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Dans ce beau pays de France où l’on aime les parfums de luxe, la police républicaine et les missiles nucléaires, il y a aussi des enfants. Parmi ces petits êtres vifs et riants, ces écoliers et écolières assisEs sagement dans nos classes, ces filles et ces garçons qui jouent et étudient comme si de rien n’était, se dissimulent sournoisement de terribles criminelLEs.
Quel est l’odieux forfait dont ces gaminEs sont les impudentEs coupables ? Il est double :
Leurs parents sont pauvres.
Leurs parents sont étrangers.
On reste sans voix devant l’horreur d’un tel attentat, commis sans vergogne par ces mômes néEs quelque part ou bien ici mais que les papiers des parents rattachent malgré elleux à l’ailleurs.
Heureusement, nos services sociaux ouvrent l’œil et le bon, nos pointilleuses CAF s’attachent avec la plus grande rigueur à punir ces perfides têtes blondes et brunes d’être sortiEs d’un ventre étranger, en les privant de toute aide. Et, na !
Il ne manquerait plus que des allocations familiales aident leur famille à les élever dans de meilleures conditions ! Qu’iels deviennent riches d’abord et on verra si iels peuvent prétendre à des allocs, ces ressortissantEs de l’union européenne et de plus loin. Non, mais ! Il ferait beau voir que le pays des droits de l’Homme se mette à respecter les droits des enfants.
Non pas. Il faut qu’iels en bavent et pour longtemps. Il faut qu’elles en chient tellement que peut-être, l’une ou l’autre famille, exsangue, refera le balluchon pour s’en aller voir si l’herbe est moins rance au-delà des frontières. Hourra, crieront les braves gens, le jour de gloire est arrivé : on a bouté dehors une poignée de mouffletTEs aux souliers crevés ! La France est décidément une grande puissance.
Quant à tous les enfants qui restent parce qu’ici est leur pays, iels n’ont qu’à se débrouiller avec leur parents exploités dans les boulots non déclarés et mal payés que nos forces vives de la nation leur offrent comme seuls gagne-soupe. Iels n’ont qu’à aller mendier la charité privée, hanter les associations pour quelques boites de raviolis en conserve, montrer patte blanche pour un cahier sponsorisé par de gentils milliardaires philanthropes, compter sur les capricieuses aides municipales. Puis rentrer faire leurs devoirs dans le bidonville en compagnie des rats, dormir dans leur squat et leur mobilhome sans électricité et plein de courants d’air, en attendant l’expulsion.
Arbitraire, paternalisme, dépendance : tel est le lot réservé à ces bambinEs qui grandissent sans le soutien de l’État, à ces enfants soumisEs à l’obligation scolaire mais scolariséEs sans la moindre allocation parce que leurs parents en plus d’être pauvres, sont étrangers.
Il paraît qu’il y a quelque chose de rationnel là-dedans. Et même de juste...
Qui sème la misère récolte la colère, nous arrive-t-il de chanter en certaines occasions.
Ces enfants qui n’auront connu que la grande pauvreté, la peur que la police s’en prenne à leurs parents, le rappel sans cesse ressassé qu’iels sont des étrangers dans leur propre pays, grandissent avec leurs poings serrés au fond de leurs poches vides.
Il suffit d’attendre quelques années pour découvrir quels adultes iels seront devenuEs.