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Billet de blog 28 septembre 2025

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Jugement Sarkozy : la piteuse diversion contre Mediapart

Depuis l’annonce de la condamnation à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt différé de Nicolas Sarkozy, l’ancien président de la République et ce qu’il lui reste de proches multiplient les attaques contre notre journal, à l’origine des premières révélations dans cette affaire. Mise au point de la direction éditoriale.

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Quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt : la tactique est éprouvée et Nicolas Sarkozy en est familier. Depuis jeudi 25 septembre, l’ancien président de la République multiplie les attaques contre Mediapart pour tenter de faire oublier sa condamnation, lourde, à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt différé, et aux motivations du tribunal évoquant une affaire d’une « exceptionnelle gravité ».

Dès sa sortie de la salle d’audience, quelques minutes à peine après que la présidente du tribunal eut fini de lire le long jugement qu’elle venait de prononcer, le récidiviste Sarkozy s’est planté devant les caméras pour s’en prendre aux juges – évidemment – et à Mediapart – encore une fois.

Il a récidivé dimanche dans Le Journal du dimanche, qui a complaisamment posé trois questions (oui trois !) sur Mediapart à un ancien chef de l’État dont la condamnation est historique… Tout y passe : « militantisme […] bien connu »« pratiques régulières » visant à utiliser le « mensonge » à des « fins partisanes ».

Nicolas Sarkozy déteste Mediapart. Ce n’est pas un scoop et après tout, c’est son droit. Depuis qu’il est devenu président, nous avons documenté ses liens privilégiés avec des milliardaires (le journal qui lui offre complaisamment ses colonnes aujourd’hui appartient à Vincent Bolloré, qui lui prêtait déjà son yacht la première semaine de son mandat), sa grande proximité avec certains médias (souvenez-vous la fausse rétractation de Ziad Takieddine), ses relations étroites avec des États étrangers (le Qatar, la Russie, la Libye…), les multiples faits qui lui valent d'être inquiété par la justice, et déjà plusieurs fois condamné

Pour se défendre, Nicolas Sarkozy a souvent raconté n’importe quoi. C’est également son droit. Sauf qu’il trouve un écho inédit depuis jeudi sur un élément bien précis : « Le document publié par Mediapart est un faux »

Nicolas Sarkozy évoque ainsi la fameuse note révélée par Fabrice Arfi et Karl Laske dans notre journal en 2012, évoquant la promesse d’un financement libyen pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy de 2012.

Dans son jugement, le tribunal a expliqué, au détour de sa démonstration judiciaire, que cette note était « probablement un faux ». Depuis, le « probablement » a disparu et la confusion règne. Il est pourtant impossible de dire cela, en droit comme en fait (lire toutes nos explications).

En droit, car la justice a dit à trois reprises, et définitivement jusque devant la Cour de cassation, que le document n’était ni un faux intellectuel ni un faux matériel. Aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause cette décision n’est apparu depuis.

En fait, car cette note a permis de révéler un élément majeur du dossier, la rencontre secrète entre un lieutenant de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux (condamné à deux ans de prison ferme dans ce dossier), et un terroriste libyen, Abdallah Senoussi.

Nicolas Sarkozy (tout comme Brice Hortefeux) a même été contraint de verser à Mediapart un chèque à la hauteur des frais de justice que nous avions dû engager pour nous défendre de cette calomnie.

Illustration 1
Les chèques que Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux ont dû verser à Mediapart par décision de justice.

Mais qu’importe : Nicolas Sarkozy tente par tous les moyens de faire diversion, et une partie de la classe politique et médiatique s’engouffre dans la brèche.

Nous ne sommes pas dupes : toute cette agitation vise à faire oublier l’essentiel (les dix leçons du jugement sont à lire ici). Jamais un président français n’avait été condamné pour des faits aussi graves. Jamais un président français sous la Ve République n’avait été incarcéré – Nicolas Sarkozy le sera dans les prochaines semaines. Jamais un président n’avait été condamné pour avoir négocié avec un terroriste libyen recherché par la France un pacte de corruption dans la perspective du financement occulte de la campagne présidentielle de 2007.

La fameuse note n’a rien à voir là-dedans : à l’aune de très nombreux éléments, le tribunal a confimé que Nicolas Sarkozy s’est mis dans la main d’un dictateur. Qu’il a ainsi mis son pays en danger. Et qu’il faudrait peut-être à présent voir d’un autre œil la guerre conduite quelques années plus tard contre le régime du même Mouammar Kadhafi, au moment où celui-ci risquait d’être renversé.

Tout ceci est vertigineux. Les voilà, les scandales.

En attendant, l’attitude de Nicolas Sarkozy, sa violence habituelle et ses attaques incessantes contre la liberté de la presse et l’État de droit ont des conséquences alarmantes. Depuis jeudi, des magistrats sont menacés – deux enquêtes ont même été ouvertes. Nos journalistes reçoivent des messages haineux. Ce climat infect doit cesser. La presse doit pouvoir travailler librement, en toute indépendance et en toute sécurité.

Lénaïg Bredoux et Valentine Oberti, codirectrices éditoriales de Mediapart