
Son siège social est à Pezenas. C’est là qu’on se fait le Chantre, le Hérault de ce régime ancien : la Desmotscratie, le pouvoir aux mots. Là-bas, on répète que le mot pour rire c’est le mot pour vivre. On y est plein de l’universel ‘Un mot, une voix’. Tout touriste (et les chiens sont admis) peut y déposer ses mots-valises. Si quelqu’un de passage (mais qui a une bonne raison d'être là) vient à manquer d’argent pour loger ou manger, il y a toujours une bonne âme pour lui faire Lapointe.
Ce n’est pas un village à la pointe du progrès, mais à Lapointe de la plume. C'est un groupe de pression poétique, pression servie bien fraîche, évidemment.
Bien que sa naissance remonte aux années 50, ce n’est pas un lobby décati : beaucoup continuent de s’acquitter du ticket qui donne l’excès. Ticket gratuit tant le pèze c'est nase aux yeux de ces gens.
Bonheur posthume, Lapointe est devenu ministre du contrepet et continue la guerre à cette langue dont on fait du bois de chauffe. Bobby n’a rien d’un cadavre exquis. S’il est froid, il le doit à ses exquis mots.
Ce Lobby exerce une pression, une influence sur la pensée ambiante. Il installe des antennes un peu partout. Des antennes de réception pour éviter la grande lessive, celle que craignait Bourvil dans un film de Mocky
Pour adhérer à ce Lobby Lapointe, il suffit d’onomatoper, de truffer, de plaid’oyez bonnes gens !, d’affûter Lapointe et de nourrir le Lobby quasi jusqu’à l’embolie. Humoriste et périls. Sans oublier que Lapointe, ici ou là, tire quelques larmes.
Le lobby Lapointe c’est l’extension de la poésie : l’ouïe se fait Aragon et les vers n’ont plus les pieds fragiles.
Jules Renard affirmait que Mallarmé était intraduisible, même en français ! Au début de sa carrière il fallut sous-titrer les chansons de Bobby. Oui, la pluie de mots peut rendre imperméable, mais c’est avec la joie des claquettes et du singing in the rain.
Les paroles sont belles Rain qu’à les écouter. Et c’est encore mieux quand on égoutte la chanson et qu’on en savoure les mots dont elle est truffée.
De tristes sires (au sillon à la cire impure et qui s'agacent des jeux de mots sagaces) prétendent que Bobby Lapointe mange les pissenlits par la racine et puis qu'on y comprend rien, d'toutes façons, dans ses chansons. S'en fiche, Bobby, il garde le nez dans les pâquerettes de l'au-delà-peu-près (Est-ce plus loin que Pézenas ? Je n'sais pas). Comprend qui peut, l’album de 1969.