Gros chagrin dans le territoire des Hauts-de-Seine. L'esprit policier réactionnairo-mafieux à perdu son représentant le plus corsé. Ah, qu'il était bonhomme, Charlie! Avec son franc-parler, sa jovialité méridionale et son paternalisme vieille France ! Et les éditorialistes peu inspirés de convoquer Fernandel, Pagnol, l'anisette, le petit berger et la cochonnaille corse : toute la quincaillerie provençale qui fleure bon le temps où l'on savait garder jusqu'à la tombe le secret des grosses magouilles entre amis et des assassinats. Les honorables membres du clan des ripoublicains, en grand deuil, défilent à la télé, les yeux battus, la lippe en berne pour déplorer la perte inestimable de ce vrai patriote qui voulait terroriser les terroristes mais terrorisait les étudiants et les immigrés. La françafrique se désole sur ses barils, la maison poulaga s'attriste en cirant ses matraques, et la grande truanderie tresse la couronne des regrets éternels.
Hélas, nous vivons une sale époque où l'on ne respecte plus rien. On entend scandaleusement certains se réjouir de la sereine supériorité des vers sur l'innocent aux mains sales dont ils feront bientôt leur repas. D'autres osent rappeler à demi-mots que le jeune résistant avait tourné depuis longtemps vieux réac, se déclarant des valeurs communes avec le front national. D'autres enfin font de l'ironie sur le champion toute catégorie du passage entre les gouttes des orages judiciaires pour des broutilles : financements politiques frauduleux ou illégales ventes d'armes.
Mais le cadavre du grand gaulliste reste imperturbable face aux critiques indignes des mauvais esprits. Il attend tranquillement du tribunal céleste qu'il prononce, comme de juste, un dernier non-lieu.