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Billet de blog 2 octobre 2016

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Manifeste contre les sales gosses

En ce moment dans la Drôme, dans le village d’Allex où est prévu l’accueil de 50 réfugiés, le Front National distribue des tracts contre, je cite, « ceux qui fuient leur pays plutôt que de se battre pour lui ». A ce niveau, on hésite entre citer Audiard ( « Les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît. »), et rappeler deux trois leçons de savoir vivre.

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                En ce moment dans la Drôme, dans le village d’Allex où est prévu l’accueil de 50 réfugiés, le Front National distribue des tracts contre, je cite, « ceux qui fuient leur pays plutôt que de se battre pour lui ». A ce niveau, on hésite entre citer Audiard ( « Les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît. »), et rappeler deux trois leçons de savoir vivre qu’on réserve en principe aux ados pénibles. J’aimerais que les gens qui distribuent ce tract m’expliquent ce qu’ils ont fait d’aussi héroïque dans leur vie qui leur permette de donner ce type de leçon, de parler avec autant de morgue. Combien d’avions de chasse ils ont descendus au fusil d’assaut? Combien de jours de bombardements ils ont endurés enfermés dans une cave ? Combien de jours de combat de rue ils ont sur leur CV ? Combien d’enfants, de frères, d’amis, ils ont perdus enterrés vivants ou déchiquetés par les obus ?

                Mais combien de temps va-t-on encore laisser dire des conneries pareilles ? On peut faire de belles analyses, mais ce discours qui s’installe est tout simplement le contraire de tout ce qu’on apprend en principe à ses enfants et qui relève du savoir vivre le plus basique : on évite de faire le malin, on partage, on ne fait pas aux autres ce qu’on ne voudrait pas qu’ils nous fassent, on réfléchit avant de parler, on est gentil avec les invités, etc. Et qu’on ne me dise pas que ces principes sont « bobo », où je ne sais trop quoi. La politesse, le savoir vivre, la décence et la générosité ne sont pas réservés à la « bonne société », j’ai même plutôt tendance à penser que c’est le contraire.

                Combien de temps, donc, va-t-on accepter d’entendre, à longueur de journée, ce concert d’égoïstes et d’avares fiers de l’être ? Il y en a toujours eu, bien sûr, qui ne voulaient pas prêter leurs billes à la récré mais, que je sache, l’instit n’en faisait pas le modèle à suivre ! Il me semble que les radins, les mesquins, en temps normal on leur fait honte, et franchement, être un des pays les plus riche au monde, en faire si peu, et en plus en être fier… c’est bouffer son quatre heure en cachette pour ne pas se faire taxer par le copain qui n’a pas eu les moyens de se payer la cantine à midi… c’est vilain, très vilain.

                Alors bien sûr, on est plus à l’école, on est grand, maintenant c’est sérieux. Et bien justement. Ces règles de savoir vivre qu’on inculque en principe aux enfants, et qui sont au cœur de toutes les grandes sagesses du monde, qu’elles soient philosophiques ou religieuses, elles sont là parce qu’elles sont les conditions minimales de la vie en société. C’est pour ça qu’on ne peut plus laisser les sales gosses transgresser tout cela sans vergogne.

                 Donc ça suffit, et j’ai l’impression de voir de ci de là qu’on est en train de sortir la tête du seau. Alors continuons, reprenons la main, disons sereinement que nous souhaitons accueillir des réfugiés, chez nous s’il le faut, que nous sommes prêts à donner de l’argent pour les aider, à augmenter nos impôts, que ce ne sera peut être pas simple, mais que sans ça, ça va devenir difficile, sinon impossible, de donner des leçons de morale à nos gosses.

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