L'intrigue, disons-le tout de suite, est assez peu convaincante.
Comment imaginer qu'une jeune infirmière, fille d'un militant communiste, soignant tout le monde et aimée de tous, pas spécialement politisée mais plutôt de gauche, se laisse aussi facilement convaincre de candidater, aux élections municipales, pour un mouvement clairement marqué à l'extrême-droite ?
Et cette jeune infirmière, ô coïncidence, retrouve à ce moment précis un ami de lycée, qu'elle n'avait pas vu depuis vingt ans, dont elle tombe amoureuse, et qui s'avère être un militant d'extrême-droite des plus violents, autrefois exclu du parti , ce qui vient, évidemment, contrecarrer les projets de "dédiabolisation"...
Restée humaniste, bien qu'elle ait accepté d'incarner ce mouvement d'extrême-droite, la jeune infirmière ne supportera pas d'apprendre la réalité sur les agissements de son nouvel amant.
Bon.
😀
L'essentiel n'est pas là.
Le film, par contre, excelle à montrer les différentes composantes d'un mouvement d'extrême-droite:
1) les dirigeants : des bourgeois.
Ils manipulent des sommes importantes en liquide, d'origine douteuse.
Médiapart documente régulièrement les financements actuels du FN.
Au sujet de financements plus anciens, et parfois étonnants, on relira avec profit cette enquête, dont la bande rouge promotionnelle proclamait, déjà: "le parti de l'étranger" :

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2) les brutes épaisses : ceux qui cognent.
Ils aiment cogner. C'est leur plaisir.
Et ils trouvent dans le Parti une légitimation politique à leur violence.
Parmi ceux-ci, certains se sont assagis, acceptant de remplacer le treillis par des costumes cravates. C'est le DPS dans la réalité, le SERP dans le film (clin d'oeil, manifestement, et sans mauvais jeu de mots, à la maison de disques que contrôlait Le Pen père, et qui s'était spécialisée dans la diffusion de "documents historisques" sur 33 tours. Notamment, des chants et des discours nazis.
C'était avant la "dédiabolisation".
😀

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Un disque (parmi d'autres, du même style) édité par la SERP de Jean-Marie Le Pen.
D'autres, incontrôlables, ont été exclus, pas réellement pour des divergences idéologiques, mais parce qu'ils donnaient une mauvaise image du parti.
Sans ces cogneurs, utilisés puis écartés lorsqu'ils deviennent trop gènants, point de parti.
Qui a jamais vu un parti d'extrême-droite non-violent ?
3) les "dédiaboliseurs": des énarques, ou des cadres, des "communicants"...
Eux n'étaient pas encore là il y a trente ans.
Attirés par l'espérance d'une belle carrière dans un parti qui monte, et qui est de plus en plus considéré comme un parti comme les autres, ils expliquent aux candidats néophytes comment ne pas se faire piéger, paraître lisses, faire "propre sur soi". On ne combat pas contre les "bougnoules", "les gris", les "ratons" ou les "bamboulas", mais contre "le communautarisme", "le fondamentalisme islamiste", etc...
Tout le monde comprend, mais les mots qui fâchent ne doivent jamais être prononcés.
Ne pas hésiter, par ailleurs, à exploiter chaque fait divers, chaque acte de délinquance, qui peut servir la cause.
4) les électeurs: attirés, clairement, comme autrefois, par la xénophobie et le racisme décomplexés.
Le discours des dirigeants a été "gauchi".
Ils prétendent désormais incarner le combat du "peuple" contre "les élites", "l'oligarchie", mais c'est bien la xénophobie qui amène à voter pour la liste "identitaire".
Un très bon film politique, sur les méthodes de recrutement et de manipulation d'un parti d'extrême-doite, que l'on peut rapprocher de La Désintégration, de Philippe Faucon.
Un film qui montrait comment des fondamentalistes islamistes recrutent des jeunes à la dérive.
Ceux-là aussi tentent d'exploiter habilement la colère née de la misère pour distiller leur poison idéologique.

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