Au poète décembriste
Kondrati Ryléïev.
Pour ton amour de la liberté
Le bourreau t’a mis la corde au cou
Ô vivant héros
Ô Ryléïev
Que d’autres te regardent parmi tous les siècles futurs
Silhouette de fièvre
Silhouette à la face du déluge
À la face de ce souffle qui courbe bien des
montagnes de livres
Ton sacrifice allume le brasier des désespérés
dans l’espace glacé de la médiocrité des jours
des années par dizaines qui n’en finissent pas
dans l’immensité de la blessure des amants de
la justice
(Tous les hommes tristes)
Quel sursaut dans ce gouffre qui va ainsi
toujours s’élargissant
Ô prisonnier au sang généreux
Je te vois contemplant l’avenir de si haut
Que même la mort a reculé
La mort a été prise d’un sanglot
Le bourreau a pâli et tremblé devant son geste
Et la jeunesse te dressait des autels dans ses
exils sans terre
Il suffit d’un homme au gibet
Pour qu’advienne le fouet magnifique de l’esprit
qui se dresse
Que de ton corps offert tombé naissent des chants
Pour la Révolte
Des bras noués à d’autres
(absorbés par la crasse)
et des brassées de foules qui montent
Sur l’esplanade où vibre l’aube de leur destin
Ô Ryléïev
Ô vivant semeur de plus de jour
Gérard Lemaire
p318 dans le livre "Gérard Lemaire, un poète à hauteur d'homme" le Contentieux, mai 2019
Kondrati Fiodorovitch Ryleïev, né le 1er octobre 1795, était un poète et révolutionnaire russe, décembriste. Il fut pendu le 25 juillet 1826. En 1818, il démissionne de l'armée après la campagne contre Napoléon. Il publie un poème satirique en 1820, des fragments puis des textes lyriques disant ses conceptions civiques. Il est connu par ses Doumy qui empruntent aux chants historiques ukrainiens qui fleurissent au XVI° siècle. Son grand poème à la liberté, Voïnaroski (1825) raconte la vie du neveu de Mazeppa. (dictionnaire des littératures, Larousse)