http://www.humanite.fr/front-republique-rien-592403
Ce front républicain est un abandon, c’est de la politique de tapis vert.
Pour contrer le FN, il eût été préférable
de ne pas hurler en sueur : « J’aime l’entreprise ! »
Ou de ne pas déclarer sans sourciller que les Roms n’ont pas vocation à s’intégrer,
mais au contraire de donner le droit de vote aux étrangers extracommunautaires aux élections locales, au lieu d’abandonner cette promesse au lendemain d’une défaite électorale affichant une fois de plus un score important du FN, comme un acte d’allégeance ;
c’était ne pas appeler les pays de l’Union européenne à restreindre l’accueil des réfugiés quelques jours après le 13 novembre, accréditant du même coup les thèses du FN qui voit en chaque réfugié un possible terroriste ;
c’était ne pas marteler qu’il n’y a qu’une politique possible ;
c’était ne pas couper les budgets de la Culture à peine arrivé au pouvoir, mais au contraire soutenir les festivals au lieu de constater leurs fermetures avec un air de circonstance ;
c’était ne pas abandonner les intermittents à la vindicte méprisante du Medef, mais au contraire les défendre immédiatement, totalement.
C’était profiter d’un voyage au Luxembourg pour taper du poing sur la table en condamnant cette politique de dumping fiscal que pratique le grand-duché.
Ne pas supposer le chômeur fraudeur et l’assuré social tricheur, surtout lorsque des centaines de milliards nous échappent chaque année par l’exil et l’optimisation fiscale de nos si chers plus riches et de nos si aimées entreprises.
C’était de ne pas appeler de ses vœux une jeunesse se rêvant milliardaire, c’était oser les Scop lorsque le grand capital détruit nos industries ;
c’était ne pas se découvrir à moins d’un an de la COP21 une âme d’écologiste.
Lutter contre le FN, c’eût été avoir de la constance et des convictions, avoir encore un idéal autrement plus motivant que l’équilibre des comptes public et nous y emmener, oser le bonheur pour tous, c’était laisser le corps enseignant un peu tranquille pour une fois, l’écouter et lui donner de quoi enseigner, les profs connaissent leur métier, c’est leur passion et ils en ont marre qu’on leur dise ce qu’il faut faire à coup de réformes obscures et indéchiffrables dont le seul but est de transformer l’école en un tube par lequel on entre « espérant » pour en ressortir à l’autre bout « consommateur ».
Lutter contre le FN,
c’était être capable d’abandonner la rigueur budgétaire européenne pour une autre cause que notre sécurité immédiate, par exemple pour venir en aide à nos 5 millions de pauvres, pour construire ces logements qui manquent à plus d’un million et demi de personnes,
c’était faire en sorte que les Français ne dépensent pas plus de la moitié de leur paye pour se loger ;
bref, lutter contre le FN,
c’était rester de gauche, vraiment, réellement, de gauche à en mourir, de gauche à en tenir bon sous la mitraille,
c’est revenir au plus vite et le plus farouchement possible aux valeurs de la gauche prolétarienne,
redonner du sens au travail, à la culture du travail, son honneur et sa grandeur, au lieu de le détruire en faisant du travail une tâche à accomplir, tous les trois jours un homme ou une femme se suicide à cause de son travail qu’il ou elle ne reconnaît plus, le peuple de gauche avec ses valeurs et son honneur se fait humilier depuis des années sur l’autel de la croissance, des fonds de pension, du libre-échange, ce peuple d’un autre âge qui ne comprendrait pas l’évolution du monde et à qui on demande dimanche de voter comme un seul homme pour des candidats de droite en invoquant Jaurès.