La direction du Front national refuse l’entrée de sa «convention présidentielle» les 18 et 19 février à Lille aux journalistes de Mediapart et, par ailleurs, refuse que nous rencontrions les militants qui organisent cette convention. Il en sera de même à l’avenir, nous a-t-il été précisé. «Je prendrai grand soin à vérifier que vous ne pourrez pas rentrer dans la convention, j’en fais une affaire personnelle», a insisté Steve Briois, secrétaire général du FN.
Pourquoi cet oukase? Deux arguments transparaissent dans ses propos, ainsi que dans ceux de Bruno Bilde, directeur de cabinet de Marine Le Pen: d’une part, Mediapart a décidé de ne pas inviter la candidate frontiste dans le cadre de ses entretiens-vidéos organisés avec certains des candidats à l’élection présidentielle ; d’autre part, Mediapart a publié un contre-argumentaire visant à déconstruire le programme présidentiel du FN. L’une et l’autre de ces affirmations sont vraies. «Puisque c’est comme ça, nous choisissons nos médias et nos journalistes, oui, et nous ne voulons pas travailler avec vous», «On vous applique la réciprocité», soutiennent les responsables du FN.
Mais cette position, qui revient à nous interdire l’accès à l’information, est purement et simplement contraire à la liberté de la presse. Aussi nous paraît-il urgent de rappeler qu’il fait partie de notre métier de journalistes d’assumer des engagements éditoriaux et les modes de traitements afférents. De la même manière, il est incompréhensible qu’un parti politique choisisse les journalistes qui rendent compte de son activité, sauf à porter atteinte au débat démocratique. Déni du droit d’informer pour les journalistes qu’il refuse, cette décision est par conséquent une insulte pour les journalistes autorisés qui apparaissent complaisants.
Il est enfin paradoxal qu’un parti qui se dit boycotté par les médias (et par Mediapart) refuse à un média la possibilité de couvrir ses événements. Cette affaire ne peut rester, selon nous, un simple conflit entre Mediapart et le FN.
Paris, jeudi 16 février
La Société des journalistes de Mediapart