Personne ne défendant qu'une seule liberté qui est celle d'acheter et de vendre. Ainsi, les commerçants, à quelques rares exceptions historiques près, ont-ils toujours toléré et même défendu tous les régimes, mêmes les plus liberticides, au nom de l'ordre nécessaire à leur petit commerce. Sans morale, sans autre guide que le chiffre d'affaire en fin de journée, ils n'ont jamais hésité à cracher sur toutes les grandes causes au nom du sempiternel "je travaille dur, les autres sont des feignasses qui veulent voler le fruit de mon labeur", alors que le métier de commerçant est devenu avant tout celui d'un petit financier ne servant à rien d'autre qu'à la chaîne logistique du capitalisme mourant.
Le bon commerçant ne sait rien faire de ses mains, mais a de bonnes notions de comptabilité, n'hésite pas à mentir à son client tant que celui-ci est assez bête pour ne pas s'en rendre compte et promeut sans honte la destruction de la solidarité et du bien commun tant qu'il y a encore des acheteurs pour sa marchandise. Il se croit essentiel aux rouages de la société, ainsi qu'à sa stabilité, mais n'hésiterait pas à sauter dans le train d'une petite révolution bourgeoise si on lui enlève suffisamment de son revenu. Il adore la police, mais la critique vertement chaque fois que sa boutique se prend un graffiti, en prétendant sans vergogne que les impôts qu'il paye sont utilisés pour nourrir les vaut-riens qui l'ont tagué.
D'ailleurs, ce qui caractérise le bon commerçant c'est bien ça: il n'a honte de rien. C'est bien à cela et strictement à cela qu'on le reconnait.