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Billet de blog 19 octobre 2020

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"Le travail, il faut l'abattre "

"Du travail industriel jusqu’au « travaux à la con » E. Cassais montre qu’aucune tâche ne saurait échapper à la perversité et à l’horreur du travail salarié. Il n’y pas de bon travail, pas de valeurs du travail à défendre puisque le travail se réduit tout entier à sa valeur marchande. Le travail et le capitalisme étant indissociables, on ne saurait supprimer l’un sans mettre fin à l’autre."

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« Le travail, il faut l’abattre » Eduardo Casais

Il plane au-dessus du mot travail et de ses dérivés une ambiguïté soigneusement entretenue. Une coalition d’intérêts se démène pour prêter à l’idéologie régnante une assise éthique, morale, philosophique et culturelle. Histoire non seulement d’avoir toujours raison, mais surtout de prévenir le débat, d’obvier à un face-à-face aux résultats potentiellement fâcheux. Pour cela tous les arguments sont bons.

Les philosophiques. Comment ose-t-on vitupérer le travail, alors que celui-ci est le propre de l’homme ? N’est-ce pas par l’humaine aptitude au labeur que l’homme se distingue de la bête ?

Les arguments religieux. Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front. Celui qui ne veut pas travailler ne doit pas manger. Et j’en passe.

Les arguments pratiques. Il faut bien que le boulanger fasse cuire le pain, que la sommelière continue de nous servir la bière, que le canalisateur débouche l’évier, que l’éboueur ramasse les ordures. Sinon, dans quelle pagaille va-t-on plonger ? On les entend rarement citer les courtiers de la bourse, ou les archevêques, ou les ministres ou les secrétaires-généraux du parti. À croire que le premier homme de la rue peut fort bien exécuter les fonctions du courtier, du ministre, de l’ambassadeur, mais que l’acte de déposer ses ordures ménagères dans un centre de ramassage est au-delà de ses capacités physiques et mentales.

Enfin, les arguments scientifiques. Les premiers économistes placent le travail là où il doit être de l’avis des possédants, chez les pauvres démunis. Si l’abondance règne, le travail devient trop cher et rare, car les pauvres ne pensent qu’à se remplir la bedaine et à s’arroser les gosiers. Par la force des choses, les pauvres doivent travailler dur, mettre tout le monde à la tâche et punir les paresseux par le travail, ils doivent être laborieux, endurants, sobres et considérer le travail et l’industrie comme un devoir envers Dieu.

Depuis les premiers balbutiements de la science économique, ses grands noms n’ont de cesse d’étoffer et de raffiner les arguments servant à fixer le travail comme la condition naturelle, nécessaire et irréversible du pauvre.

Ces ergotages visent à accréditer l’idée que le travail est le travail, point final. Toute forme de labeur serait du travail. Le labeur de l’esclave et de l’affranchi qui s’activent dans les domaines de l’antiquité. Celui du serf du moyen âge. Celui de l’apprenti et du compagnon des corporations médiévales et de l’âge moderne. Celui de l’esclave dans les Amériques. Celui des ouvriers des manufactures. Et aussi le labeur du travailleur salarié libre. Celui de l’ouvrier de l’industrie à domicile. Celui de l’ouvrier à la chaîne des usines du 19e et 20e siècles. Celui de l’ouvrier des usines robotisées et des employés des bureaux informatisés contemporains. Toutes ses formes de labeur seraient tout uniment du travail. Qu’aurions-nous donc à murmurer là-contre, puisqu’il a toujours existé et il existera toujours ? S’il a toujours eu et gardera toujours ses petits côtés moins sympathiques, voire odieux, il n’en restera pas moins la seule voie offerte à l’homme pour son émancipation, son développement, son épanouissement et son enrichissement, ainsi que celui de la société.

Piètres plaidoiries ! Le travail est un fait récent, né vers la fin du 18e siècle de l’accouplement de deux jeunes parents. Le vent libéral des Lumières qui souffla en particulier sur la Révolution française. Et la soif de main-d’œuvre ouvrière pour faire tourner les fabriques de la révolution industrielle. Il n’existait pas auparavant. Il fut engendré par le capitalisme industriel.

Lire la suite de cette histoire du travail dans l'article complet d'Eduardo Casais:

https://lundi.am/Prenons-le-travail-pour-ce-qu-il-est

Travail libre : quelle liberté ?

Le travail, une perversité

Capitalisme autophage

Restituer au travailleur l’humanité dont le travail l’a évidé

Le travail est une fausse idole, une vorace machine à tarauder la substance physique et pensante du travailleur, jusqu’à le réduire à une coque creuse, pure force-de-travail-marchandise, à la seule fin de permettre au capitaliste qui la loue d’en extraire de la valeur. Il est le revers de la pièce dont le capital est l’avers. Impossible d’en abolir l’un sans supprimer l’autre. Pour venir à bout du travail, il faut d’emblée pulvériser le capitalisme, l’agent de la réification du travailleur.

Eduardo Casais

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