Lettre à Nâzim Hikmet sur la bonté ( suite )
Charles Dobzynski
4
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On a pesé le bleu du ciel et la couleur
artérielle des plantes
tout ce qui vit sur terre
tout ce qui chante
on en connaît le critère.
Mais la bonté ?
qui l'a mesurée ?
qui l'a comptée
qui est remonté
jusqu'aux sources de ce Nil du coeur ?
qui peut deviner la teneur
en bonté
d'un regard ou d'un geste ?
qui peut capter
sa chaleur sa douceur
comme la clarté d'une autre planète ?
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Au vrai la bonté
parfois
dans la rue
dans la ville
dans les endroits
les plus imprévus
m'est apparue.
J'ai vu des hommes
s'ouvrir plus vastes
que des ports
quand la bonté
montait à marée haute.
J'ai vu des femmes
fondre comme des neiges
quand le soleil de la bonté les traversait.
J'ai vu des enfants
monter aux mâts des lunes rousses
pareils aux mousses
empêtrés dans les cordages des étoiles
quand la bonté brûlait en eux les éteules du ciel.
J'ai vu la bonté
plante grimpante
qui se fixait
à des paroles
à des sourires.
J'ai vu la bonté
mère des rayons X
rendre les corps transparents
et toute vie dès lors devenait lisible ...............
La bonté c'était
un abécédaire
une fraîcheur venue de l'enfance
des mots oubliés comme des semences
dans la matière grise de la terre.
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6
Mais la bonté
pareille aux pierres rares
se pèse en carats
et dans les yeux des poètes
elle ressemble à de l'eau lourde.
Nazim Hikmet
j'ai découvert dans tes regards et dans ta voix
la qualité la plus parfaite
de la bonté
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