Les révélations de Forbidden Stories avec l’aide d’Amnesty International ont mis en cause l’utilisation par le Maroc du logiciel espion Pegasus (voir notre dossier). Défendu par Me Olivier Baratelli, le royaume du Maroc a poursuivi en diffamation plusieurs médias qui en ont fait état, dont Mediapart, qui fut visé par cet espionnage via les téléphones de Lénaïg Bredoux et d’Edwy Plenel.
Dans un jugement prononcé le 25 mars 2022, la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris a déclaré irrecevable cette plainte. Destinée à alimenter un contre-feu médiatique, elle méconnaissait l’une des règles les plus élémentaires du droit de la presse en France qui interdit à un État de poursuivre en diffamation. Mediapart était défendu par Mes François de Cambiaire et Emmanuel Tordjman.
« En droit interne comme au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, énonce le jugement, la liberté d’expression est une liberté fondamentale qui garantit le respect des autres droits et libertés, et les atteintes portées à son exercice doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi. L’article 32, alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne permet pas à un État, qui ne peut pas être assimilé à un particulier au sens de ce texte, d’engager une poursuite en diffamation.
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« Dans la mesure où le royaume du Maroc ne saurait être assimilé à un particulier, il ne pouvait valablement engager une poursuite en diffamation contre Edwy Plenel et la société Mediapart du fait de la publication de l’article intitulé “Projet Pegasus : Mediapart a été espionné par le Maroc”. Son action doit donc être déclarée irrecevable, sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs soulevés en défense. »