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Billet de blog 6 mars 2024

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QUELS JOURNALISTES AVONS-NOUS ?

« Bien informés, les hommes sont des citoyens ; mal informés, ils deviennent des sujets. » (Hippolyte Taine)

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Aujourd’hui, la question à se poser n’est plus : « Qu’elle presse avons-nous ? » – du média d’extrême droite CNews, de la chaîne d’obédience macroniste BFM TV, de l’antenne de Kiev via Washington LCI, propriétés des milliardaires de la finance et de l’industrie ; à la voix de l’Élysée, France télévision, tous ces organes de presse, nous le savons, sont inféodés –, mais de s'interroger : « Quels journalistes avons-nous ? ». Le journaliste, et écrivain, Jules Janin écrivait : « Le journalisme mène à tout, à condition d’en sortir. »

Qui sont ces informateurs, qui sous couvert d’une prétendue « objectivité journalistique », qualifiée de « vaste mensonge » par le journaliste Claude Sérillon, insultent notre intelligence. En préface de son livre « Journal 2020 », Claude Sérillon écrit : « Il n'est pas rare de se laisser aller à mettre des mots sur des colères ou des émotions, tant il est avéré que l'objectivité n'existe pas. » […] « Tout est subjectif. Prétendre à l'objectivité est un vaste mensonge ».

Qui sont ces informateurs, davantage préoccupés par leur nombril et leur ego ; par leur dévotion carriériste à leurs patrons et à leur gamelle alléchante, au pouvoir politique, à l’idéologie dominante ?

Qui sont ces informateurs corporatistes qui se solidarisent avec la pleurnicharde Saint-Cricq, mais qui se taisent honteusement sur le sort des 94 journalistes tués par l’armée de l’État d’extrême droite d’Israël ?

Qui sont ces informateurs qui mentent par omission, ou par déni des faits ? Et ces reporters, parfois ridicules sous leurs casques, parés de leur gilets pare-balles, convertis en propagandistes sous la censure militaire ?  

Qui sont ces informateurs, complaisants avec certains invités sur les plateaux, et inquisiteurs avec d’autres ? Qui, comme ce prétendu journaliste de CNews, surenchérit l’appel au génocide de son invitée franco-israélienne – déclamant : « Il ne faut pas quitter Gaza, Il faut les bombarder, il faut les effacer ! » –, par cette emphase de ce journaliste très impartial : « je vous rejoins complètement sur la position qui est la vôtre ».

Qui sont ces informateurs qui relaient des informations, parfois fausses, des militaires ukrainiens ou israéliens, sans les précautions d’usage, et émettent toujours la mention « invérifiable », quand l’information est d’origine russe ou palestinienne, et même parfois y ajoutent une appréciation subjective ou tendancieuse ?

Qui sont ces informateurs, qui dénoncent les crimes de guerre commis par la Russie en Ukraine, et qui taisent les plus de 30 000 palestiniens massacrés par le régime d’extrême droite d’Israël, dont plus de 25 000 femmes et enfants, selon le Pentagone ?

Qui sont ces pseudo-journalistes, qui commentent abondamment la mort de Navalny, et qui couvrent d’un silence honteux l’acte héroïque d’un jeune soldat américain de 25 ans, Aaron Bushnell, s’immolant par le feu le 25 février devant l'ambassade israélienne à Washington, pour protester contre la mort de civils palestiniens à Gaza ? Ou qui passent sous silence, l’assassinat par l’armée israélienne, le 5 mars dans le village de Burin, sur la route reliant Ramallah et Naplouse, de l’enfant de 10 ans, d’Amr Mohammad Ghaleb Najar, d’une balle dans la tête ?

Que ces informateurs, titulaires d’une carte de presse, s’interrogent sur le discrédit qui est aujourd’hui jeté sur la profession, par des pratiques professionnelles indignes du métier d’informer. Jean Jaurès écrivait : « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire. C’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques. » Pour compléter cette citation, j’invite ces journalistes, serviteurs du pouvoir et de l’idéologie de la classe possédante, à méditer la déclaration du sénateur américain Bernie Sanders : « Les médias ne le leur expliquent pas. Car les médias sont l’un des bras de la classe dirigeante de ce pays. Et ils veulent parler de tout, sauf des questions les plus importantes, parce que si l’on parle des vraies questions et que les gens s’instruisent, savez-vous ce qui se passe ? Ils pourraient bien vouloir tout changer. »

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