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Billet de blog 7 mars 2017

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Réponse du CIRC au Dr Marcel Rufo sur la légalisation du cannabis

Après le Dr Michel Cymès, c'est au tour d'un autre médiatique docteur, le pédopsychiatre Marcel Rufo, de s'exprimer malheureusement sur la légalisation du cannabis. Le CIRC ne pouvait que réagir.

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Illustration 1
Dr Marcel Rufo

Cher monsieur Rufo,
À l’instar de votre collègue, le sémillant Dr Cymès, vous vous êtes à votre tour prononcé contre une légalisation du cannabis, en évoquant quelques études anxiogènes dénonçant les dangers que représenterait l’usage de cette plante chez les adolescents. Ce serait donc au nom de la protection de ces derniers que vous justifieriez le maintien d’un dispositif répressif qui, depuis plus de 40 ans maintenant, n’en finit pas de démontrer son inefficacité.
Nous vous rappelons, comme nous le fîmes avec M. Cymès, que ce que nous connaissons de la situation actuelle intervient dans le cadre d’une prohibition totale, comme par exemple l’inquiétante augmentation de l’usage chez les jeunes dont la France détient le record.
Bien que cannabinophiles et membres d’une association – le CIRC – militant depuis plus d’un quart de siècle pour que notre liberté soit enfin reconnu et que l’on accorde au cannabis la place qui lui revient, celle d’une substance appréciée par des millions d’individus dont la pratique ne pose guère de soucis si ce n’est quand ils se voient confrontés aux affres de la répression, il se trouve que nous sommes également pour certain(e)s d’entre nous parents. À ce titre, nous sommes donc confrontés aux mêmes inquiétudes que vous signalez sans pour autant verser dans le même discours anxiogène. De par notre expérience d’usagers, nous avons en effet l’avantage de connaître le produit et de pouvoir ainsi en partager notre connaissance avec nos enfants. En parler librement, sans tabou, avant même qu’ils ne le rencontre. Une liberté que le système prohibitionniste interdit aux parents néophytes bénéficiant le plus souvent des allégations des autorités politiques et médicales relayées par certains médias. Il est en effet difficile d’évoquer le cannabis sous un autre angle que celui du sanitaire et de l’usage problématique qui ne concerne pourtant pas plus de 10 % des cas ce qui, vous l’avouerez, ne justifie en rien qu’on emmerde les autres 90 %. C’est pourtant ce qui se produit, avec toutes les conséquences désastreuses que cela induit.
Parlons justement de ces conséquences. En tant que parents donc, ce qui nous inquiète particulièrement, ça n’est pas tant la rencontre de nos enfants avec le cannabis que celle qu’ils sont amenés à faire avec des réseaux peu fréquentables, pour se le procurer. C’est aussi et peut-être surtout celle avec les autorités qui nous angoisse. Quand de zélés policiers sont amenés par leur hiérarchie, à les harceler quotidiennement sous prétexte de lutter contre les stupéfiants. Quand ces mêmes agents leur saisissent leur shit ou leur herbe – pour se le réserver parfois –, ou les conduisent en garde à vue, nous obligeant à venir les récupérer, avec tout ce que cela comporte d’humiliation pour nous, mais aussi et surtout pour eux. Et nous ne vous parlerons pas des autres violences qui peuvent se produire à leur encontre tout particulièrement si nous faisons parti de ces « minorités visibles » issues des quartiers populaires… Et oui, ces fouilles agressives qui dégénérent ont très souvent pour origine la recherche de stupéfiants et principalement du cannabis.
Cette stigmatisation participe largement à la défiance que nous observons de notre jeunesse vis à vis de l’autorité. L’injustice ressentie atteint des sommets et l’absence de formation des policiers, la pression qu’ils subissent aussi, se manifestent par une violence bien plus grave encore parce que couverte par un fort sentiment d’impunité.
Il n’y aurait pas de paix sans justice dit-on ? Il n’y aura pas de paix tant que ne sera pas abolie cette absurde loi du 31 décembre 1970. Tant qu’on ne régulera pas la filière récréative et thérapeutique du chanvre. Sans cette nécessaire révolution législative, les différents commerciaux la plupart du temps provoqués par de regrettables interventions policières, se poursuivront dans les rues, à coup d’armes lourdes, plutôt que devant des tribunaux de commerce ou des Prudhommes.
À ceci faut-il ajouter les affaires de corruption de nos institutions ? Comme celle impliquant l’ex-patron de l’OCRTIS (Office centrale de répression du trafic de stupéfiants) dont le service aurait importé illégalement une quarantaine de tonnes de résine de cannabis ces 10 dernières années, pour satisfaire de hauts responsables politiques toujours promptes à parader devant des « saisies records ». Ou cette autre pour laquelle 10 personnes dont des policiers de la brigade des stupéfiants de Paris, se retrouvent devant un tribunal pour avoir subtilisé une cinquantaine de kilos de cocaïne ?
Vous voyez docteur, que sous prétexte de défendre la santé des adolescent(e)s, vous soutenez en fait un système pourri produisant l’exact effet contraire de ce que vous souhaitez. N’est-il pas dès lors temps de réfléchir à autre chose ?
Les politiques de prévention que vous appelez de vos vœux ne peuvent définitivement pas être menées dans un cadre aussi répressif. La violence du Droit à l’égard des usagers interdit aux plus fragiles d’entre eux d’oser approcher les services sanitaires susceptibles de les aider. Ce sont les professionnel(le)s de la réduction des risques qui le disent.  C’est bien la prohibition qui entrave leur action.
Les thèses antiprohibitionnistes que nous soutenons reposent sur un constat d’échec flagrant. Celles des partisans du statu-quo sur des projections hasardeuses, des allégations que les expériences de régulation récemment menées outre-Atlantique viennent désormais contredire. La folie que vous dénoncez est justement de s’obstiner dans cette voie. De ne pas réfléchir à l’alternative que constitue la légalisation.
Il est temps pour cela de rassembler tous les acteurs de la RDR, les associations d’usagers et les organisations progressistes, bref la société civile, afin de mettre un terme à ce qui constitue l’un des plus épouvantables fiasco du Droit international : LA PROHIBITION.
Merci pour votre attention.

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