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Billet de blog 24 mars 2025

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J'ai envie d'un burger

Assis sur mon canapé, les yeux bouffis par l’ennui, l’envie me prend soudain. J’ai envie d’un burger. Un énorme burger. Mais j’ai un problème. L’arrière - goût.

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Le goût du burger n’a pas le même goût que l’arrière - goût du burger. Ce que je dis a l’air d’une ânerie. Mais c’est une réalité. C’est devenu une réalité je devrais dire. Il m’est devenu impossible de manger un burger sans penser au goût d’après. Avant j’y arrivais sans problème. Je gobais la bête en songe – creux. Mais désormais je ne peux pas m’empêcher d’ouvrir le bec sans penser l’arrière - goût. Le contenant se méfie du contenu. Le burger n’est plus le burger qu’il était.

Comment expliquer ce relent relou ? Pourquoi l’arrière - goût ? Ce truc qui vient après le goût, mais que l’on redoute avant le goût. La métaphore alimentaire est naturellement convoquée. Mais la bouffe n’est pas la seule à produire de l’arrière - goût. La vie a un arrière -goût de mort par exemple. Un peu tranché comme illustration, mais qui osera dire que c’est faux ? Le vivant ne se goûte pas sans amertume. Sauf que jusqu’à présent, le burger ne jouait pas dans cette catégorie.

Car il y a deux catégories pour classer les choses ou les idées, ou les burgers. La catégorie des sens et celle de la raison. Le burger appartenait à la première catégorie, car le goût produit le délire des sens. Désormais le burger appartient à la seconde catégorie, car l’arrière -goût produit le trouble de la raison. Le goût s’est fait grillé par l’arrière -goût.  Ce n’est pas ce qui était prévu. L’envie de burger est contrariée avant même que d’être satisfaite.

Pas normal cette affaire. Pourtant, le burger n’est qu’un assemblage plus ou moins savant de bidoche, légumes, et mayo. Rien de plus. Et tout ça suffit à le rendre désirable. Car s’il est désiré, c’est bien qu’il est désirable (?) Je ne peux pas mentir sur l’envie. Je ne la contrôle pas. On ne peut pas ne pas avoir envie d’avoir envie. Un peu compliqué dit comme ça. Mais quiconque a déjà eu envie de iech voit très bien de quoi je veux parler. On ne peut pas feindre le cul serré bien longtemps. Je ne peux pas mentir sur mon envie de burger. Mes sens ne me croiraient pas.

Mais cette envie de burger se heurte à quelque chose qui la dépasse. Cette envie n’est plus satisfaisable. Cette envie est devenue contradictoire. Le burger n’est plus un burger ? Si bien sûr. Sinon, ce serait contradictoire dans les termes. Je peux dire des âneries, mais au moins qu’elles soient cohérentes. Le truc c’est que le burger n’est plus simplement un burger. Il s’est enrichi d’un statut qui l’oblige, celui du signe. La faute au cours des évènements, qui dégoulinent sur le burger comme une mauvaise mayo.

Le burger est devenu une icone, un indice, un symbole, d’une Amérique amère. Une icone de l’Amérique au sens où le burger ressemble finalement à celle qu’il dénote. Le burger est exubérant, excessif, surdimensionné, un poil ridicule donc. Le burger est aussi un indice de l’Amérique, au sens où il en est son prolongement physique, une partie d’elle colonisant déjà nos estomacs avant que de vampiriser nos valeurs. Enfin, le burger est le symbole de l’Amérique. C’est-à-dire tout ce qui fait penser à l’Amérique, sans être ni icone ni indice. Quand je vois un burger, mon cerveau produit automatiquement l’image d’une Amérique amère, d’où l’arrière - gout suggéré. Tiens j’ai soif maintenant.

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