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Billet de blog 14 octobre 2023

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UN APPEL À L’UNITÉ INAUDIBLE

Le peuple ne devrait pas craindre les gouvernants qu’il a élus, ce sont les gouvernants qui devraient craindre le mécontentement et la colère du peuple.

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Dans son allocution télévisée du 12 octobre 2023, l’appel à l’unité nationale du président Macron – qui durant la crise sociale des Gilets jaunes ; la crise sanitaire du Covid ; les manifestations contre le détournement du bien commun qu’est l’eau, et le mouvement sociale d’ampleur inédite contre sa réforme des retraites a usé de la répression policière pour faire taire l’expression populaire –, avait un arrière-goût d’Union sacrée. Cette Union sacrée qui, après l’attentat de Sarajevo le 28 juin 1914, a uni les classes politiques dans chaque pays belligérant autour de leurs gouvernants pour entrer en guerre. Que ce président qui a fracturé la France appelle le peuple à l’unisson aux côtés de l’extrême droite israélienne, d’une Amérique responsable des évènements dramatiques qui aujourd’hui secouent le Proche-Orient, et d’une Europe de la finance hypocrite, est d’un cynisme indécent.

Avant d’être assassiné, le 31 juillet 1914, trois jours avant que la France n’entre dans la Première Guerre mondiale, Jean Jaurès déclarait que les guerres étaient provoquées par le choc des intérêts capitalistes, et qu’il était du devoir de la classe ouvrière de s’y opposer. Aujourd’hui, après les monstrueux massacres de civils en Israël par le Hamas, et les inqualifiables crimes de l’État hébreu à Gaza, la classe politique et le pouvoir macroniste, unis autour des extrêmes droites européennes et israélienne, crient haro – parfois avec des accents de haine – sur le parti de gauche le plus résolument opposée aux intérêts des puissances de l’argent. Cette chasse aux sorcières dont fait l’objet aujourd’hui la France insoumise, l’Europe l’a connue lors des deux guerres mondiales. Dans un contexte international où la lutte pour la paix est devenue illusoire, et dans lequel les États se sont engagés dans la course à l’armement, va-t-on nous imposer un maccarthysme à la française ? Devrons-nous répondre à l’appel d’une Union sacrée – les forces du bien, l’Occident, contre les forces du mal, la Chine et la Russie – qui, comme en 1914 en Allemagne a vu le Parti socialiste allemand répondre à l’appel de l'empereur Guillaume II : « Je ne connais plus de partis, je ne connais que des Allemands ! Comme preuve du fait qu'ils sont fermement décidés, sans différence de parti, d'origine ou de confession à tenir avec moi jusqu'au bout, à marcher à travers la détresse et la mort, j'engage les chefs des partis à avancer d'un pas et de me le promettre dans la main ».

L’acte odieux de terrorisme islamiste survenu ce 13 octobre 2023 à Arras, au cours duquel un professeur de français a été assassiné, a de nouveau endeuillé la France. La récupération politique de ce drame par l’extrême droite, et la droite LR réclamant l’activation de l’état d’urgence pour restreindre davantage nos libertés, déshonore une classe politique qui, comme le discours sur l’unité de Macron, est inaudible des Français. L’unité des Français face à la menace terroriste, et face aux atteintes à nos libertés que le pouvoir macroniste multiplie depuis la crise des Gilets jaunes – maintes fois dénoncées par Amnesty International et le Conseil des droits de l’homme de l’ONU –, ne peut se faire qu’à l’initiative du peuple. L’interdiction de manifester le soutien au peuple palestinien – tout en appelant à soutenir le peuple israélien (ce qui est légitime) et à cautionner la vengeance meurtrière du pouvoir d’extrême droite israélien (ce qui l’est moins) – est une atteinte à nos libertés et un facteur de division.

Cette monarchie présidentielle qui considère que les Français sont immatures, et qui ne cesse de vouloir museler et punir le peuple, devrait apprendre qu’en démocratie le peuple ne doit pas craindre les gouvernants qu’il a élus, ce sont les gouvernants qui doivent craindre le mécontentement et la colère du peuple uni. Oui, le peuple doit s’unir pour imposer la paix et non la vengeance aveugle d’un État sur des populations civiles innocentes (l’ONU rappelle que le siège de Gaza est interdit par le droit international humanitaire). Le peuple doit s’unir face à un pouvoir qui par le climat de peur qu'il veut créer et la restriction des libertés, crédite les visées du terrorisme.

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