Il y a 20 ans maintenant, j’avais presque 14 ans et je m’en rappelle comme si c’était hier : Jean Marie Le Pen au deuxième tour. Lionel Jospin, distancé de si peu, deux voix par bureau de vote disait on. Lionel Jospin a la télévision annonçant son retrait de la vie politique.
Le coup de tonnerre a la maison. L’inattendu. Le choc. Dans ma famille socialiste sur plusieurs générations, militants, ce fut le choc, la sidération.
Je me rappelle de la manifestation ou nous étions allées avec mes parents dans ma ville le dimanche suivant. Plein de monde. La France était sous le choc.
L’année d’après, alors que j’arrivais à mes 15 ans et sur l’accord qu’on s’était dit avec mes parents depuis plusieurs années déjà, je m’étais engagée au MJS.
Génération militant-es post 21 avril. Beaucoup de jeunes s’étaient engagé-es suite a cet événement. Le Front National faisait peur (et a raison), Chirac avait fait 80% au second tour, le fameux « front républicain » avait bien « fonctionné ».
20 ans après…
Après deux décennies de dédiabolisation par le Front National de ce qu’il est, après sa banalisation dans les médias, après le départ de Le Pen père pour être remplacé par sa fille, souriante derrière ses chats, après une élection de 2017 marqué par le deuxième passage au deuxième tour du FN a nouveau et l’acceptation par Emmanuel Macron de ce qu’avait refuse Chirac – débattre avec une fasciste -, après Éric Zemmour dans les médias et ses propos si abominables qu’ils ont fini le travail de dédiabolisation, le Front National devenu Rassemblement National, ne semble plus faire peur.
L’entreprise menée par Marine Le Pen depuis des années a fini par porter ses fruits. On l’invite dans les médias comme si une fasciste était une candidate « comme les autres », on la prend en photo avec ses chats, on lui sourit et on débat sur son programme, comme si le simple fait que l’on avait affaire ici a une candidate d’extrême droite fasciste a la tête d’un parti fondé par des nazis ne suffisait plus.
Je me rappelle de mon incompréhension la première fois que j’avais entendu a la radio un membre du RN nier être d’extrême droite. Je n’avais tellement pas compris que j’avais rapporte ses propos a un proche qui m’avait expliqué que c’était la stratégie classique du RN que de nier leur appartenance même a l’extrême droite. Ils se placent « de droite » pour bien finir de dédiaboliser ce qui ne devrait jamais l’être.
Le naufrage du « débat » sur la santé organisé par le principal syndicat d’internes de France, l’ISNI, est caractéristique de la période et terrifiant : sourire au fasciste, « oh il a l’air sympathique sa maman est médecin aussi », et on le laisse dérouler ses éléments de langages fascistes en lui souriant.
Le débat de mercredi soir fut dans la même ligne. Journalistes choisi-es par les candidat-es, thèmes de prédilection de la droite et extrême droite, et un Emmanuel Macron qui termine en disant respecter son adversaire.
Terrifiant de devoir rappeler ceci : on ne débat pas avec les fascistes. On ne transige pas avec les fascistes. On ne sourit pas et ne donne pas de la visibilité à des fascistes.
Terrifiant de voir analyser dans les émissions de radio ou TV ou articles de journaux le « programme » de Mme Le Pen. On y lit « candidate du peuple », « non Mme Le Pen n’a pas un programme de gauche » (quelle surprise!) , « Le programme économique de Mme Le Pen serait une catastrophe ».
Quelle surprise. Le programme d’un parti fasciste, d’une candidate fasciste est fasciste. Il est raciste, il est xénophobe, il ne prévoit pas de respecter la démocratie et l’Etat de droit. Il prévoit de marcher sur la constitution, il prévoit le passage a « l’illibéralisme » comme M. Orban, il prévoit des mesures profondément racistes, discriminatoires et ne nous trompons pas a mes adelphes handi-es, eugénistes. Les fascistes ont toujours été euginistes et ce n’est pas car elle a mis l’AAH dans son programme que ce ne sera pas le cas.
Pendant ce temps, l’extrême droite tue. L’extrême droite a encore tué il y a peu, en pleine rue, dans Paris, par balles.
L’extrême droite tue. Le fascisme tue. Ce ne sont pas des mots que je dis la. Mais une réalité qu’il convient de ne pas oublier. L’extrême droite est un danger immense pour notre pays. L’extrême droite tuera si elle est au pouvoir.
Est il besoin de rappeler que l’extrême droite si elle est arrivée souvent par les urnes, en repart rarement par ce biais? Que les illusions de résistance dans un pays gouverné par une fasciste ne sont que : des illusions. Qu’une de ses premières mesures est la mise en place de la légitimité défense pour les policiers ?
L’extrême droite tue. Le fascisme est a notre porte. Le fascisme frappe a notre porte depuis le 21 avril 2002. Nous sommes le 22 avril 2022. Il est plus que jamais prêt a prendre le pouvoir.
Allons nous le laisser faire ? Ouvrons des yeux que nous avons fermés ces dernières années. Oublions les chats. Oublions les discours populistes faisant croire à une candidature du pouvoir d’achat.
Ouvrons les yeux pour voir ce que nous avons en face : la perspective d’avoir une présidente fasciste qui fera tout ce qui est en son pouvoir pour appliquer une politique fasciste et mettre en place cette « démocratie illibérale » qui n’a plus grand chose de démocratique…
Ouvrons les yeux et voyons bien ce que nous avons en face. Oublions les 20 ans de dédiabolisation si rudement menés par le RN pour nous rappeler ce qu’est le RN : un parti fondé par des nazis.
Cela devrait nous suffire à savoir quoi faire dimanche. Ce n’est pas la peste et le choléra. C’est oui l’ultra libéralisme d’un côté. Mais de l’autre c’est le fascisme. N’oublions pas ce qu’est le fascisme en ce jour si critique, dernier jour où nous pouvons nous exprimer avant que le couperet tombe dimanche.
Ne nous réveillons pas dimanche soir dans un pays gouverné par une fasciste. Il est encore temps.