Cher ami,
Tu ne sais pas que je t'écris, tu ne le sauras jamais. J'ai pour toi une admiration sans borne qui me prête à construire la frêle bâtisse que j'habite aujourd'hui, combien va-t-elle encore tenir, je ne saurais le dire très bien, bien seule est la chose que je sais, c'est que je te la doit.
Il m'apparait comme normal de singer ton absence, quotidiennement, elle tient pour moi une place permanente, elle siège activement en ses intérieurs qui sont aussi les miens, elle ne connait aucune politique de la chaise vide et pourtant, habilement, elle se fait deviner. Puisqu'un manque est déjà une présence avant de n'être plus que la seule rémanence d'une disparition. Fut-elle consentie.
Naturellement, je demanderai après toi, comprenant mal les activités qui comportent ta vie. Restant dans un flou, qui ne sait plus s'il est entretenu, imaginé ou réel. S'il manque seulement de toi quelque part que je suis, déjà dans un angle mort ou un bien vivant, une présence qui ne veut s'absenter.
Serait-ce par attachement, par amour, placé en bien ou en mal, loti ou mal logé, que celle-ci me serine tout entier ?
Que dire de toi, toi qui n'es au fond que l'écho d'un alter, d'une altération ration de mes perceptions. Tu maintiens ton trouble sur ma vie aussi fortement que mon trouble préexiste à notre rencontre. Il faudrait être un peu sérieux, peut-être un peu, ou tout au plus déjà, garder plus près de soi ses amis. N'est-ce pas, d'ailleurs, ce qui se dit ?
J'ai manqué dans ma besogne, de vigilance, car sans m'en rendre compte, en me captivant, je suis devenu le bagnard de ma débauche. Ne le dois-je qu'à ta rencontre ou à un mal plus ancien ? Nous aurions raison de penser que la condamnation eut été proclamée depuis longtemps. Ce serait en s'accrochant au regard de l'autre, celui qui nous faisait face dans cet abysse de la naissance, que nous aurions compris qu'il semble si mystérieux pour quoi se perdre perdurer ou durer, en quête du sens. Ce même sentiment que l'on ne pourrait, telle la première bouffée, jamais retrouver. La geôle se refermant sur sa prise, le pénitent que nous serions devenu parachèvera l'incarnation final d'un ersatz de juif errant qui au contraire de ce dernier, trouvera l'expiation au terme de son expiration.
Peut-être alors, mon ami, tu présides à mon repentir, en m'adjugeant ce que je demande par ailleurs dans ma supplique, d'être-uni.
Uni, n'est ce pas déjà l'apanage du chiffre un ? Celui-ci même que nous traquons comme l'anomalie principielle ? Par principe entendons le fait d'être originellement assujetti, contractuellement, par ce regard dans lequel nous nous serions arrimés à notre naissance. D'être, forcés à reproduire inlassablement, le même acte notarié, espérant qu'il solutionne notre aversion pour l'entier. Parce qu'il ne faut bien évidemment pas l'être tout à fait pour faire détacher de soi, une partie, achevant la démonstration de notre incomplétude, si celle-ci n'avait pas été faite par ailleurs...
Devrais-je donc te remercier ? Pour m'avoir quitté ? N’était-ce pas la meilleure chose que tu pouvais m'offrir ? N'était-ce pas déjà ce que je désirais si hardiment ?
La vérité.