C’est à Athens, dans le sud très pieux des États-Unis, que Brittany Howard a grandi. Elle vit au sein d’une famille mixte, chose encore peu courante à la fin des années 1980 dans cet État d’Alabama ségrégationniste jusqu’en 1964. Dollars rares et petits boulots obligatoires, elle a vite jeté son dévolu sur la musique. Elle rafle ensuite les prix et nominations aux Grammy Awards avec les Alabama Shakes et leurs albums Boys and Girls et Sound and Color, ou en solo avec son premier album.
Biberonnée au riff de Sister Rosetta Tharpe ou à la voix d’Aretha, Brittany en impose sévèrement. Que cela soit avec les Alabama Shakes qui l’ont fait connaître ou avec des groupes plus confidentiels dans son fief de Nashville, elle laboure son sillon avec force et classe. Elle peut aussi bien à se grimer tout de cuir, le visage peint de blanc dans des shows bien punk avec Thunderbitch ou être avare de fioritures dans le projet folk Bermuda Triangle, avec deux talentueuses comparses.
Dans son premier album solo en 2019, Jaime, Brittany Howard se dévoile et dévoile une palette bien plus large. La Gibson est plus délaissée au profit de sonorités plus funk et hip-hop gardant toujours un pied dans le blues et la country. L’artiste réalise de l’orfèvrerie sonore avec le morceau Stay High, Goat Head qui évoque le racisme qu’a subi son père ou Georgia son premier morceau ouvertement saphique.
Brittany Howard tient les deux bouts de la sincérité et de l’exigence musicale. Avec What Now, album écrit et coproduit avec Shawn Everett, la mue se poursuit dans un univers eighties et plus direct gardant la subtilité et les détails du côté de la production. Virages plus prononcés entre un R’n’B encore plus calibré et des sonorités plus électro, comme le très club Prove it to you ou What Now avec sa basse omniprésente. On ne peut s’empêcher de penser au feu Prince de Minneapolis, le rock et la soul des débuts sont moins là, mais perdure cette voix puissante et rageuse qui emporte tout.
« What Now » de Brittany Howard (Island Records) 2024
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