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Billet de blog 15 février 2016

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Les honneurs du margouillis

On croit bien les avoir déjà vues, ces sinistres trognes. Et que trop ! Histrions usés pour comédie de boulevard au scénario maintes fois rebattu, mais curriculum de vrais truands.

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Illustration 1
Quelqu'un sait-il faire quelque chose? © Cardon

Pluie fine et glacée pour un hiver de fonte. Ah, ce gris partout ! Flaques pétrole sur l'asphalte, manteaux de deuil bouclés au col, et grisaille jusqu'au ciel plombé par-dessus les blocs de béton où s'accrochent les nuages. Les premières jonquilles pètent leur jaune détrempé dans le silence assourdissant d'une fin de messe. Ça cloche.

Il faut gagner sa vie. L'ami kiosquier vend en éclatant de rire la propagande dominicale, grasse comme le lard à barder les oies qui rôtissent dans les fours bénis des bourgeois. Ils en ont plein les mains : de la Une propre à recueillir les ordures, supplément couleur offert contre petite monnaie qui cliquette dans la paume. C'est qu'on prépare le casting de la prochaine élection à grand spectacle et les gueules des prétendants s'affichent en couverture des magazines.

On croit bien les avoir déjà vues, ces sinistres trognes. Et que trop ! Histrions usés pour comédie de boulevard au scénario maintes fois rebattu, mais curriculum de vrais truands. On les croyait en taule, ou au moins au vert, on n'est pas si chiens pourvu qu'ils nous foutent enfin la paix. Mais les revoilà tels des morpions récidivants, tout fringants de vertu rafistolée, d'honneur mal rincé dans les eaux croupies d'une justice de classe qui n'expédie au trou que les désargentés. Toujours les mêmes tristes figures d'arrivistes, mafieux de la politique d'affaires, carriéristes au long cour, nageant depuis les langes dans le sens du courant qui mène du syndicat étudiant au ministère, énarques-éprouvettes grandis dans les couveuses de la République pour en faire des valets dociles et impuissants. Soixante-six millions de Français mais sempiternellement les même vingt têtards suffisamment imbus d'eux-mêmes pour ne pas se rendre compte qu'ils font vomir le peuple qu'ils n'ont jamais représenté.

Et c'est reparti pour un tour de grande lessiveuse à essorer la pseudo-démocratie. Pendant ce temps-là, les bombes pleuvent sur Alep et ailleurs, les réfugiés fuient le carnage par milliers, ça crève de faim et de froid pas loin des palais dorés, dans les bidonvilles qu'on ventile à coups de pelleteuses humanitaires et de manifestations racistes. Qu'importe le charnier mondial puisque de tout temps la mort des uns est le pain des autres. Pas étonnant qu'ils aient des allures de fossoyeurs, nos honorables chevaliers de la légion d'horreur. Il faut satisfaire au fric qui finance l'élection. Il faut caresser l'électeur au cul, en lui promettant un paradis d'enfer quand le métèque aura crevé sur les barbelés acérés tendus aux frontières. La France aux Français est l'écho répété de droite à gauche, de gauche à droite. Il paraît que ça fait un grand pays, toute cette boue putride. Il paraît qu'on doit en être fiers.

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