Quel contraste, entre un monarque président décrié ; un roi au pouvoir honorifique – tous deux de noir vêtus –, suivis par leurs épouses en abayas bleu griffées Dior et Vuitton, s’exhibant à la queue leu leu sur le tapis rouge du château de Versailles ; et un Pape venu à Marseille soutenir les migrants, acclamé par 60 000 fidèles au stade Vélodrome. Avant de fouler la terre phocéenne, le pape François avait déclaré : « Si je vais à Paris, je verrai le protocole, si je vais à Marseille, je verrai le peuple ». C’est bien le peuple que la Pape a rencontré à Marseille, tandis qu’au château de Versailles, un président nostalgique d’une France du passé organise – aux frais du contribuable – un diner fastueux au profit du gotha parisien et londonien, où 160 riches convives partagent le homard et le tourteau, le grand cru et le champagne. L’insolence de cette parodie monarchique d’un autre temps, dans un contexte sociale où la France qui travaille se prive et souffre, contraste avec le banquet solidaire accueillant 650 personnes en situation de précarité, organisé à Marseille dans le cadre des Rencontres méditerranéennes auxquelles participe le pape François. Évènement auquel le président communicant, expert en récupération politique des manifestations sportives, culturelles et sociétales, n’était pas convié, mais auquel il s’est invité.
Le président Macron ne cesse d’occuper l’espace médiatique afin de combler son déficit de popularité. Court entretien avec le pape François sollicité par l’Élysée ; présence médiatique au palais du Pharo ; présence à la messe au stade Vélodrome ; après avoir pavoiser avec le roi Charles, le locataire de l’Élysée promène son sourire de « m’as-tu-vu » aux côtés du pape François, porteur de messages que le président français devrait méditer. Alors que son ministre de l’Intérieur – au diapason avec une droite et une extrême droite stigmatisant une « submersion migratoire » –, affirme que la France n’accueillera pas de migrants venus de Lampedusa, le souverain pontife lui oppose les « Trafics odieux et le fanatisme de l’indifférence » et plaide pour une « intégration » plutôt qu’une « assimilation » des migrants, qui « compromet l’avenir » en « provoquant hostilité et intolérance ». La visite du pape François à Marseille aura, aussi, permis de distinguer le discours hypocrite de nos gouvernants, du courage de ceux qui dénoncent l’indifférence face à ce drame humanitaire, et affrontent l’intolérance de ceux qui fustigent une « submersion migratoire ». Après avoir loué ceux qui secourent les migrants en mer, le souverain pontife a déclaré : « Ceux qui risquent leur vie en mer n’envahissent pas, ils cherchent hospitalité ». Être solidaires des migrants, et exiger que les États assument leurs responsabilités en les accueillant dans le respect de leur dignité, est aussi un combat politique indissociable des luttes sociales, environnementales, pour la défense des libertés.