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Billet de blog 30 avril 2025

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Premier mai : on ne mange pas de ce pain là !

Je remercie l'Humanité d'avoir publié ma tribune en défense de l'universalité du #1ermai comme jour férié chômé et payé, symbole de la nécessaire réduction du temps de travail.

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Depuis le 15 avril, date de publication d’un communiqué de la Confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française suivi d’un autre de la Fédération française des artisans fleuristes et désormais des prises de position des syndicats patronaux U2P et CPME, il est de bon ton de faire feu de tout bois sur l’interdiction de travailler le 1er mai.

Rappelons pourtant que, au terme de leur convention collective, les boulangeries peuvent déjà ouvrir les dix autres jours fériés légaux ainsi que tous les dimanches, la seule règle étant qu’elles observent un jour de fermeture hebdomadaire comme le boulanger – et sa femme – ont droit eux aussi de se reposer une fois par semaine, garantie que les plus grosses d’entre elles veulent par ailleurs remettre en cause. Soulignons également la présence de nombreux apprentis, souvent mineurs, au risque d’ailleurs qu’ils se détournent de cette voie de par la rudesse des conditions de travail. Pour ce qui est des fleuristes, l’application de la leur permet déjà de faire travailler du personnel ce jour-là (et pour cause !) donc leur interpellation doit, en vérité, s’apprécier comme une tentative d’acquérir le monopole de la vente des précieuses clochettes ce jour-là.

Dans ce débat, l’intérêt des consommateurs et celui commercial des entreprises sont mis en avant mais le droit au repos à cette date des centaines de milliers de salariés de ces deux branches, à l’instar de millions d’autres n’a, à ce jour, pas voix au chapitre, comme c’est tellement plus pratique de faire parler leurs employeurs à leur place… Alors que rien n’empêche ces chefs d’entreprise de mettre eux-mêmes la main à la pâte le 1er mai, ils invoquent une réglementation qui serait obsolète et source d’insécurité juridique : c’est en fait à une offensive idéologique sur le temps de travail à laquelle on assiste ces derniers jours.

Plus qu’un jour férié, un symbole

En effet, non content de vouloir nous faire travailler plus longtemps tout au long de notre vie en bloquant y compris toute possibilité de revenir, par la loi ou par la négociation collective qu’il a pourtant initiée, sur la réforme honnie de 2023, toujours majoritairement rejetée par les salariés, qui a porté l’âge légal du départ à la retraite de 62 à 64 ans, le premier ministre, François Bayrou, dans son discours alarmiste sur l’état des finances publiques le 15 avril (tiens, tiens), nous a prévenus : « Les Français ne travaillent pas assez ! » On ne sera donc guère surpris que le gouvernement, par la voix des ministres du Travail, emboîté par de nombreux parlementaires Les Républicains et David Lisnard, le président de l’Association des maires de France, ont promis à nos braves patrons qu’ils allaient faire au plus vite pour lever le frein au travail ce jour-là.

Il est vrai que le 1er mai est le seul jour férié obligatoirement chômé et payé de notre calendrier, sauf dans les entreprises qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail, quelle incongruité ! Qui plus est, c’est un jour de manifestation qui s’est construit, à partir des luttes ouvrières de la fin du XIXe siècle, sur la revendication de la réduction de la journée de travail, là où commence le règne de la liberté, n’est ce pas Monsieur Marx ?

Revenir sur ce conquis social au motif que les cafés et les restaurants, qui doivent payer double leur personnel à cette date contrairement aux autres jours fériés travaillés, sont ouverts ce jour-là, et que la plupart des boulangeries, avec l’essor du snacking, vendent bien plus que du pain et de la viennoiserie, c’est ouvrir la boîte de Pandore, en commençant par accorder un blanc-seing aux supérettes, qui sont déjà nombreuses à bafouer la loi le 1er mai, ce que la Fédération SUD Commerces n’a pas manqué de dénoncer. On peut aussi saluer la prise de position Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT, qui a rappelé le caractère tout sauf anodin de ce jour pour le monde du travail ainsi que la flexibilité des horaires à laquelle sont déjà soumis les salariés du commerce, un prolétariat essentiellement féminin.

Plus qu’un jour férié, le 1er mai est un symbole qu’il importe de défendre bec et ongles dans une époque où nous ne sommes pas condamnés à la régression sociale sans fin !

La tribune à lire en ligne.

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