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Billet de blog 22 avril 2021

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La musique, une histoire d'homme ?

Un air de changement commence à résonner dans le milieu de la musique classique encore largement dominé par les hommes. Cheffes, solistes etc, les femmes sont de plus en plus nombreuses, mais pendant des siècles, elles étaient quasiment exclues. Quels sont les fondements de cette ostracisation des femmes dans l’histoire musicale ? Faisons un rapide retour sur celle-ci…

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Dès les origines de l’espèce humaine, hommes et femmes eurent un rôle différencié : les femmes étant les seules capables de mettre au monde, il leur est vite revenu la besogne de les élever ainsi que les autres tâches domestiques, tandis que les hommes, de leur côté, étaient globalement chargés de protéger leur famille, avaient aussi un rôle de gouvernance des relations sociales, mais, ensuite, se sont “appropriés” le domaine de la création artistique. Par la suite, les différents peuples devenus sédentaires, les hommes développèrent chacun leur propriété privée (maison personnelle, famille....) dont devaient s’occuper les femmes, ne leur laissant, dans ce contexte, que trop peu de place à l’épanouissement de leurs éventuels penchants artistiques.

Sous la Grèce antique, de rares représentations laissaient apparaître ce qui semble être des chanteuses, mais mis à part Sappho, la poétesse lyrique de Lesbos, pas une seule compositrice n’a marqué l’histoire de cette époque.

À côté de cela, une autre raison explique en partie le peu de femmes au sein de la musique: la religion. Les préceptes de celle-ci ont renforcés le patriarcat et certaines tendances machistes infériorisant les femmes (d’après la Bible, Dieu a créé la femme, Ève, à partir d’une côte d’Adam, qui, lui, fut créé à son image).

À partir de l’Antiquité, si, au sein de l’espace privé, la pratique musicale par une femme rajoutait du charme à la femme au foyer, celle-ci étant vu comme une distraction ou bien une lubie, la pratique publique d’un tel art était assimilé à de la prostitution, les musiciennes étaient des esclaves qui dans l’esprit de chacun gagnaient leur vie en se prostituant, étant vues comme des séductrices, voir des “diablesses” dont la voix était considérée comme trop sensuelle : la preuve, par une loi de 318 après J.C. il était interdit à toute femme de chanter à l’église. Les femmes, considérées comme impures, sont donc exclues de la musique sacrée. La présence des femmes pouvant perturber les hommes en prière, elles n’étaient pas souhaitées au sein des cœurs.

C’était toujours le cas au Moyen Âge, où l’invention ainsi que l’apprentissage de la musique était uniquement dispensé dans les universités et cathédrales, étant réservées aux hommes, excluant donc les femmes d’une possible éducation musicale (sauf exception) jusqu’à la création des conservatoires bien plus tard, au XIXe siècle.

À la Renaissance, les corporations de musiciens étaient exclusivement masculines, et les instruments à vent jugés inconvenants dans la bouche d’une femme. Néanmoins, l’histoire prit une tournure différente avec l’arrivée de l’aristocratie où l’éducation musicale est de plus en plus encouragée. Au XVIIIème siècle émergent des compositrices comme Élisabeth Jacquet de La Guerre ou encore Barbara Strozzi.

Un siècle plus tard, ça y est, des femmes sont formées dans les écoles de musique, même si leur talent reste largement étouffé, comme Clara Schumann, considérée par beaucoup comme la plus grande pianiste allemande du XIXème siècle, qui choisit de se mettre en retrait dans sa carrière musicale pour s’occuper de ses sept enfants ainsi que pour privilégier le talent de son époux, Robert, qu’elle aida énormément dans sa carrière en l’assistant dans l’écriture de certaines compositions, mais également en dirigeant des concerts à sa place quand celui-ci est trop fatigué. Elle finit avec le temps par ne plus du tout écrire. Même destinée pour Alma Mahler, compositrice autrichienne de musique classique, à qui son mari Gustav Mahler demanda une dévotion totale ainsi qu’un renoncement de toute ambition personnelle en lui disant un jour “qu'est-ce donc que ce travail, composer ? Tu n'as désormais qu'une seule profession : me rendre heureux”, lui qui était lui-même compositeur… Nous pouvons également citer l’exemple de Fanny Mendelssohn, compositrice Allemande et soeur du compositeur Félix Mendelssohn, à qui le père dit un jour “La musique deviendra peut-être pour ton frère Félix son métier, alors que pour toi, elle doit seulement rester un agrément, mais jamais la base de ton existence et de tes actes.” Le théâtre a aussi écarté les femmes, à commencer par le théâtre nô (Japon), qui, comme
dans des pièces de Corneille ou de Shakespeare, faisait jouer les rôles féminins par des hommes. Sur le même principe, à l’opéra, au XVIIe et XVIIIe siècles, des castrats interprétaient les rôles de femmes. Exemple d’un machisme latent, nous pouvons également citer Herbert Von Karajan, chef d’orchestre autrichien, qui a dit un jour que “la place d’une femme est dans la cuisine, pas dans un orchestre symphonique. »… En effet, des représentations très profondes et archaïques de la musique classique persistent, freinant les compositeurs actuels dans leur libération de ce cadre, restés longtemps éloignés des évolutions de la société : le compositeur est un peu un dieu incarnant la création, le chef d’orchestre représente l’autorité, vertu souvent associée au masculin...

Au XXIème siècle, la situation semble tout de même s’améliorer. Néanmoins, aujourd’hui encore à peine 4% des œuvres classiques jouées sur les scènes nationales en France sont des œuvres de compositrices et à la direction des orchestres en France, on compte seulement 21 femmes pour 586 hommes, soit 4% de cheffes d'orchestre. Toutefois, la tendance est à l’amélioration, plusieurs mouvements encouragent une meilleure
représentation des femmes dans le milieu de la musique classique, comme la plateforme “Demandez à Clara” (en hommage à la pianiste) répertoriant toutes les œuvres de compositrices, ou encore le concours de la Maestra, lancé par Laurent Bayle, président de la Philharmonie de Paris pour promouvoir les femmes dans la direction d’orchestres. Ce concours accompagne les finalistes : l’idée n’étant pas seulement de leur décerner un prix, mais aussi de les soutenir dans leur art et leur carrière.

Julie MARIE - Le Havre - Le 7 mars 2021

Sources :

https://www.lepoint.fr/musique/musique-classique-ou-sont-les-femmes-15-09-2020-2392092_38.php

https://www.rtbf.be/musiq3/article/detail_les-femmes-dans-le-monde-de-la-musique-classique-tendance-a-l-amelioration-en-2019?id=10409056

https://www.francemusique.fr/emissions/l-invite-du-jour/sexisme-place-des-femmes-dans-lamusique-classique-il-n-y-pas-d-evolution-flagrante

https://rcf.fr/actualite/societe/musique-classique-ou-sont-les-femmes

https://www.youtube.com/watch?v=v2qEVtefcAs

https://www.symphozik.info/les-femmes-et-la-musique-classique,78,dossier.html

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