
L’été n’est pas encore là. "Où est-il l'été ? l'été où est-il ?", comme le chantait Lapointe. L’été arrive et on va tous crever…de chaud, dans un premier temps.
Heureusement les chansons nous bercent de pieux mensonges. Voilà l’été chantent Les Négresses vertes, à toute heure de la journée et toute l’année. En mp3, en deezer, en radio, en cd, en vinyl, au pommeau de douche, en ce que vous voulez.
Voilà l’été, ça a débuté en 1988. On parlait alors de Mano Negra et de Soucoupes Violentes. Les Béruriers étaient noirs et les Négresses vertes. Quant aux souris, toujours déglinguées.
Avec l’ironie, l’humour comme carburants, c’était un groupe dansant et marchand de couleurs : l'espoir vert dans le désespoir noir.
Et parfois du jaune doré. "Voilà l’été !" Un titre radieux dans l’album Mlah.
Il y a du Pogues dans ce groupe français-là. Populaire, punk, festif et un chanteur qui fait penser à MacGowan, rimbaldien, avec sa Bohème gitane, son Bateau ivre aux cales pleines de textes. Le succès que Les Négresses vertes eurent en Angleterre - cult figures in Britain - prouvent le bon goût british et la filiation.
Laissons parler Paulo, le bassiste du groupe (La Presse, 7 juillet 1990) « la musique des Pogues est moins métissée, c'est de la musique irlandaise avec la patte des Pogues, précise Paulo. Nous on va plus loin, c'est de la musique française métissée, influencée par toutes sortes de musiques. Pour moi, la musique cajun est très importante, comme dans Marcelle Ratafia, mais les autres ça les gonfle : après deux chansons, ils n'en sont plus. Zobi la mouche, c'est hispanisant. Notre musique peut être arabe, il y a aussi une valse parisienne. On a moins de scrupules à mélanger les styles.»
Avec son métissage, le groupe assume aussi d’être de la chanson française. Une chanson festive qui porte un discours rassembleur et contestataire de ces idées nauséabondes qui hantaient les années 80 (et font du revival dans les années 20).
En 1993, la mort d’Helno (de son vrai nom, Noël Rota), à 29 ans, changea la donne. Mort de ses excès. Overdose. Qu’aurait été le groupe si la vie d’Helno avait été moins courte ? (Cela dit, les Pogues se passèrent assez tôt de Shane MacGowan quand ses excès portèrent préjudice au groupe).
Helno. Un No Hell possible ? Un No Future aboli ? Ou un Hell consubstantiel ? Des ciels et des enfers, on ne discute pas depuis Baudelaire. Et puis pour le club des 27, Helno, avec ses 29 ans, c’est un vieux.
Ses textes restent. Entre autres, Zobi la mouche, Voilà l'été, Sous le soleil de Bodega, Famille nombreuse, Marcelle Ratafia. Des textes à écouter. Et à chanter. Le groupe s’est séparé en 2001. Il s’est reformé en 2015. Les Négresses vertes chantent encore avec, au micro, son membre fondateur, Stéfane Mellino, et les textes d’Helno ou d’autres.
Du vert, comme l’espoir.
Voilà l'été, j'aperçois le soleil
Les nuages filent et le ciel s'éclaircit
Et dans ma tête qui bourdonnent ?
Les abeilles !
J'entends rugir les plaisirs de la vie
Du noir, comme le désespoir.
Enfin l'été, mais y a déjà plus d'argent
Le tout Paris se transforme en phobie
Le métro sue, tout devient purulent
Dans ses souliers, le passager abruti
A dix doigts d'pied qui s'expriment
violemment