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Billet de blog 14 octobre 2017

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Tableaux Noirs: poursuites abandonnées, mais les professeurs restent fichés !

Six professeurs du collège Albert Camus de Gaillac ont fait l’objet d’une plainte auprès de la gendarmerie pour effraction, intrusion et vol.  Ils ont été auditionnés, fichés — pris en photo de face, de profil, de trois-quart, leurs empreintes ont été relevées ; leurs maisons ont été perquisitionnées. Comment en est-on arrivé là ?

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Les tableaux noirs n’ont pas été volés !
Six professeurs du collège Albert Camus de Gaillac ont fait l’objet d’une plainte auprès de la gendarmerie pour effraction, intrusion et vol. 
Ils ont été auditionnés, fichés — pris en photo de face, de profil, de trois-quart, leurs empreintes ont été relevées ; leurs maisons ont été perquisitionnées.
Comment en est-on arrivé là ?
Le contexte :
Le projet de rénovation du Collège Albert Camus date de 2010, année de la première et unique concertation à laquelle une partie des professeurs du collège a pu participer.
En juin 2016, sans concertation, des armoires, des tables, des chaises et des tableaux noirs sont balancés des fenêtres dans des bennes destinées à la décharge, alors qu’ils auraient pu être récupérés pour l’usage du collège ou par d’autres usagers.
En juin 2017, après de longs mois de démarches auprès de la direction de l’établissement et du Conseil Départemental pour demander que leur outil de travail — promis à la déchetterie — soit préservé, tous les courriers sont restés sans réponse. Des professeurs prennent l’initiative de démonter quelques tableaux noirs pour les réinstaller en classe à la rentrée, à côté des nouveaux tableaux qui doivent tous être blancs.
Les faits :
Le mercredi 28 juin 2017, en plein jour et en présence de la direction de l’établissement, qui n’exprime alors aucune opposition, ces professeurs sont rejoints par des parents d’élèves solidaires d’une action qu’ils considèrent légitime d’un point de vue pédagogique, écologique et financier.
Ensemble, ils démontent des tableaux noirs, action interrompue par l’arrivée d’une douzaine de gendarmes, alertés au sujet d'un prétendu  “cambriolage au collège”.
Les professeurs sont ensuite auditionnés, et découvrent, à leur grande surprise que l’accusation porte sur des tabourets, tables, étagères... Accusations mensongères !
Cette plainte et son nouvel objet sont à l’origine de l’audition des professeurs incriminés et de la perquisition de leur maison à la recherche de ce matériel. Aucun de ces objets n’a bien sûr été retrouvé au domicile des enseignants.
Une procédure administrative est ouverte sur la base de ces accusations avant même que le rectorat ne les entende. Il est, entre autres, reproché aux professeurs de ne pas avoir tenu compte de la consultation menée par la direction, dont aurait résulté le choix de ne pas conserver les tableaux noirs. Autre mensonge !
Il n’y avait eu ni prise en compte des besoins pédagogiques de chacun, ni vote au Conseil d’administration à ce sujet. Aucune décision n’avait été actée ni annoncée officiellement à l’équipe pédagogique.
Mais alors... 


Que reproche-t-on à ces professionnels ?
D’avoir cherché à préserver un outil de travail qu’ils jugent indispensable pour l’enseignement de leur discipline ?
D’avoir agi selon les objectifs du développement durable enseignés aux élèves conformément aux recommandations de l’institution ?
D’avoir souhaité éviter des dépenses inutiles à l’heure où le Conseil Départemental parle d’économies ?
Dans une telle situation, chacun d’entre nous, s’il choisit d’agir contre l’absurdité, peut se retrouver broyé.
Depuis, la forte mobilisation du Comité de soutien et les plus de 11 000 signatures de la pétition en ligne ont permis la suspension des poursuites administratives et l’arrêt de la procédure pénale. 


Pour autant, les enseignants restent “fichés”.

Les mensonges et la malveillance des accusateurs n’ont pas été punis.
Les mis en cause veulent à présent faire reconnaitre publiquement leur innocence et faire éclater les mensonges qui ont été prononcés.
La démesure et l’absurdité de la répression qui s'est abattue sur les six professeurs éclairent les contradictions de notre société.
Notre “affaire” est l’affaire de tous. Elle touche aussi à d’autres questions essentielles : le respect des salariés et de leur savoir-faire, la liberté de choisir ses outils de travail, la consultation des citoyens dans les choix des dépenses publiques.
Qui sont les “voleurs” ?

Ceux qui sauvegardent le bien public ou ceux qui gaspillent l'argent public ?
Ces derniers nous entraînent dans une course vers la “modernisation” et “l'innovation” dans laquelle l’intérêt du marché prime au détriment de l’intérêt des citoyens. N'est-il pas temps d'interroger la pertinence du déferlement massif du numérique (permis par le tableau blanc) dans l’Éducation nationale comme ailleurs ?
Prenons l'exemple de Linky ou encore la “modernisation” de nos bureaux de poste où il faut à présent faire la queue deux fois pour des envois postaux. 
Prenons l'exemple de la “modernisation des services” où nous n'avons plus d'interlocuteurs humains mais des plateformes téléphoniques. 
Prenons l'exemple de la “numérisation forcée” où nous devons nous mêmes télécharger et imprimer les documents, où nous devons déclarer en ligne.
Où est le progrès pour les citoyens que nous sommes ?

Le numérique devrait libérer, il nous enchaîne. 

Là où il y a de la chaîne, il n'y a pas de progrès !
Tableaux noirs - 10 octobre 2017
Toutes les informations ici : www.tableauxnoirsblog.wordpress.com

Article publié par Le Canard Enchaîné, dans son édition du 13 septembre dernier,  sur cette histoire ahurissante:

Illustration 1

Un billet de blog qui avait évoqué cette affaire ubuesque sur Médiapart:

 https://blogs.mediapart.fr/arthur-porto/blog/170917/alerte-les-voleurs-de-tableaux-noirs-de-gaillac

Courrier reçu du comité de soutien, le 3 octobre 2017:

3 OCT. 2017 — Après l’annonce de l’arrêt de la procédure disciplinaire engagée par le Rectorat de Toulouse à l’encontre des professeurs « décrocheurs de tableaux », nous apprenons que le procureur de la République d’Albi a classé l’affaire sans suite. Cette décision est antérieure à la première mais nous n’en avions pas été informés.


Nous nous réjouissons de cette double décision.

Néanmoins, nous restons vigilants et mobilisés car

 
- les dossiers de carrière des professeurs incriminés restent entachés par la référence à cette affaire, nous demandons le retrait des pièces relatives à cette affaire de leurs dossiers administratifs.


- la plainte de Mme la Principale, confortée par les communiqués fallacieux du Conseil Départemental, jetant le discrédit sur l’action et sur les enseignants, n’est pas acceptable ; nous demandons le retrait de ses accusations mensongères et des propos préjudiciables du Département.


- nous ne savons toujours pas ce que l’administration a fait de ces tableaux noirs ; nous demandons que les professeurs souhaitant en disposer puissent en jouir dans le cadre de leur liberté pédagogique.


Au-delà, saisissons-nous de cette affaire pour parler de l’École, des politiques locales, et plus largement du travail.

Ensemble, partout. 


Notre comité de soutien se réunit régulièrement, si vous avez des informations, des suggestions à partager avec nous, rendez vous sur notre blog, sur notre page FB ou écrivez-nous : lanoirceurdutableau@gmail.com

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