En janvier 2017, Amnesty International a sollicité par courrier un rendez-vous à la Présidence de la République, afin de lui remettre les 18.375 signatures recueillies « l’exhortant à faire cesser tous les transferts d’armes de la France à la coalition militaire engagée au Yémen sous la direction de l’Arabie saoudite ». L’Arabie saoudite, meilleur client de la France, a reçu en 2015 pour plus de 16 milliards d’euros de licences, dont 900 millions d’euros d’équipements militaires, avec 115 véhicules blindés et plus de 700 fusils de précision. Selon Amnesty International, en 2016, des navires intercepteurs auraient été livrés aux gardes côtés saoudiens, dans un contexte de blocus maritime partiel du Yémen. La France, qui a ratifié le Traité sur le commerce des armes, interdisant à un pays d'en vendre s'il y a une possibilité qu'elles soient utilisées pour violer les droits de l'homme ; la France qui a tant dénoncé la violation de ces droits de l’homme à Alep, se montre aujourd’hui peu soucieuse des victimes civiles innocentes tombées sous le feu des armes fournies à la coalition de l’Arabie Saoudite.
La vente d’armes à l’Arabie Saoudite, et au régime totalitaire Égyptien, ne sont pas les seuls signes d’une politique extérieure contestable de la France. Le premier acte de François Hollande nouvellement élu Président, avait heurté la conscience de nombreux citoyens français. Sa posture lors de l’hommage rendu à Toulouse, le 1er novembre 2012, aux victimes de Merah, en présence de Benjamin Nétanyahu premier ministre d’Israël, allié de l’extrême droite israélienne, avait été particulièrement intolérable. Ce jour-là, à l’école Ozar Hatorah, qu’un premier ministre étranger puisse appeler les juifs français à émigrer en Israël, lors d’une cérémonie organisée par les autorités françaises, en territoire français où il a été invité, et que le président de la République garde un silence complice, aura profondément choqué les électeurs qui venaient de porter au pouvoir un président socialiste, à priori garant de notre indépendance de jugement sur le conflit israélo-palestinien. Que le responsable des crimes de guerre commis à Gaza puisse venir en France, avec la complicité de son « ami Hollande », prendre des Français de confession juive en otage de sa politique de colonisation, était inacceptable.
Le comportement hypocrite de la France, mais aussi de l’Europe et des États-Unis doit nous interpeler. Quand les chefs d’États de pays occidentaux, avec cynisme, font négoce avec des tyrans, des princes et des rois dont certains arment les assassins terroristes ; quand François Hollande, président de la République, flirt avec des chefs d’États aussi peu fréquentables que ceux d’Arabie Saoudite, du Qatar, du Maroc, d’Égypte, de Turquie, ou de dictateurs africains, on peut s’interroger sur la morale politique qui anime notre président, chef d’un État démocratique. Nous devons nous méfier des politiques menées par ces puissants États qui aujourd’hui dominent le monde, et tentent d’imposer leurs règles de vie et de gouvernance, dans le but d’exploiter les richesses des pays qu’ils prétendent vouloir libérer de la tyrannie.
Ainsi, pour assurer leur hégémonie, de vertueuses nations copulent avec les forces obscures du fanatisme, et enfantent l’hydre qui répand le sang des innocents. Ce fut le cas en Palestine, où le Hamas fut créé avec la complicité d’Israël et de la CIA pour affaiblir le Fatah avant que ce « Mouvement de résistance islamique » ne soit déclaré terroriste. (Source Anthony Cordesman, analyste au Center for Strategic & International Studies à Washington et ex-conseiller à la sécurité nationale du sénateur John McCain).
En Afghanistan, où après avoir été un agent secret au service de la CIA, Ben Laden se retourne contre ceux qui par intérêt géopolitique le financent, et qu'il fonde le réseau terroriste Al-Qaïda. En Irak, où l’appétit insatiable des compagnies pétrolières déclenche une intervention militaire désastreuse des États-Unis, génératrice de chaos et de terrorisme.
En Lybie, où la France, après avoir reçu le 14 juillet 2008 à Paris Mouammar Kadhafi invité d’honneur de Nicolas Sarkozy président, sous prétexte d’intervenir au nom des Droits de l’Homme, emmène en 2011 une coalition armée contre le dictateur ami. Il est vrai que le pétrolier français TOTAL visait alors l’exploitation d’une partie des ressources de la Lybie en hydrocarbures. Cette aventure aboutit au chaos et à l’apparition du terrorisme.
En Syrie, où la guerre civile cristallise les antagonismes politiques, économiques et religieux régionaux, la France s’engage dans un processus d’intervention militaire hasardeux contre Bachar el-Assad. Intervention aussi motivée par le projet de gazoduc traversant le pays, pour acheminer le gaz israélien et qatari en Europe. Les États-Unis, éclairés par le précédent Libyen, neutralisent l’initiative française. L’absence de pragmatisme, en particulier de la part de la France, face au développement des mouvements terroristes en Syrie, favorise leur expansion avant que la Russie n’intervienne et que ne change l’ordre des priorités.
En Ukraine, où l’aveuglement des politiciens européens sous l’impulsion du très atlantiste José Manuel Barroso, motivés par des considérations purement mercantiles, et l’obsession des États-Unis à vouloir affaiblir la Russie, notamment par l’implantation d’une base de l’Otan en Crimée, précipitent le pays dans la guerre civile et le chaos. Depuis 1991, les États-Unis financent des groupes politiques pro-européens en Ukraine par l’intermédiaire, notamment, de la Fondation Carnegie (Article de Foxnews du 10 décembre 2004 intitulé « U.S. Spent $65M To Aid Ukrainian Groups ») Le 7 mars 2014, François Hollande reçoit à l’Élysée, par l’entremise de Bernard-Henri Lévy, les deux chefs de file ukrainiens, Petro Porochenko et l’ancien boxeur Vitali Klitschko, suspendu pour dopage en 1996 et privé des Jeux olympiques d’Atlanta, l’homme que l’Allemagne et les États-Unis pressentent à la présidence de l’Ukraine. Bernard-Henri Lévy déclare alors à qui veut l’entendre, qu’il n’y a ni fascistes, ni antisémites sur la place Maïdan. Pour mémoire, au printemps 2011, Bernard-Henri Lévy, le Don Quichotte philosophe, mentait aussi en qualifiant de démocrates, les katibas du CNT menées par le djihadiste et cadre libyen d’Al-Qaïda Abdelhakim Belhadj. Le marasme Ukrainien aurait pu être évité si la Russie avait été associée à la recherche d’une solution raisonnable à la crise. Les intérêts marchands des États européens et l’action des services secrets américains en collusion avec les nationalistes et l’extrême droite ukrainienne, ont fait de ce qui devait être une « révolution » libératrice de l’oligarchie et de la corruption, un fiasco politique et militaire laissant un pays appauvri et meurtri, gangréné par la corruption et gouverné par l’oligarchie.
La France, qui au nom des grands principes participe aux sanctions dictées par les États-Unis contre la Russie, honore de la Légion d’Honneur le Prince héritier d’Arabie Saoudite, Mohammed ben Nayef, ministre de l’Intérieur de ce pays qui applique la loi islamique la plus rigoriste, et finance le terrorisme. En recevant à l’Élysée ce Prince saoudien pour le décorer « chevalier de la Légion d’Honneur », le Président de la République de la patrie des Droits de l’Homme, jette aux oubliettes les soixante-dix personnes décapitées au sabre depuis le début de l’année 2016 par cette monarchie « amie » où les droits d’association, d’expression et d’opinion sont interdits ; où les homosexuels sont condamnés pour crime et où le droit des femmes est une illusion. Quelle valeur donne le président François Hollande aux ségrégations, aux persécutions, aux décapitations, à l’absence de libertés dans un royaume tyrannique où le négoce avec l’État et ses milieux d’affaires génère des profits colossaux ? Ce Président si prompt à dénoncer les violations des libertés en Russie, qui certes n’est pas un modèle de démocratie, mais si silencieux et complaisant à l’égard du pouvoir Turc, qui après avoir entrenu des rapports très ambigus avec le terrorisme islamique, bâillonne la presse et bafoue les libertés les plus fondamentales. Ce Président si complaisant à l’égard de ce pouvoir Égyptien qui fait subir à son peuple une répression sans précédent dans l’histoire récente du pays : incarcérations abusives, torture, disparitions et violences perpétrées avec du matériel militaire français vendu aux militaires au pouvoir. Ce président, indifférent aux crimes de guerre perpétrés aujourd’hui au Yémen, qui refuse de recevoir Amnesty International. Quelle humiliation pour le pays des droits de l’homme, quand les principes de démocratie et de liberté sont sacrifiés sur l’autel du négoce et du profit.