karl eychenne (avatar)

karl eychenne

Bocal à mouches

Abonné·e de Mediapart

165 Billets

0 Édition

Billet de blog 6 juin 2023

karl eychenne (avatar)

karl eychenne

Bocal à mouches

Abonné·e de Mediapart

Le con invariant

Le con n’est pas toujours con, sauf à de rares exceptions. On a alors affaire à un con invariant, le même du début à la fin, ici ou là bas. En langage mathématique on dira qu’il est un con invariant par translation dans le temps ou dans l’espace.

karl eychenne (avatar)

karl eychenne

Bocal à mouches

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le con invariant n’a pas d’adresse ni de montre, il est con partout et tout le temps. Il est con en continu, sur tous les archipels, en télétravail ou en présentiel, hier, aujourd’hui, un con éternel. Insubmersible aux changements de contexte, il rivalise avec les lois les plus incorruptibles de la physique. Mettez le ici ou là, aujourd’hui ou demain, c’est ipse ou idem, comme dirait le philosophe du « je, c’est qui ?» (Paul Ricœur).

Le con invariant est invariablement con. Il est aussi con au point A qu’au point B, à l’instant “t” qu’à l’instant “t+1”. Invariant par symétrie de translation spatiale ou temporelle, mais aussi invariant par symétrie de rotation. En effet, le con peut se coucher sur le dos ou sur le ventre, de côté droit ou côté gauche, il reste le même con. Inutile d’espérer chez lui quelque brisure de symétrie oblitérant son invariance de con. Aucune chance de le prendre en flagrant délit d’intelligence. Il est inapte à la fulgurance. Même son mutisme lui donnera un air bête plutôt que réfléchi.

Mais le con invariant n’a pas que des défauts. Il est peut être l’être le plus authentique. Fidèle à lui même, un con qui dure, un con qui voyage bien, un con qui y croit, un con convaincu. Alors certes, le subtil, le rigoureux, le juste, n’a aucune prise sur le con invariant. Jamais. Certes, il ne peut être éclairé de nulle part, car il est réfractaire à la lumière : ce con est spéculaire. Mais le con invariant n’est pas obtus pour autant. Il peut très bien changer d’avis. Mais il restera con. C’est tout à fait possible, il suffit juste qu’il change d’avis, mais jamais du bon.

Mais je parle, je parle. Le con invariant existe t’il vraiment ?

Avant j’avais quelques doutes. Je disais comme tout le monde : « je ne crois que ce que je vois ». Des cons oui, mais des cons invariants ca paraissait bizarre. Des cons j’en ai croisé, beaucoup, parfois même il m’a semblé me voir, au hasard d’une parole débile qui m’aurait échappée, un geste inconvenant que je n’aurai pas retenu, un mauvais choix, un mauvais non - choix. Le con ne semblait pas si rare donc, mais de là à croiser un con invariant. Était – il possible qu’un tel con exista ? Je ne sais toujours pas. Mais j’y crois désormais !… Car j’ai été saisi par la foi.

Je crois aux cons invariants. J’y crois tellement que j’en vois partout. Qui sont – ils ? J’ai pas tous les noms. Mais la liste complète des cons invariants existe. Elle existe forcément quelque part. Le grand horloger ne peut quand même pas avoir pris le risque d’avoir fait autant de cons invariants sans en avoir fait l’inventaire au préalable. A moins qu’il soit aussi con que le con invariant, un con à son image donc ? Possible. Cette idée d’un dieu raté n’est pas une idée conne. Elle a même donné lieu à quelque ovni littéraire (Emil Cioran) ou cinématographique (le tout nouveau testament de Jaco van Dormael).

Soyons audacieux. Une thèse très alternative pourrait soutenir que nous sommes tous des cons invariants, mais en puissance. Des cons invariants dormants, pas déclarés, en situation irrégulière en quelque sorte. Nous aurions migré en zone dite intelligente sans avoir les papiers. Pas vu, pas pris. Après tout pourquoi pas. Nous sommes bien tous des super criminels en puissance parait - il, pourquoi ne serions tous pas aussi des super cons en puissance ?  

Pas si grave après tout. On se consolera alors en se disant qu’on est pas tout seul. Je suis peut être un con invariant qui s’ignore, mais nous sommes tous des ignorants. Certains sont probablement plus « doués » que d’autres, ce qui tend alors à produire un effet loupe exacerbant l’invariance du con premium, et nous rendre nous moins cons. Mais bon.

A moins que…

Il y aurait bien une autre thèse. Pas alternative, mais presque complotiste. Se pourrait – il que le con invariant soit moins con qu’il n’y parait ? Et si tout cela n’était qu’une farce destinée à nous mettre à l’épreuve. Jusqu’à nous faire plier. Jusqu’à nous faire croire que finalement, la connerie invariante serait le bon tempo, le credo divin, le « la ». Le con invariant serait LE pékin moyen, doté du QI médian, l’étendard du gars lambda.

Peut – être même le con invariant a-t-il un projet ? Après tout, comment comprendre qu’autant de cons invariants aient pu échapper à la sélection naturelle. Seul un intelligent design semble à même de justifier l’existence d’autant de cons invariants. Il se pourrait donc bien que le con invariant cache bien son jeu.

« Cela ne l'inquiète pas que ses idées ne soient pas vraies, il les utilise comme des tranchées pour la défense de son existence, comme des épouvantails pour effrayer la réalité. », Jose Ortega y Gasset

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.