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Il doit y avoir un nom, pour désigner cette attitude mentale qui consiste à toujours tenter d'apporter au même problème la même solution, celle dont on sait précisément qu'elle est inopérante, qu'elle n'est pas une solution puisqu'elle ne fonctionne pas. Ce problème, il est d'une banalité affligeante, c'est celui, si particulier à notre époque, de l'absence de logement, celui qui condamne une partie grandissante de la population à vivre sans abri, à la rue. Des hommes, bien sûr, mais aussi et de plus en plus des femmes et des familles avec enfants, des bébés, des nourrissons.
Certains ont décidé, contre toute évidence, de regarder ailleurs en réduisant le nombre des dits, "sans domicile fixe" à quelques dizaines de récalcitrants, mineurs ou majeurs, à une poignée d'irréductibles amoureux du trottoir, refusant la main pourtant si généreusement tendue de l’État et ses mirifiques propositions d'hébergement. C'est le ministre de l'Intérieur, c'est tel député, c'est le cynisme habituel de beaucoup d'hommes et femmes de pouvoir, qui ne semblent s'être hissé.es si haut que pour nuire à l'intérêt général et, avec une spéciale intensité, à celui des plus fragiles.
Quand la neige paralyse une partie du pays, quand les températures chutent, voici tout à coup l'affolement médiatique et l'on se souvient un instant que le logement est l'un des besoins fondamentaux de l'humain, que l'on meurt souvent en France d'en être privé. La solution? Toujours la même : l'ouverture de quelques places supplémentaires, ces nuitées dans des hôtels perdus dont le taulier prospère grâce à la manne du 115.
À Montreuil, vivent dans des conditions précaires des familles venues de Transylvanie. Elles habitent depuis si longtemps dans la ville que des photos anciennes montrent des enfants qui sont aujourd'hui devenus parents, ici à Montreuil. En juillet 2016, ces familles ont été expulsées de leur habitation située sur un terrain compris dans l'une des vastes opérations immobilières qui transforment la commune. Elles se retrouvent à la rue. Le maire communiste refuse de considérer la question de leur relogement comme un problème interne à la ville, et renvoie au droit commun, à l’État. Après des mois d'errance sur les trottoirs, et de nombreuses et vaines tentatives policières de les faire déguerpir, après des nuits à ciel ouvert ou sous la tente, une "solution" est enfin proposée par les services de la Préfecture : des nuitées dans des hôtels perdus dont le taulier ne prospère que grâce à la manne du 115. Dispersés dans toute l'Île de France, et souvent très loin de Montreuil, ces hôtels ne répondent pas au besoin des familles. La "solution" est un échec. Quelques semaines plus tard, alors que la neige recouvre les poussettes des bébés et que l'on commence sérieusement à tousser sous les tentes, la mairie renvoie toujours à la responsabilité de l’État et une "solution" est proposée par les services de la Préfecture : des nuitées dans un hôtel dont le taulier prospère grâce à la manne du 115. La vie à l'hôtel dans une commune inconnue, dans de petites chambres et sans possibilité de cuisiner ne correspond toujours pas aux besoins des familles. Même solution égale même échec.
Depuis un an, ces familles vivent dans des voitures ou des camionnettes garées à l'écart du centre-ville montreuillois. Mais l'hiver revient tous les ans. Tandis que la neige recouvre le toit des véhicules et les poussettes des bébés, tandis que les températures descendent la nuit en dessous du zéro, tandis qu'un nourrisson et sa maman ne sont que pour quelques jours à la maternité et s'apprêtent à rejoindre le confort douillet de leur camionnette chauffée à la bonbonne de gaz, des voisins inquiets alertent la mairie. Il n'est toujours pas question que la municipalité agisse. Alors, la solution proposée par l'adjoint qui s'y colle? Le droit commun, le recours aux services de l'Etat : des nuitées dans des hôtels perdus dont le taulier ne prospère que grâce à la manne du 115. Il parait qu'il reste des places là-bas, vers l'aéroport de Roissy. L'adjoint fournit même le plan pour s'y rendre. On est touché de tant de sollicitude. La police est passée par deux fois contrôler les familles hier, on espère qu'il ne s'agit que d'un recensement des besoins. On se méfie, on a raison.
Pourtant, de vraies solutions existent. Le maire lui-même en fait la publicité, sur sa page Facebook. Dans un post plein de sagesse et de conviction, Patrice Bessac évoque une situation de mal-logement sur Montreuil, heureusement solutionnée par l'action énergique du maire : Un incendie survenu lundi soir dans un pavillon, a privé de toit 8 familles logées dans des conditions indignes. Mises à l’abri dès le 1er soir, ces 19 personnes sont accompagnées par la Ville de Montreuil dans leurs démarches auprès des services administratifs et sociaux. J'adresse un message de fermeté à tous ceux qui font commerce et s'enrichissent sur le dos de la détresse et de la pauvreté. Cet événement qui aurait pu être encore plus dramatique, illustre le phénomène de mal-logement et ses ravages. Ces pratiques sont inacceptables et ne doivent plus avoir cours à Montreuil. Pour combattre ce phénomène, j’ai décidé de mettre en oeuvre, à Montreuil et dans les mois qui viennent, avec Stephan Beltran, conseiller municipal délégué au logement et à l'habitat, le dispositif «Permis de Louer».
Alors que la Loi de Finances votée en décembre a amputé la politique du logement de 1,7 milliards d'euros et que le Président s'apprête à faire voter la Loi ELAN, qui est une véritable entreprise de démolition du logement social et des bailleurs sociaux, nous avons plus que jamais besoin du logement social pour relever le défi du mal-logement en France, subi par plus de 4 millions de nos concitoyens. Le service public, nous ne le dirons jamais assez, est la seule richesse de ceux qui n'en ont pas. C'est encore plus vrai quand on parle du droit fondamental de se loger dignement.
Ce que l'on peut faire pour certains, on ne peut pas le faire pour d'autres. Surtout quand l'autre est un étranger, un Rom?