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Billet de blog 26 octobre 2025

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CEUX PAR QUI MOURAIT L’ESPOIR

« Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire » (Jean Jaurès)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Après que l’ex-président socialiste est revenu sur la scène politique en usurpant le programme du Nouveau Front Populaire, puis s’en est affranchi une fois élu ; après que le Parti socialiste a participé à l’opération Bayrou pour faire éclater le NFP, et a renié le programme sur lequel ses députés ont été élus ; après que les socialistes ont négocié des alliances avec Lecornu et les droites du bloc central, et organisé un Front anti-LFI ; sous les oripeaux d’une social-démocratie qui, après avoir trahi ses électeurs sous la mandature Hollande de 2014 à 2017, le PS s’engage désormais dans une stratégie visant à créer les conditions d’une gouvernance avec la droite dans l’après-macronisme.

Ce retour burlesque de l’apparatchik Hollande en politique, sorti des oubliettes par une social-démocratie venue au chevet d’une fin de régime agonisante, témoigne du virage à droite pris par le Parti socialiste après les élections législatives de juillet 2024. Après la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024 et le chaos politique qui a suivi – avec le vote de la censure du gouvernement Barnier le 4 décembre 2024 ; la chute du gouvernement Bayrou le 8 septembre 2024, après que sa mission première, l’éclatement du Nouveau Front Populaire, lui a été accordée par les socialistes ; la chute du gouvernement Lecornu I après l’implosion du socle commun des droites ; la survie du gouvernement Lecornu II à la suite d’obscures négociations d’antichambre entre socialistes et macronistes –, émerge une stratégie visant à créer les conditions d’une alliance de gouvernance entre la social-démocratie et la droite, après avoir affaibli l’influence de La France Insoumise.

Ce n’est pas une preuve de hasard, mais bien la logique implacable, si le candidat socialiste de 2012, celui du fameux « Moi, président ... », symbole de la trahison et de l’imposture, mentor du président des riches Macron, pavoise aujourd’hui sur les plateaux de télévision en donnant le ton d’un Parti socialiste revenu à ses sources : trahir pour mieux servir les intérêts de la classe possédante. L’histoire de la social-démocratie est trop souvent jalonnée de ces manœuvres où, lorsque les partis de la droite classique ne parviennent plus à gérer politiquement les intérêts du grand patronat et de la finance, ils s’allient avec les socialistes pour poursuivre leurs politiques antisociales. La mandature de Hollande, entachée de mensonges et de trahisons, et celles de son disciple Macron – avec les Jean-Yves Le Drian, Marisol Touraine, Olivier Dussopt, Florence Parly, Christophe Castaner, Élisabeth Borne, Olivier Véran, Sophie Cluzel, Emmanuelle Wargon, Brigitte Bourguignon, Gabriel Attal, Marlène Schiappa, Manuel Valls, liste non exhaustive des ministres ou secrétaires d’État qui ont déserté le PS pour aller servir la Macronie et la finance – illustrent ces gouvernances qui ont imposé l’austérité dictée par Bruxelles avec Hollande, et l’accaparement des richesses par les multinationales et les ultrariches avec Macron. L’alliance des socialistes avec les forces de gauche au sein de la Nupes et du NFP – exigée par une base qui déjà clamait : « Ne nous trahissez pas ! » – n’aura été qu’une parenthèse qui les a sauvés du naufrage dans lequel Hollande les avait précipités.

Ces années qui ont suivi la sinistre mandature de Sarkozy, s’inscrivent dans l’accélération débridée d’une phase de développement du capitalisme, portée par une mondialisation pilotée par Bruxelles avec le soutien actif des sociaux-démocrates, qui pousse les multinationales et la finance à délocaliser la production industrielle pour maximiser leurs profits. La production anarchique des biens de consommation et l’exploitation dévastatrice des ressources naturelles ; la dérégulation des marchés et l’antagonisme entre intérêts capitalistes – notamment ceux d’une Europe de Bruxelles expansionniste face aux intérêts d’une Amérique impérialiste, elle-même confrontée à la montée des puissances émergentes que sont la Chine, la Russie, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud réunis au sein des BRICS – ont provoqué une crise du capitalisme.

La production anarchique des biens de consommation et la surexploitation des ressources sont des symptômes d’un capitalisme dérégulé, où la recherche du profit immédiat prime sur l’intérêt général. La dérégulation des marchés affaiblit les mécanismes de contrôle, favorisant les bulles financières, les inégalités, les crises financières et économiques. Les antagonismes géopolitiques entre blocs capitalistes (Europe, États-Unis, BRICS) exacerbent les tensions commerciales et stratégiques, contribuant à l’instabilité et à la mutation des économies vers des logiques de guerre. Une voie dangereuse dans laquelle se sont engagés : l’Amérique de Joe Biden et l’Europe expansionniste de Bruxelles, contribuant à l’escalade de la guerre en Ukraine ; l’État proto-fasciste d’Israël, par le génocide perpétré à l’encontre du peuple palestinien et la colonisation de Gaza et de la Cisjordanie ; l’autocrate Trump, par ses préparatifs de guerre contre le Venezuela et la Colombie pour s’emparer des ressources naturelles, notamment pétrolières, et ses prétentions de coloniser le canal de Panama, le Groenland, le Canada, ainsi que ses velléités de conflit armé  contre la Chine dans le Pacifique.

Cette crise du capitalisme, qui exige le déploiement de politiques d’austérité afin de financer l’industrie de guerre et assurer les profits des multinationales, conduit à l’appauvrissement des classes moyennes et populaires. C’est à la lumière de ce désordre mondial et des conflits armés qu’il faut contextualiser la dérive du Parti socialiste, qui comme en 1936, ne rejoint les luttes des classes dépossédées que contraint et forcé par la base. Dans cette crise cyclique du capitalisme, où la gouvernance de la France par la collusion des droites au sein de la Macronie s’est fracturée sous la poussée des luttes sociales, la puissance financière cherche d’autres relais politiques pour défendre ses intérêts et préserver ses privilèges. Historiquement, la social-démocratie, ayant toujours servi de roue de secours au pouvoir de l’argent, est aujourd’hui la béquille sur laquelle la finance tente de s’appuyer, avec pour finalité de briser les luttes sociales et l’aspiration populaire à améliorer le pouvoir d’achat, à davantage de justice sociale et fiscale, au droit à l’éducation et à la santé. Le cheval de Troie de cette stratégie : le Front anti-LFI, union idéologique des socialistes, de la droite et de l’extrême droite. La mission que le Parti socialiste s’est arrogée – celle de préparer la succession au macronisme par un compromis avec les partis de droite – repose également sur une convergence idéologique autour des antagonismes géopolitiques et économiques internationaux.

Je ne milite pas à LFI. J’ai toujours été un fidèle électeur socialiste, unitaire et respectueux des préceptes de Jaurès. Mais, lors des prochains scrutins électoraux, comme tout citoyen, je devrai méditer sur la valeur de la parole d’un homme et d’un parti qui, une fois au pouvoir, gouvernent pour préserver les privilèges de la classe possédante, et défendre les intérêts des puissances de l’argent. Dans ce contexte de crise politique et institutionnelle que traverse notre République, quel crédit accorder à un homme qui, de 2014 à 2017, a contribué à la dégradation économique et sociale du pays, et à un Parti socialiste qui, en s’obstinant à vouloir s’allier avec la droite, fait mourir l’espoir – tout en prétendant aujourd’hui vouloir gouverner la France ?

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