Près de 15 000 lits supprimés en moins de dix ans, des méthodes brutales, des inégalités dans la prise en charge… Le tableau de la psychiatrie française, que dressent de concert, à longueur de tribunes, le personnel infirmier, les associations de patients et les médecins eux-mêmes, est sombre, très sombre.
Ce constat vient d'être reconnu à demi-mot par la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, qui évoque dans une interview au Monde, une "discipline paupérisée", "des conditions dégradées" et une "très grande souffrance". Sans s'encombrer de nouvelles études sur un secteur dont les maux sont désormais connus, la ministre vient d'annoncer ce vendredi un plan d'urgence – mais sans moyens supplémentaires – pour la psychiatrie. De leur côté, des professionnels dénoncent le manque de moyens alloués à la prise en charge "hors les murs" et donc, faute de mieux, un "retour vers l'asile".
La quête d'une pratique plus humaine, plus réfléchie, plus proche du patient anime pourtant certains acteurs du secteur depuis des décennies. Ainsi, en 1953, Jean Oury, psychiatre, déjà en rupture avec les pratiques de son époque, claque la porte de sa clinique du Loir-et-Cher et entraîne dans sa fugue une trentaine de patients.
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Leur errance prend fin à La Borde, un domaine qui deviendra un bastion de la psychiatrie institutionnelle. Cette approche de la folie, basée sur l'émancipation, n'aura jamais été aussi concrète que lors de ces trois semaines de pérégrinations. L'aventure nourrira aussi la vie intellectuelle : la pensée de Gilles Deleuze ou celle de Félix Guattari n'aurait pas été la même sans cette folle épopée.
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Ce reportage, signé Arno Bertina et Pierre-Henry Gomont, est à retrouver en intégralité dans le dernier numéro de La Revue Dessinée (le #18).
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