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Billet de blog 26 septembre 2010

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Partie VI : le Risque Global des Marchés Financiers.

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Faut-il interdire l’accès de tous les Marchés Financiers à la Haute Finance ?

RAPPEL DES CHIFFRES GÊNANTS.

Au dernier pointage (révision à fin septembre), le Produit Intérieur Brut de la Zone Euro était officiellement chiffré à 8.959,4 milliards d’euros (MD€), contre 9.244,7 MD€ à fin 2008, soit un recul de -3,09%. La projection pour 2010 permet de penser que le niveau de 9.250 MD€ sera de nouveau atteint. Par contre, ces estimations sont « à prix courants », et donc il suffit de casser systématiquement le thermomètre des prix pour afficher une croissance des PIB « à prix constants » en Zone Euro.

Problème ? Depuis la création de la monnaie commune, non seulement cette croissance est faible (de l’ordre de 1,0%, à périmètre constant) mais, en plus, la masse monétaire M3 a plus que doublé : de 4.445 MD€ à fin 1998 (création de l’euro au 1/1/1999) : elle est passée à 9.420 MD€ à fin juillet 2010. Pendant la même période, le PIB Courant a augmenté de 50 % : de 6.150MD€ à probablement 9.250 MD€. En clair, il y a maintenant plus de monnaie en circulation que de richesses créées en Zone Euro. Il y a donc de plus en plus de « fausse monnaie »…. Merci à la BCE et à tout le Système Européen des Banques Centrales (SEBC) ! Le PIB affiché dans ces conditions, c’est un peu comme si on vous servait un vin de grand cru, baptisé avec 50% d’eau : vous avez l’illusion d’avoir une « bonne bouteille », avec « une bonne étiquette » et « une bonne année », mais cette bouteille de 112,5 cl (au lieu de 75 cl) contient maintenant un breuvage infâme.

Pour les alouettes en tout genre, ce genre de détail n’est pas intéressant : le printemps est revenu (fin du recul du PIB) et la crise est derrière nous. Ils oublient bien sûr de parler du Marché de l’Emploi : entre la fin 2008 (147,9 millions d’emplois) et la fin mars 2010 (144,3), plus de 3,6 millions emplois ont disparu au sein de l’Economie en Zone Euro.

Ils oublient aussi de parler du chômage qui touche désormais plus de 15,8 millions de personnes (fin mars et fin juillet 2010) contre 11,9 millions à fin 2008 : +32,7% en deux ans.

Or, ces chiffres sont trafiqués en permanence, tout le monde le sait :

  • il suffit de travailler 78 heures dans le mois pour ne plus faire partie des demandeurs d’emploi de la nouvelle catégorie A ;
  • il faut surtout cocher la case "CDI - Temps Plein" car si vous cochez toutes les cases en désespoir de cause, vous n'êtes plus "demandeurs d'emploi en catégorie A" ;
  • les administrations multiplient les pièges pour exclure les demandeurs - manu militari - en durcissant les fameuses « démarches obligatoires » et les entretiens stériles qui découragent les demandeurs, surtout les jeunes. Donc, merci au passage à « nos partenaires sociaux » (les syndicats et le MEDEF) qui nous ont concocté une Société et une Administration (Pôle-Emploi) aussi barbares…
  • elles inventent des trappes en tout genre pour parquer les demandeurs dans des formations inutiles ou pour les basculer dans des « emplois aidés » qui ne permettent même pas aux bénéficiaires de payer leur loyer.

Ainsi donc, pour une population de près de 330 millions de personnes, la Zone Euro comptait 52 millions de pauvres à fin 2008 ; autrement dit, 16% de la population eurolandaise avaient des revenus inférieurs à 60% du seuil de pauvreté. Sur les 16%, 8% de cette même population avaient un travail, censé les faire vivre dignement (travailleurs pauvres). Or, ce seuil de pauvreté, fixé à 60% du revenu médian, varie lui-même de pays à pays : du simple au quadruple. Il était à 10.541€ par an et par personne à fin 2008 en France ; au Luxembourg, il était de 18.550€ ; pour la Grèce, il était de 6.480€ ; pour le Portugal, il était fixé à 4.886€. Astuce ? C’est le salaire médian du pays qui sert de repère : la moitié des salariés de la population considérée gagne moins, et l'autre moitié gagne plus. En prenant 60% de ce salaire médian, les statisticiens d’EUROSTAT « ignorent » que les chiffres de la misère noire commencent déjà à 50% de ce salaire médian. Prévisions 2010 : sans tenir compte des situations dramatiques dans les pays de la Zone Euro les plus touchés, il faut s’attendre à ce que 25% de la population eurolandaise disposent de revenus inférieurs à 60% du seuil de pauvreté.

Autre chiffre gênant : la Dette Publique. La Haute Finance était en dépôt de bilan généralisé, et elle s’est momentanément renflouée en puisant dans les caisses de l’Etat et en bloquant la croissance des recettes : la Dette Publique est allègrement passée de 65% à près de 80% du PIB. Pour les moteurs du néolibéralisme, c’est plutôt « la casse moteur » : l’Irlande était endettée à hauteur de 25% de son PIB ; à fin 2009, elle est passée à 65%. Pour les autres, les augmentations de la Dette Publique seront de l’ordre de +20% entre 2008 et fin 2010.

Autre Point Noir : le Commerce Extérieur. Nos transactions courantes (toujours en Zone Euro) ont été déficitaires de -153,8 MD€ en 2008 et -55,9 MD€, essentiellement à cause des pertes de la Haute Finance sur les placements financiers et boursiers et à cause des revenus d’investissements négatifs ; la Chine et la Russie nous occasionnent des déficits dans la balance des biens ; les Etats-Unis nous ont coûté une perte de 45 MD€ nets pour les deux années 2008 et 2009 (haute finance) et le Japon creuse notre déficit en technologies à hauteur de 30 MD€ chaque année. Les Institutions Européennes nous coûtent 46 MD€ par an, essentiellement pour entretenir une Eurocratie dévouée aux lobbies.

Quand une balance des transactions courantes est déficitaire, il faut éviter que les entreprises réduisent leurs investissements sur le sol national car l’impact est dans ce cas doublement négatif : pour redresser un pays, il faut éviter des fuites de capitaux au titre des Investissements Directs. Et bien, là encore, la Zone Euro est mal gérée : les industriels et grands commerçants de la Zone Euro préfèrent investir à l’étranger pour produire, puis pour importer des biens et services au sein de la Zone Euro, au point que, à fin mars 2010, le montant estimé de leurs investissements à l’étranger représentait la modique somme de 4.319 MD€ pendant que les Etrangers avaient investi 3.469 MD€ sur le sol de notre zone monétaire. Autrement dit, la Zone Euro a créé de toutes pièces une évaporation de plus de 820 MD€ dans le domaine des investissements directs, une évaporation qui détruit des emplois et des revenus, et qui détériore la compétitivité de nos populations en les privant des moyens de se perfectionner et de progresser.

Cerise sur la gâteau : comme c’est toujours le cas en période de crise, les déficits de nos balances de biens et de services sont repassés légèrement en zone positive. Par contre, les déficits structurels s’alourdissent (balance des revenus et balances des transferts), et il faut les financer.

LE RISQUE GLOBAL ?

Au lieu de réduire les déficits structurels de la Zone Euro, la Banque Centrale Européenne les alimente ; c’est la raison pour laquelle nous avons publié « La gestion (désastreuse) de l’euro » (titre de notre deuxième livre, publié par ALTER-EUROPA en janvier 2008) et « Le Néolibéralisme? Un très vieux système… Pourquoi (faut-il) le combattre ? » (Publié en janvier 2007). Donc, deux livres écrits et publiés bien avant la crise des « prêts subprime »…

En effet, la BCE alimente la crise de plusieurs façons : d’abord, elle crée de la fausse monnaie à tour de bras ; elle permet à la Haute Finance de prendre des risques considérables sur les Marchés Financiers et à l’Etranger ; elle leur permet de délocaliser la gestion de ces risques dans les paradis fiscaux et de les camoufler dans des « véhicules » opaques (sociétés, trustees et fondations).

Elle devrait, au contraire, « forcer » ou « encourager » les Banques, les Groupes d’Assurances et les Fonds d’Investissement à accorder des crédits et des prêts au tissu commercial et industriel, et surtout aux PME-PMI, pour réaliser des investissements à moyen et long terme sur le « sol national ». De plus, ces crédits et ces prêts devraient être accordés à des taux bien inférieurs, sans fixer des plafonds tellement élevés (taux usuraires) que les retours sur investissement exigés sont devenus impossibles à atteindre. La BCE organise donc un « credit crunch », non pas seulement depuis deux ans mais depuis la « libéralisation » des marchés financiers dans le milieu des années 80.

En permettant aux banques et à toute la Haute Finance d’acquérir des titres étrangers risqués pour un peu moins de 10.000 milliards d’euros (investissements en portefeuille et autres investissements), elle maintient des rendements élevés, et elle encourage les « primes de risques sur obligations d’Etat» pour attirer des fonds en quête de rentes élevées pour près de 12.250 MD€ à fin mars 2010.

Le risque global est là : la BCE favorise une classe de rentiers, nationaux et internationaux, pour faire grossir les bilans de la Haute Finance eurolandaise, et pour faire concurrence au dollar.

Mais ce faisant, elle a conduit la Haute Finance européenne au dépôt de bilan généralisé ; elle a détruit le socle de toute l’Economie Réelle ; les populations sont marginalisées. Mieux, elle a maintenant conduit à un dérapage des finances publiques, jamais connu en temps de paix : des niveaux d'endettement (par rapport aux PIB correspondants) en hausse de +20% en deux ans !

En adoptant la politique de l’Euro Fort, la BCE continue à chercher des fonds à l’Etranger pour permettre à la Haute Finance européenne de camoufler ses pertes réelles, et pour recommencer ses jeux de tir aux pigeons, comme si rien ne s’était passé entre 2007 et 2008.

Elle encourage ses joueurs de casino à se "refaire une santé"… mais la tirelire du casino est vide : à part l’Allemagne et les Pays-Bas, les Etats sont au bord du gouffre, et leurs déficits extérieurs sont devenus ingérables.

Le risque global ? C’est l’implosion de la Zone Euro ! La hausse permanente des bilans des banques, la course aux fonds propres et les prédations perpétuelles pour leur permettre d’afficher des profits suffisants, tout cela n’est plus possible car c’est la Grande Dépression qui va finalement s’imposer…

Et là, chers amis de GDF-SUEZ, EDF, CARREFOUR, AUCHAN et tous les autres, vous regarderez la baisse de vos chiffres d’affaires et de vos profits avec angoisse, malgré vos augmentations et vos manipulations de toutes sortes… car il n’y aura bientôt plus de clients capables de vous acheter quoique ce soit… L’hyperinflation ? C’est fini !

Autrement dit, c’est l’impasse pour tout le monde et, donc, si les « grands pontes » de l’Economie Réelle veulent survivre, ils devront « passer à la table des négociations » pour inventer une Autre Europe et surtout une Autre Gestion de l’Euro. A leur disposition pour en parler vraiment… Le plus vite sera le mieux !

Merci de réagir,

JUNON Moneta

ALTER-EUROPA

Pour une Autre Europe…

Et (bien sûr) pour un Autre Euro…

Prochaine publication :

Partie VII : Comment réduire les Risques en cette fin de Régime?

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