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Écrit en avril 2012
Des âmes sensibles s’imaginent que, dans ce quartier de la Villeneuve, je travaille à mon malheur. Raisonnement simpliste qui veut que Zone sensible dise Zonzon possible. C’est vrai, dans une zone sensible le risque existe qu’on s’ensable. Dans Les Misérables, Hugo parlait du «Sinistre effacement d’un homme»…
Qu’on se le dise : la graine de violence pousse partout. C’est pourquoi il faut chérir les graines de vie, le bon grain à moudre. Tout cela existe à la Villeneuve et ses alentours, je l’ai rencontré.
Pour ce quartier qui ne fait pas mon malheur je vais, si j’ose dire, faire mon Malraux. Celui qui, avant de saluer la naissance de la Maison de la Culture de Grenoble, salua la mémoire de Jean Moulin. Dans le branle-bas médiatique de juillet 2010 tout a commencé justement avec un préfet : hélas, plus Gens d’armes que Jean Moulin.
Entre ici...et l’Elysée, un terrible cortège se mit en marche. Président, Ministre de l’Intérieur et surtout, insaisissable, ambiante, L’Idée Noire d’en découdre avec le tissu social, associatif, humain qui abriterait les monstres. Une opération orchestrée : avec symboles et grosses caisses. L’Élu du peuple grenoblois - qu’un Tolkien des Alpes aurait pu baptiser Le Seigneur des Anneau-raks -fut même convié à la Party, énième exemple du hobby de notre Président : la gesticulation médiatique.
À en croire le Président, ce jour-là, le rêve de La Villeneuve s’écroule et la ville d’avenir c’est Crolles. Ce constat, ce contraste, sonne aussitôt comme une gifle. Gifle aussi cinglante que la relégation du GF 38 (N.B : le club de foot de Grenoble) et ses gradins dégradés. Après le Casino, rien ne va plus ! Avait-on, dans cette histoire, banalement confondu le 38 avec le 36 ? Une fièvre étourdissante avec ses 36 chandelles ; la vision d’une société empruntée au 36 quai des Orfèvres.
Qui ne serait pas resté au 36ème dessous si le mouvement populaire du 38 n’avait pas su trouver les accents d’un remake de 36, façon Front populaire ? Faut dire que la confusion entre L’Isère et Misère menaçait de suffoquer «les hommes de bonne volonté».
Depuis 2010 il y en a eu des discours, des laïus, sans parler, au hasard de l’été suivant, des événements de New-York et d’un DSK court.
Juillet 2012 arrive donc comme un anniversaire. Mais que reste-t-il quand on a tout oublié ? Deux bougies comme deux mains sur la tête.
On raconte que Jean-Luc Godard aurait vécu à La Villeneuve, pour autant ce quartier ne mérite pas Le Mépris. Pourtant il est là, le mépris. Avec tout son cinéma : dans cette guerre annoncée contre les trafiquants, dans la recherche d’un motif pour déchoir quelqu’un de sa nationalité, dans le refus de voir les moyens financiers comme une solution. Si l’angle de vue est l’Éducation : tout est dit.
L’égoïste c’est celui qui ne pense qu’à moins.
On se sent dépassé par la situation sociale, alors on coupe tous les moyens. Faut dire que les tenants de l’Identité Nationale sont embarrassés par les 40 nationalités qu’on dénombre à la Villeneuve...Vous avez dit 40 voleurs ? 1001 nuits et Shéhéraza Drone.
Sur le plan social, de quartiers en tranches de ghetto on touche au microscopique.
Comme l’a dit l’ancien Premier Ministre Michel Rocard : «On ne peut pas accueillir toute la misère du monde», mais il ajoutait que, si celle-ci entre en France, l’État «doit savoir en prendre fidèlement sa part». À l’idée même de ce défi, les budgets se crispent ; les vieux briscards se font vierges effarouchées devant la somme que représenterait ce plan Paix. Un Plan Paix plombé dans l’aile droite du pays. Le plan Com’, lui, se déroule.
Après les événements de la Villeneuve, le Micro se fait Mega lorsque les caméras, les micros se tendent en direction des responsables locaux et nationaux. On tend le micro et ça tend le microcosme grenoblois. Y grenoblois classé X pour ses zones hétérogènes. On résiste : Ni colère, Nicolas. Mais les raisins de la colère sont mûrs dans les vies nobles de la Villeneuve. Normal, le Vercors n’est jamais loin. Cette dizaine de milliers d’habitants ne veut pas être réduite à quelques mal-dans-leur peau dans des cages d’escalier.
Le bête Immeuble ce n’est pas forcément la Bête ignoble. Les familles aspirent à un ascenseur social digne de son nom.
En temps de crise, il faudrait relativiser. «Les temps sont durs pour tout le monde».
La relativité, ici, on sait ce que c’est. T’as le bonjour d’Albert. L’Âge tendre connaît l’ambiance Einstein et Gueule de Bois. Si Einstein n’est pas grenoblois, il a tout de même donné à la Maison de la Culture son nom : La MC2. Nous savons désormais que la Civilisation est relative. La Culture aussi, sans doute. Les jeunes de la Villeneuve qui ne décrocheront pas le bac, auront néanmoins la Bac : uniquement à l’oral (les cris c’est lorsqu’ils sont rattrapés).
En France tout finit par la grammaire. En grammaire, lorsqu’il s’agit d’une ville, l’accord se fait au féminin. Tout comme un 9 qui se fait neuve ce que voudrait la Villeneuve, je crois, c’est que les chiffres soient en accord avec la réalité. Après peur sur la ville, les Hélicoptères et Belmondo, ce serait bien qu’il y ait Villeneuve sous le soleil et un monde Beau.
Dans le cas contraire on continuera d’avancer, de s’y rendre, d’y travailler, l’optimisme entre les dents et le cœur pas en bandoulière mais bien au chaud.
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Sans oublier ce livre qui s'amusa avec la formule "Pas un discours de Grenoble ! Un livre" : https://dictionerfs.wordpress.com/