Face à l’enfant terrible de la maison blanche, nous voilà pris d’hystérie collective. Que faire sinon se frotter les yeux, réécouter la bande sonore, et se mettre en PLS géopolitique. À moins que l’on ne s’agite de trop ? Peut - être Donald n’est-il pas cet affreux jojo ? Ni père Ubu ni docteur Folamour. Juste une hyperbole récréative. Nous aurions tort de nous en faire. Il ne s’agit que d’une fausse alerte. Le test annoncerait une maladie grave, mais il ne s’agirait que d’un rhume. Trump serait ce que l’on appelle un faux – positif. Un double terme devenu populaire durant la crise Covid, lorsque des bien – portants furent parfois déclarés malades après s’être fourré une tige dans le pif.
Le meilleur argument pour défendre la thèse du Tump faux – positif est celui de la princesse au petit pois. Donald dans la peau du légume vert, l’Europe en princesse douillette. Cette dernière exagérant la douleur, voire accusant un mal imaginaire. Nous aurions développé comme une espèce de Romantisme français décuplant nos sens, chakras en feu, et surtout une aversion à la moindre contrariété. La faute aux vertus dormitives de l’opium américain, des années durant. Parapluie au combien efficace mais confinant à une suave bonhomie. Car c’est la maladie des biens portants que de se plaindre des petits tracas quand ils sont privés de grands maux. Inévitablement, nous nous fûmes alors investis d’une exigence d’apaisement, de confort surérogatoire qui ne manquerait pas de déchanter dès les premières secousses.
Ces éléments plaideraient donc pour la thèse du Trump faux - positif. Donald serait une fausse alerte. Circulez, il n’y a rien à voir. Nous ferions preuve d’une sensibilité vraiment trop exubérante. Pourquoi pas. Nous nous ferions du soucis, de trop. Peut être. Mais nous ne sommes pas les seuls.
L’IA et l’Europe, même combat
Il existe un soutien de taille en faveur d’une sensibilité à fleur de peau. L’IA. Elle aussi peut-être flouée par la fausse alerte, mais elle assume. Et pour cause, sa formidable efficacité repose sur son extraordinaire capacité à trouver des correspondances, des corrélations entre des milliards de faits. Et lorsqu’elle n’en trouve pas, et bien elle en trouve quand même, au risque d’être fallacieuses. Ce sont des faux positifs. Ainsi, ce qui fait la force première de l’IA en fait aussi son principal défaut. « La plaie et le couteau » nous résume Baudelaire. Si elle veut détecter la moindre corrélation, elle doit se montrer aussi sensible que la princesse à petits pois. Tout comme le système d’alarme qui détectera tous les mouvements suspects, au risque d’accuser le chat. C’est le prix à payer. Parfois il y aura de la fumée sans feu.
Pourceau ou Parrhésiaste ?
Quand même, peut - être nous faut - il aussi tempérer la critique. Donald n’est pas seul contre tous. Si pour certains la fin du monde a le teint orange, pour d’autres le messie a une énorme mèche blonde. Pourceau pour les uns, Parrhésiaste pour les autres. Débile ou habile. Le monde est clivé, ainsi va le monde. Peut être Donald n’est -il qu’ornement inutile, bouc émissaire fat. Il faut imaginer deux parties tirant en sens inverse la corde qui les relie, nul besoin de nœud de papillon alpin il pour les raccorder. Donald serait juste là pour la déco ? On a quand même du mal à avaler cette thèse. Trump est à coup sûr le stigmate d’un mal bien profond, mais aussi potentiellement le symptôme d’un mal plus grand encore à venir. Un entre deux. Une interface entre un passé amer et un futur aigri.
Trump est-il un faux positif ? Finalement on s'en balec. Principe de précaution. Nous adoptons la posture du Chatbot. Nous préférons donner une mauvaise réponse plutôt que pas de réponse du tout. Et tant pis si le suspect n'est qu'un faux - positif, si le malade est bien - portant, si le voleur n'est qu'un chat. Tant pis si l'on s'inquiète de trop. Le catastrophisme éclairé (JP Dupuy) n'est jamais une stratégie superfétatoire.
Moi, souvent, je n'en dormais pas
Tandis qu'eux ronflaient sans tracas
Brant