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Billet de blog 15 février 2017

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DE POUTINE À TRUMP

« Le capitalisme porte en lui la guerre, comme la nuée porte l’orage » (Jean-Jaurès)

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Une crise mondiale secoue aujourd’hui la planète, celle d’une économie anarchique mondialisée où la finance impose ses règles de profit, au détriment de la condition de millions de femmes et d’hommes, chaque jour plus nombreux à être jetés dans la décharge du chômage, de la pauvreté et de la misère. Une paupérisation croissante des populations, accompagnée d’un enrichissement démesuré et insolent d’une minorité, propriétaire des plus-values produites par l’intelligence, le savoir, et le travail du plus grand nombre : ceux qui produisent les richesses. Dans cette société productiviste fondée sur la rentabilité et le profit, les forêts sont saccagées ou détruites, parfois au prix du sang, comme en Amazonie où entre 2010 et 2015, 109 défenseurs de l’environnement sont assassinés. En mars 2016, Nelson Garcia et Berta Caceres, militants écologistes et défenseurs des populations indigènes, sont exécutés par des hommes de main des multinationales au Honduras. Dans les pays néo-colonisés, comme dans les pays dits riches, l’exploitation démesurée des ressources menacent l’équilibre de la planète. C’est dans ce contexte qu’il convient d’analyser les bouleversements politiques qui se produisent dans les pays industrialisés, où  l’ordre capitaliste est à bout de souffle.

« Le capitalisme porte en lui la guerre, comme la nuée porte l’orage », disait Jean-Jaurès. N’en déplaise aux idéologues libéraux de tout poil, cette phrase est toujours d’actualité, comme l’est l’analyse marxiste de la société capitaliste. Société qui, si elle a changé d’apparence, demeure fondamentalement édifiée sur les principes de l’exploitation de l’intelligence, du savoir et du travail du plus grand nombre, par une minorité possédant les moyens de production et le pouvoir de l’argent, dans le but de créer toujours plus de profit pour s’enrichir toujours d’avantage. Ce qui différencie les néolibéraux, dont les sociaux-démocrates, des sociaux libéraux et autres réformateurs, ce sont les méthodes de gouvernance pour répondre aux impératifs de rentabilité et de profit des milieux d’affaires et de l’argent. L’évolution des technologies, fruit du savoir et des connaissances de l’homme, ainsi que des besoins nouveaux, parfois créés pour satisfaire la voracité financière du commerce, ont fait émerger le capitalisme financier. La mondialisation est l’expression de cette nouvelle facette du capitalisme, où l’ordre nouveau de la finance internationale, règne sur les marchés, transfert les capitaux et les richesses sans contrainte de frontière.

Dans les pays pauvres, le capitalisme financier saigne une main d’œuvre sous-qualifiée à bon marché. Dans les pays dits riches, où la main d’œuvre est qualifiée, des lois « Macron ou El Kohmri » sont imposées pour précariser l’emploi et faire baisser le coût du travail. Progressivement, les robots remplacent l’homme, non pas pour améliorer la condition humaine, mais pour multiplier la productivité et augmenter le profit. La modernisation des outils et des modes de production, génèrent de nouvelles formes d’exploitation du savoir et du travail. Ainsi, l’ubérisation créer une nouvelle forme de prolétariat, sous le label de « travailleur indépendant ». Autre secteur prolétarisé, l’agriculture où les exploitations sont étroitement dépendantes, par le biais de l’industrie agro-alimentaire, du capitalisme financier. Ainsi, des couches sociales autrefois préservées, s’appauvrissent. 

Cette course effrénée et anarchique au profit a son revers de médaille. Elle génère des désordres économiques et financiers qui mènent aux crises. Ces crises créent des tensions entre les nations, tensions accentuées par l’appauvrissements des ressources de notre planète. Ces tensions finissent par aboutir aux guerres. Tel est le cycle infernal du capitalisme. Croire que la seconde guerre mondiale a été le fait d’un fou furieux nommé Hitler, relève de la naïveté ou d’une lecture simpliste de nos livres d’histoire. Les deux guerres mondiales sont nées de rivalités économiques, d’antagonismes et d’égoïsmes nationaux. La crise économique des années 1930, née du krach boursier de 1929, a précédé la deuxième guerre mondiale. Chômage, famine, racisme, montée du fascisme, course aux armements, ont été les marqueurs de cette période d’avant-guerre. La conquête de nouveaux marchés par la guerre était devenue inéluctable. Hitler a été l’instrument idéologique et le bras armé de la finance, pour redessiner un nouvel ordre économique mondial.

Les accords de Yalta en février 1945, avaient aboutis à un partage du monde en deux blocs, idéologiquement et économiquement antagonistes, se côtoyant sur le principe d’une coexistence pacifique, fondée sur la menace de l’arme atomique. De cette logique de la terreur sont nés, l’OTAN et le Pacte de Varsovie. L’émergence des mouvements de décolonisation, et les luttes armés de libération nationale, soutenues par l’URSS, ont marqué l’après-guerre. L’indépendance, souvent acquise au prix de guerres meurtrières (guerre du Viêt-Nam), va amener les puissances de l’argent, et les gouvernements qui les servent, à établir de nouvelles relations d’assujettissement : le néocolonialisme.  Pour assoir cette nouvelle dépendance, les anciens pays colonisateurs vont utiliser deux méthodes : l’interventionnisme et la corruption, pour favoriser l’accession et le maintien au pouvoir d’hommes à leur solde (souvent des dictateurs), et plus récemment, la force militaire, au nom de la « liberté » et de la « démocratie ». Ainsi, les guerres d’Irak ont servi les intérêts des industries pétrolières et militaires des États-Unis ; celle d’Afghanistan a été la conséquence logique de la politique américaine, menée dans cette région dans les années 80 pour affaiblir l’URSS ; celle de Libye, menée par la France et l’Angleterre, visait l’exploitation, notamment par le pétrolier français TOTAL, des hydrocarbures ; en Syrie, avant même que la lutte contre le terrorisme ne justifie une intervention militaire, un projet de gazoduc traversant le pays pour acheminer le gaz israélien et qatari en Europe, incitait la France à intervenir ; à Kiev, la volonté affirmée par les États-Unis d’intégrer l’Ukraine dans le giron économique de l’Europe, et d’installer une base de l’OTAN en Crimée, ont provoqué une guerre absurde et la partition du pays. Ainsi, au nom de leurs valeurs et de leur modèle de démocratie, les États occidentaux tentent d’imposer aux pays émergents, leurs propres règles de gouvernance. Ces États dits démocratiques, font négoce avec des dictatures qui oppriment leur peuple, et vendent des armes à des tyrans, tout en condamnant les tyrans qui ne servent pas leurs intérêts.

Avec la disparition du bloc soviétique, une nouvelle opportunité s’est offerte au capitalisme financier. Mais la nationalisation du système bancaire, et des ressources gazières et pétrolières après l’ère Eltsine, gangrénée par la corruption et la misère de l’après-communisme, privent les capitaux américains d’investissements juteux dans cette nouvelle économie de marché. La volonté d’indépendance opposée par Moscou aux institutions financières mondiales, et sa détermination à vouloir retrouver sa place dans le concert des nations, font naître de vives tensions entre la Russie et les États-Unis. Cette orientation de la politique russe, contrarie aussi les marchands européens, à la recherche de nouveaux débouchés. Dès lors, les États-Unis, avec la complicité des européens, vont pratiquer une politique agressive envers la Russie, et se servir de l’OTAN pour procéder à son encerclement militaire. L’OTAN permet aussi aux États-Unis, d’exercer une pression économique et politique sur l’Union Européenne.

En 1992, dans la Defense Planning Guidance, le Pentagone soulignait : « Notre premier objectif est d’empêcher qu’une quelconque puissance domine une région dont les ressources seraient suffisantes pour engendrer une puissance mondiale. Ces régions comprennent l’Europe occidentale, l’Asie orientale, le territoire de l’ex Union Soviétique et l’Asie sud-occidentale ». Mais aujourd’hui, le rapport des forces dans le monde a profondément modifier les enjeux géopolitiques. Les États-Unis ont perdu leur hégémonie, et ne sont plus en mesure d’exercer le rôle de gendarmes du monde. Les principaux pays d’Amérique du Sud se sont émancipés de la domination nord-américaine. Les sanctions contre la Russie, ont poussé celle-ci à se rapprocher de la Chine et de s’ouvrir à l’Asie, afin d’établir de nouveaux équilibres économiques. La Chine qui est en passe de devenir la première puissance mondiale, ne cache pas son intention de contrôler la mer de Chine où transitent plus de 5 milliards de tonnes de marchandises chaque jour. Les tensions ne cessent de s’accroître entre la nouvelle puissance dominante dans cette région du Pacifique, et les États-Unis.

Les responsables des tensions qui secouent la planète, seraient Poutine et Trump ? La paix du monde serait menacée par le caractère viril d’un autocrate, et le tempérament imprévisible d’un populiste ? Façon simpliste d’expliquer une situation internationale complexe et dangereuse, ou l’art de dissimuler les raisons objectives qui nous mènent à une confrontation armée ? Affligeant comportement que celui du Président de notre République, et d’un candidat socialiste prétendant vouloir conduire la destinée de notre pays, prônant la course aux armements et appelant à une Europe guerrière contre l’ennemi russe. Jaurès pourrait se retourner dans sa tombe, en entendant de telles sornettes dans la bouche de ses disciples. La guerre est la conséquence des mécanismes économiques du capitalisme, et des antagonismes qu’il provoque entre les nations.

La crise des subprimes en 2006 et 2007 aux États-Unis, aboutit au krach de l’automne 2008, et aux crises, financière et économique, qui ont suivies. Chômage, pauvreté, montées de la xénophobie, du racisme, de l’antisémitisme, course aux armements, les signes annonciateurs d’une nouvelle guerre mondiale sont à nouveau là. Pour l’éviter, il est impératif de combattre le système qui la génère, et de mobiliser les peuples pour imposer la paix.                                                                             

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