Il ne me viendrait pas à l’esprit de condamner Mediapart pour avoir divulgué des informations concernant l’enquête préliminaire du parquet de Paris, menée à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise. Le parquet, sous tutelle de la ministre de la Justice, donc dépendant du pouvoir exécutif, et la police, au stade actuel des procédures, sont les seuls responsables de ces fuites, donc condamnables pour ne pas respecter le secret de l’instruction. Aussi, le moins que l’on puisse dire, c’est que ces fuites corroborent la thèse que les 15 perquisitions simultanées, menées dans des conditions aussi exceptionnelles que spectaculaires, sont bien le fait d’une opération politique orchestrée par le pouvoir macroniste.
Cela étant dit, quand je lis dans les colonnes de Mediapart : « Quelle ne fut pas la surprise des enquêteurs quand ce 16 octobre, au petit matin – il était 7 heures –, ils ont découvert Sophia Chikirou au domicile personnel de Jean-Luc Mélenchon. Le patron de La France insoumise et la communicante entretiennent en réalité de longue date, selon nos informations, une relation extra-professionnelle. Celle-ci pourrait relever de la seule vie privée des deux intéressés mais prend désormais, à la lueur des investigations judiciaires, une dimension d’intérêt général. De fait, si l’enquête devait confirmer le soupçon qui a présidé à son ouverture, cela signifierait que les sommes incriminées perçues par Mme Chikirou l’auraient été à l’occasion d’une campagne présidentielle dirigée par un homme politique avec lequel elle partage une relation intime régulière. », je commence à me demander si je ne lis pas un « torchon » ? Les auteurs de l’enquête ne se contentent pas de rapporter des informations, au demeurant d’ordre privé, mais les commentent en y introduisant des insinuations. Bien entendu, « dans leur souci d’informer », ces enquêteurs omettent d’aborder la forme et des modalités exceptionnelles de ces perquisitions, sans précédent dans ce type d’affaire. Mediapart deviendrait-il un média poubelle ?
Étant très attaché à la liberté de la presse, dans un contexte où les médias publics sont à la solde du pouvoir, et que la quasi-totalité de la presse écrite et télévisée appartient aux grands patrons de l’industrie et de la finance, Mediapart est l’un des rares médias à honorer cette profession qui a pour mission d’informer. Informer avec la rigueur qu’impose ce métier, sans céder à la facilité du spectaculaire, ou à la tentation de servir des intérêts financiers ou politiques, pour que puisse survivre une presse indépendante. Nul doute que Mediapart poursuivra cet objectif.