement total de pouvoir, mais de perspective. En allant au bout de la formule : "gouvernement du peuple, par le peuple, POUR le peuple", il s'agirait de restaurer le citoyen comme finalité ultime, prioritaire, de l'action politique. Cela n'implique pas de persécuter le non citoyen, mais de le recadrer. A charge pour lui d'accéder à la dignité civique, s'il en est capable ( = méritocratie ).

Problème : la caste au pouvoir soit ignore tout des exemples historiques de démocratie directe qui pourraient inspirer des ajustements constitutionnels et législatifs, soit hait tellement l'éventualité de perdre une illusion de pouvoir qu'elle cherche à discréditer ces mesures en créant des dispositifs voués à l'échec ( machin consultatif sur l'environnement... ).  Or, des procédures de démocratie directe sont à comprendre dans un rapport dialectique au pouvoir, et se révèlent en dernière instance indispensables à la bonne gouvernance des experts. En effet, en matière d'instruction civique, on mise tout sur une formation initiale qui est notoirement insuffisante. C'est par l'implication dans les rouages de l'Etat, des plus fins aux plus éminents, que l'on peut espérer disposer d'une masse critique de citoyens au fait de la gestion d'une nation comme la France du XXIe siècle. Sans cette masse critique ( masse critique = ensemble dont les gains quantitatifs engendrent une mutation qualitative ), les meilleures mesures du monde préconisées par nos énarques ou autres experts provoqueront l'embrasement de la rue. 

En résumé, introduire des procédures de démocratie directe dans notre système politique est, sur le principe, républicain : cela permet de corriger certaines outrances de notre constitution qui se sont accentuées au point de délégitimer l'Etat ; à rebours de plusieurs siècles de sacralisation : "religion royale"... Surtout, cela peut se révéler plus efficace, aussi bien en termes de gouvernance que de cohésion sociale... Sans parler de budget.

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