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Billet de blog 11 juin 2025

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Les traumas et la fin de l’empathie collective

Le manque constaté de toute intervention de la part des spécialistes des traumas laisse à penser que les intérêts diplomatiques, économiques et idéologiques l’emportent sur toute considération et sur toute prise en charge des êtres humains et de leur vie.

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INSENSIBILITÉ GÉNÉRALISÉE

Sur ces formidables machines à fabriquer du consentement que sont nos medias et les réseaux dits “sociaux”, jamais ô grand jamais il n’est question de la disparition de l’empathie – et pas seulement dans l’univers sioniste ! – Autour de nous, chez nous, en nous !... Non seulement au niveau mondial la situation véritablement inhumaine infligée froidement aux foules massacrées à Gaza laisse indifférentes les opinions publiques de chaque pays (et ce ne seront hélas pas les déclarations de pure forme çà et là qui démentiront cet effondrement de la pensée et de l’information), mais personne n’interroge non plus leurs relations avec les origines traumatiques de la violence chez ceux et celles qui la mettent en pratique plus tard ou qui la justifient peu ou prou.

Il y a largement de quoi s’alarmer de l’absence de prise de parole de quelque “spécialiste” qui soit, concernant l’impact des événements en Palestine sur le psychisme de nos contemporain·es (témoins et victimes vicariantes), ainsi que sur le devenir de ce qu’on ose encore appeler l’Humanité après cette terrible déchirure du consensus qui permettait de tenir un “juste” cap humaniste en référence au Droit International.

POURQUOI CE SILENCE EN FRANCE ?

Circulent pourtant en ligne (en anglais, parfois rapidement traduits en français) des interviews de Gabor Maté, un psychiatre Canadien, spécialiste du trauma, petit-fils de déporté·es, mais rien, strictement rien de la part des figures de référence françaises.

Gabor Maté on Gaza: 'The Moral Issue of Our Time' © The Chris Hedges YouTube Channel

Restent encore absolument muettes aujourd’hui encore des personnes comme Thierry Baubet (co-directeur scientifique du Centre national de ressources et de résilience – CN2R), Boris Cyrulnik, Muriel Salmona, Françoise Sironi, etc. 

Françoise Sironi serait sans doute la plus compétente en tant que spécialiste des violences collectives. Reste que, si l’on s’en tient à la seule popularité de chacun·e, on pourrait espérer a minima une manifestation médiatique de l’intérêt des trois autres sur ce thème...

LA PAGE X DE MURIEL SALMONA

Défilé incessant d’images d’enfants juifs assassinés par les nazis, mais AUCUNE mention des enfants de Palestine. On ne s’y prendrait pas autrement pour livrer le message selon lequel des millions d’enfants arabes martyrisés ne vaudront jamais un seul enfant juif.  

L’indignation mondiale est tellement immense qu’effectivement les dirigeants sont sans doute obligés de détendre un peu la laisse pour éviter des émeutes ( les évènements à LA aux USA entrent peut-être en résonance ?). 

Certains frémissements pourraient confirmer que se fissure enfin l’omerta médiatique : à les en croire, celles et ceux qui adhéraient depuis toujours au narratif pro-sioniste basique du droit à se défendre d’Israël commencent à douter. Cependant, le manque constaté de toute intervention de la part des spécialistes des traumas laisse à penser que les intérêts diplomatiques, économiques et idéologiques l’emportent sur toute considération et sur toute prise en charge des êtres humains et de leur vie. 

L’EXEMPLE DU CENTRE PRIMO LEVI

On ne trouve rien sur leur site en relation, même indirecte, avec l’actualité Palestinienne. Par contre un article traite de la prise en charge en urgence, en temps réel en Ukraine : https://primolevi.org/ressource/lurgence-en-temps-de-guerre. Dans cet article il est question d’un dispositif (“Unbroken”) mis en place par un psychiatre dans les hôpitaux ; très rapidement on se rend compte de la dissonance entre les situations évoquées et celles qui ont lieu en Palestine, où les hôpitaux sont bombardés, où des drones ciblent les médecins qui tentent de s’échapper, où les enfants sont délibérément abattus d’une balle dans la tête et d’une autre dans le torse ; dans un tel contexte l’intervention d’un psychiatre formé au psycho trauma paraît surréaliste.

Dans l’article sus-cité il est écrit ceci au sujet de la mise en place du dispositif d’urgence :

« La première chose que nous avons faite, c’est donc de nous adresser au monde entier. Tout d’abord, nous avons sollicité les institutions militaires de l’Otan qui ont des connaissances sur le trauma militaire (Grande-Bretagne, États-Unis et Israël). C’est auprès d’eux que nous cherchions des modèles. Puis, nous avons sollicité l’aide d’institutions civiles comme l’Université de Yale et le Centre Primo Levi. Nous avons commencé à découvrir et à apprendre ce que nous ignorions sur les effets de la guerre. »

Les institutions militaires sont excellemment informées des dégâts occasionnés par les massacres de civils, sur les populations elles-mêmes, sur les acteurs militaires de terrain, sur les personnels des ONG (qui sont tous en larmes lorsqu’ils témoignent de leur vécu à Gaza), et sur les témoins (“victimes vicariantes”) que nous sommes devenu·e s par la force des choses.

EXPÉRIMENTATION DE SOLUTIONS FINALES

Les pays cités dans l’article sont donc très au fait des impacts à courts, moyens et longs termes sur les populations, depuis celle, palestinienne, aujourd’hui génocidée, jusqu’aux témoins lointains, impuissants (le confirment les attaques répétées ciblant les instances représentatives du Droit International). Tout ceci permet d’augurer un avenir des plus sinistres pour l’Humanité. Israël s’en vante depuis longtemps : la Palestine est un laboratoire. Ce qu’il s’y passe sous nos yeux nous concerne tous et toutes bien au-delà des aspects géo-politiques du conflit).

Les spécialistes des traumas sont les mieux placé·es pour mesurer l’impact des exactions israéliennes sur les populations civiles palestiniennes, sur les témoins de ces faits, sur les conséquences à long terme et sur l’absence de réaction publique. Tout cela, et le silence lui-même des spécialistes autorisé·es, a largement de quoi nous alarmer sur le sort infligé aux populations 

Même si l’on sait qu’ils ne peuvent agir qu’après-coup auprès des victimes, leurs connaissances dans ce domaine devraient les inciter à dénoncer haut et fort le danger de ces attaques contre l’Humanité. 

Quel est donc leur (notre) degré de conscience ?

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