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Billet de blog 3 février 2022

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Se radicaliser, un impératif et une question d'honneur

Si le terme "radicalisé" a si mauvaise presse, c'est parce que la presse est très mauvaise et reprend sans recul la rhétorique des puissants qui veulent annihiler toute révolte. Mélangez djihadistes, fachos et anarchistes, touillez le tout, et vous obtiendrez le bon vieux cocktail qui fait peur. Puis dès que quelqu'un bouge, peignez de cette mixture ses actes et enfermez-le. Le tour est joué.

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Alors oui, tous les sus-cités sont des radicalisés d'une manière ou d'une autre. Mais si tous les radicalisés ne se valent certainement pas, il me semble évident que pour prétendre en être un et mériter le respect, faut-il encore se révolter contre soi, en premier lieu.
Le bourgeois radicalisé ne vaut rien par exemple. Il est de ceux qui vont jeter quelques cailloux sur l'accueil des migrants, ou sur leurs tentes, en se voyant en héros de son clan, celui qui défend le droit de s'empiffrer sans être dérangé.
Le facho, c'est le radicalisé qui haït la vie et tous les autres, surtout tous ceux qui ne sont pas ses esclaves.
Le radicalisé macroniste est un bourgeois ou un facho qui n'ose pas se l'avouer, mais dont la haine tenace contre les pauvres qui mettent en danger sa vie confortable le rend enragé.
Le radicalisé "gamer" qui a pris sa carte chez LFI est un ignare qui se croit instruit parce qu'il a appris l'histoire de l'Egypte dans Assassin's Creed. Il a son pendant chez les fachos qui est plutôt fana des jeux où il peut faire le nazi.
Tous ces gens se révoltent par misère de l'âme, parce qu'ils sentent qu'on va en découdre et qu'il risquent certainement de perdre la vie de merde qu'ils ont, mais qu'ils chérissent parce qu'ils n'ont jamais su en imaginer une autre.
Et puis il y a le poète, le fou qui se révolte parce qu'il ne supporte pas l'idée que le monde soit anéanti par des cons. La liste des raisons de devenir fou est longue, très longue.


Sixième extinction. "On" nous enlève le droit de vivre en paix avec le vivant, de s'émerveiller en entendant les oiseaux chanter, d'espérer un jour voir un loup en liberté, ou même un renard, d'entendre le bourdonnement incessant des insectes (si, si, cela a vraiment existé et je l'ai vécu, ce bourdonnement que j'entendais du deuxième étage d'un équivalent HLM de Bucarest sous le communisme, c'est pour dire).
Respirer le plastique, boire le plastique, manger le plastique. Il y a maintenant du plastique jusque dans les nuages qui le déposent ensuite aux sommets des montagnes. L'océan en est bourré, l'eau qu'on boit aussi.
Vivre sur cette Terre après la disparition de toutes les forêts primaires. Bientôt, au rythme actuel, il ne restera plus de forêt primaire, ou alors de pauvres parcs naturels qu'on gardera pour se déclarer écolos.
Vivre dans la fureur et le bruit permanent. Avec l'avènement de l'"énergie propre" (les débiles qui utilisent ce terme méritent la prison rien que pour ça), le bruit vient s'installer partout, jusque dans les forêts de montagne où on rase pour installer des moulins à vent pour que les gamers puissent continuer à faire du e-sport.
Laisser des saletés innommables enterrées pour les générations futures (s'il devait y en avoir beaucoup) pour pouvoir faire tourner les centrales nucléaires qui risquent de toute manière de nous exploser à la gueule de temps en temps. Tout ça pour que le spectacle ne s'arrête jamais, pour que le quidam puisse regarder sa série Netflix préférée et enrichir ainsi un milliardaire à l'autre bout du monde, milliardaire qui, par ailleurs, le considère comme un débile.
Supporter que les riches aient tous les droits que les pauvres n'ont plus, sous prétexte qu'ils ont gagné au loto de la vie et que de temps en temps ils jettent une carotte aux mendiants que nous sommes.
Tolérer qu'un connard de suprémaciste blanc, accessoirement personne la plus riche du monde, nous bousille le ciel avec des milliers de satellites qu'on verra à la place des étoiles. Laisser son concurrent au titre du plus grand enfoiré investir sa fortune dans la recherche de l'immortalité, rien que ça.
Vivre dans l'enfer d'un climat détraqué.
Se faire insulter en acceptant de gober les idioties comme la croissance verte, l'aviation décarbonée, l'agriculture 4.0...
Accepter que l'homme triture la génétique du vivant sous prétexte qu'il est Dieu, puisqu'on a tué Dieu. Nous étions trop intelligents pour croire à ses bêtises, donc nous en avons fabriqué les nôtres.
Accepter que des ingénieurs pas plus sages que les ados qui essaient de fabriquer des bombes triturent le climat avec la géo-ingénierie, parce que bon, la science nous sauvera.


Je m'arrête reprendre mon souffle et me calmer. Vous êtes tranquille vous ? Vous comptez reprendre vos activités habituelles ?
Si ce n'est pas le cas, alors dites-vous bien que vous êtes le "on" et qu'avant de se révolter, de se radicaliser donc, il faut d'abord sortir du "on" et changer de vie. Autant que chacun le peut. Il est plus dur pour la femme de ménage de faire quoi que ce soit. Elle n'est déjà pas celle qui pèse le plus dans la balance. Mais si vous êtes de ceux qui ont la chance d'être plus haut dans l'échelle malsaine de cette société, avant d'ouvrir la bouche pour critiquer, prenez d'abord la peine de faire un effort, de vous mettre dans l'inconfort et de remettre en cause votre propre part à ce massacre. Une fois que vous êtes sûr d'avoir fait de votre mieux, passez à l'étape suivante.
Ne prenez pas votre carte dans un parti quelconque. Même très naïf, vous observez bien que la politique est une affaire de compromis, déjà pour avoir le pouvoir ou une partie de celui-ci. Puis, de toute manière, une fois qu'on en a un peu, on devient un salaud comme les autres en oubliant très vite ce pourquoi on avait décidé de se battre.
Soyez ambitieux et imaginatif. Saboter le système. Il importe peu quelle en sera la conséquence. Si Dieu existait il vous dirait que cela ne sera jamais pire. Oui, j'ai très peur du chaos et j'en pleure même à l'idée que mes enfants en soient concernés. Mais dites vous bien qu'avec ou sans vos actes, le chaos s'en vient. Faites donc cela par honneur.
Et on en arrive à la question de l'honneur. L'honneur a cela de particulier que moins on en a, plus on en parle. Je vais donc essayer d'être bref. La Vie vous a fait l'honneur de vous faire naître. Le Temps vous a fait l'honneur de vous proposer quelques instants sur cette Terre. Faites honneur aux deux et faites-en bon usage en vous battant contre votre propre bêtise, puis contre celle des autres. Il ne s'agit pas d'espérer changer le destin du monde, mais de faire ce qui est juste. Ainsi il est juste d'essayer de stopper la destruction et, la violence qu'on vous fait ne doit pas rester sans réponse.


Radicalisez-vous !

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