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Billet de blog 6 août 2021

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« Longevolator quispiam lineamenta mea in Facieilibro expugnavit »

« Non ego hoc scripsi : longevolator quispiam lineamenta mea in Facieilibro expugnavit. » Non, ce n'est pas moi qui ai écrit ça : on a piraté ma page Facebook.

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Illustration 1

« Non ego hoc scripsi : longevolator quispiam lineamenta mea in Facieilibro expugnavit. »

« Non, ce n'est pas moi qui ai écrit ça : on a piraté ma page Facebook.

Aujourd’hui, on ne perd plus son latin. On perd ses données personnelles. Et data, c'est un mot latin.

On se fait pirater sa page Facebook.
On se fait usurper son adresse électronique.
On se fait cheval de Troie-iser son portable à la vitesse d'un Pegasus au galop.

L'auteur est volé sur le net, plus facilement qu'un Bukowski, l'auteur le plus volé aux USA. Entre "T'as Google" et "Ta gueule, Bukowski".

Non, on ne perd plus son latin, mais son intimité, ses datas persos (oui, oui, data, c’est du latin).

La data s'enterre ? Non, le data center, on rassemble, on croise, on accumule. On en-cache tout, on n'oublie rien.

Dans cette absolue transparence, Big Brother ne prend pas la peine de s’appeler Frater Magnus. Sauf dans le cas d’une maladie : la magnusfraterphobia, la phobie d’être bigbrotherisé.

Heureusement, il reste l’ablatif absolu.
lineamentis meis in Facieilibro expugnatis : si ma page Facebook est piratée

L'ablatif absolu, ce n’est ni une maladie, ni une forme de calvitie (ablatif ou l’ablation des tifs ?). Encore moins une marque de vodka. C’est un pouvoir réservé aux anciens ou actuels latinistes des établissements scolaires. Harry Potter peut aller se rhabiller dans le tome qu’il voudra.
 Oui, même dans les bahuts défavorisés il y a des enfants gâtés. C’est que le pouvoir de l’ablatif absolu corrompt absolument. Il vous gâte une classe en moins de trois heures. Si l’abus d’écrans rend idiot, l’ablatif absolu rend idiotique. C’est du made in latin pur jus. Intraduisible en anglais, infabriquable en Chine. Et l’élève français de tirer sa langue latine ! 
L’ablatif absolu est l’incarnation même du latin (il a du mal à partager ce titre avec la proposition infinitive, c’est son côté absolu).
Flaubert prétendait que le latin cachait toujours quelque chose de leste. Ablatif abso-leste ? En réalité, l’ablatif absolu est plutôt une tournure propre.

Ablativus Absolutus.
 Ce tour est un Hocus Pocus grammatical. Sous les yeux ébahis des élèves – rien qu’en deux mots ! – voilà une ville conquise, des ennemis vaincus, un pont construit, Cicéron consul, et la Nature qui nous guide.

La consigne est simple : concis ! Comme dans un tweet du Pape François.
Lingua latina amissa.

Et si pour protéger ses datas il fallait écrire en latin ?

Cras dies alius.

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