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Billet de blog 10 mai 2025

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Préparation au massacre

« Gaza n’est pas une blessure sur la carte. C'est une blessure dans l'âme de l'humanité. » écrivair sur X le Dr. Ezzideen. Et le massacre continue. Et le Docteur gazaoui n'en finit pas de nous tendre le miroir des infamies de nos sociétés.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dr. Ezzideen @ezzingaza

Ils nous préparent au massacre. Oui, oui, ils le font. Avec des mots, des chiffres, des mensonges brodés sur les drapeaux des nations et les titres des journaux. Il suffit d'observer attentivement, et le dessein se révèle : avant le sang, toujours le discours. Avant le feu, la formule. Avant le cadavre, la justification. Il n'y a plus de choc, seulement une tendance. Et qu'est-ce qu'une tendance, sinon le consentement silencieux de ceux qui ont déjà vu le mal et ont haussé les épaules ?

À nouveau, les canons murmurent derrière les voiles du langage. « Une invasion terrestre », murmurent-ils, « sécurité », « zones », « force nécessaire ». Ah ! Le vocabulaire du meurtre est devenu si raffiné, si terriblement éloquent. Mais je connais ce langage. Je l'ai entendu dans les confessions d'hommes qui ont frappé sans haine, seulement par devoir. C'est le langage du péché systémique, quand l'homme n'a plus besoin de rage pour tuer, seulement de permission.

Ils ont parlé de Gaza. Non, pas parlé, calculé. C'est le mot. Ils ont calculé Gaza. Deux millions d'âmes réduites à une coordonnée, un couloir, un confinement. Ils ne parlent plus de justice, ni de miséricorde, mais de calories. Ils disent : « 1 700 par jour suffiront. » Vous voyez ? Même la famine a désormais une bureaucratie. Même la faim doit désormais porter un badge et rendre des comptes à un comité.

Et le monde ? Le monde écoute, hoche la tête, débat, ajuste ses lunettes. Ah, mais les enfants, eux, ne débattent pas. Ils dépérissent simplement. La peau se tend plus fort sur leurs côtes. La lumière s'éteint doucement dans leurs yeux. Ils ne meurent pas en soldats, ni même en martyrs. Ils meurent comme des obstacles, doucement soustraits au plan d'autrui.

Illustration 1
Enfant à Gaza © Dr Ezzideen

Et toujours cette puissante affirmation : « Nous agissons parce qu'ils ne cèdent pas. » Mais qui est « ils » ? Je vous le demande, qui règne sous les décombres ? Qui gouverne depuis une tente ? Qui dirige depuis la tombe ? Les hommes en costume et en titre survivront. C'est le cordonnier, la veuve, l'enfant fiévreux, qui seront enterrés. Et enterrés non pas pour avoir défié, mais pour avoir existé.

J'ai vu des prisons, des révolutions, la potence, la main tremblante d'un condamné à mort. J'ai vu la folie vêtue d'uniformes et l'amour écrasé sous des bottes. Mais ce qui s'abat sur Gaza, ce n'est pas de la folie. Non. C'est une froideur, une lucidité si parfaite qu'elle glace l'âme. Ce n'est pas de la rage, c'est une procédure. Ce n'est pas un meurtre, c'est une politique.

Ils ne font même plus semblant de croire en Dieu. Ils croient au management. Au contrôle. Aux indicateurs et aux messages. Mais plus à l'homme.

Alors je dis ceci, à quiconque croit encore en son âme et conscience : observez Gaza. Ni en spectateur. Ni en journaliste, ni en diplomate, ni en cynique. Observez-la comme on observe le Golgotha. Observez-la comme on observe la dernière lueur d’humanité retenue sous l’eau. Car ce qui vient, oui, ce qui vient, ce n'est pas la guerre. C'est un miroir.

Et que Dieu nous aide si nous ne pouvons pas supporter de regarder.

#GazaGenocide 

Illustration 2
Zone humanitaire © Dr Ezzideen

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