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Billet de blog 29 juillet 2024

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Election des travailleurs des plateformes : au milieu du gué

Du 22 au 30 mai dernier a eu lieu la seconde édition de l’élection des représentant-es des travailleurs des plateformes, organisée par l’Autorité des Relations sociales des Plateformes d’Emploi. Décryptage des résultats.

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L’auteur des lignes qui suivent, ancien représentant des livreurs à l’ARPE, tente un décryptage des résultats alors que ce modèle d’activité, promu par la Star-Up Nation, a de l’avenir, grignotant de ci de là des emplois salariés dans le commerce et les services (guides touristiques, coachs, gardes d’enfants etc.).

Une participation un poil plus forte

C’est respectivement 70.000 livreurs et 50.000 chauffeurs qui composaient le corps électoral, soit 10.000 de moins pour la première catégorie suite à la purge de ceux sans-papiers, omniprésents dans cette profession et obligés de sous-louer des comptes pour travailler, et le même nombre en plus pour le second par rapport au précédent scrutin de 2022.

Elle a d'abord été marquée par une participation en hausse à 3,90 % pour les livreurs, soit un doublement par rapport à celle de 2022, et à 20 % pour les chauffeurs, un chiffre multiplié lui par quatre. Nul doute que le fait que les travaux de l’ARPE produisent de la norme applicable à ces travailleurs, à commencer par la fixation concertée des tarifs, explique ce regain engouement de leur part.

Une redistribution des cartes

Chez les VTC, c’est la percée du syndicat INV, qui avait boycotté la précédente édition et est désormais affilié à FO, qui récolte plus de 50 % des voix ce qui promet des débats houleux alors que cette organisation et son leader, par ailleurs candidat LFI aux Européennes, fait de la transposition de la directive européenne visant à favoriser la présomption de salariat – donc la mise en échec du modèle du tiers statut promu par Macron via la mise en place de l’ARPE - son cheval de bataille et se mobilisent régulièrement dans la rue et dans les prétoires.

Union Indépendants, structure affiliée elle à la CFDT, est le seul syndicat présent dans les deux collèges et devient première chez les livreurs avec près de 50 % des voix. Elle détrône ainsi la Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs, qui paie chère sa signature l’an dernier avec les plateformes de livraison de l’accord de mise en place d’une rémunération minimale en perdant sa première place mais en demeurant cependant représentative.

Le Collectif des Livreurs Autonomes des Plateformes, qui se présentait lui pour la première fois, échoue à le devenir là où la CGT, qui organise les livreurs dans plusieurs villes, connaît une stagnation de son audience en dépit de son volontarisme à travers la construction de grèves. Plus inquiétant, SUD Commerce n’est plus représenté suite à la validation par la justice de la candidature rivale de Solidaires, son union de rattachement, le travail entrepris par la Fédération bénéficiant néanmoins à cette dernière, avec plus de 10 % des voix, dont on verra si elle est capable de le capitaliser sur la durée dans les quatre ans qui viennent. De même pour la CNT-SO, victime de la rivalité syndicale qui précède après s’être présentée en commun avec SUD, qui obtient un score anecdotique suite à la validation tardive de sa candidature et qui conteste du coup le résultat du scrutin devant les juges.

La transposition à venir de la directive susvisée et la question de la régularisation des livreurs sans-papiers, restée en suspens suite à l’application partielle de la loi Immigration, ne manqueront pas de ramener les acteurs du dialogue social sectoriel soi-disant conforté par le scrutin à la réalité, c’est à dire l’exploitation la plus crasse qu’accompagne la remise en cause, via l'uberisation, du modèle de protection sociale attaché au salariat, la lutte des classes qui en résulte à l’instar de celle qui s’est développée au 19ème siècle et la poursuite d’actions en justice avec, par exemple, la confirmation en juin dernier de la condamnation de la plateforme Deliveroo pour travail dissimulé.

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