La crise que nous traversons est sans précédent, et elle ébranle le monde entier. Aujourd’hui, c’est notre existence même qui est en jeu. Nous devons agir sans attendre, d’abord pour sauver des vies humaines, mais aussi pour éviter un nouvel effondrement des économies nationales et internationales, qui aurait des conséquences désastreuses sur le plan matériel et social.
Mais il est tout aussi essentiel de préserver ce que nos sociétés ont d’humain, de libéral et de démocratique. Telle est la condition sine qua non sur laquelle repose notre « libre économie ». C’est seulement en tant que citoyennes et citoyens libres que nous pourrons apporter les réponses adaptées à cette crise. Pour y parvenir, il nous faudra mettre en place des coopérations et des solidarités à toute épreuve, tant au niveau individuel et régional que national et international.
Les pays de l’Union européenne (UE) doivent tout faire pour agir ensemble sur le terrain économique, pour se soutenir et se protéger mutuellement – une solidarité qui est aussi dans l’intérêt de l’Allemagne. Tous les moyens dont nous disposons doivent être mis en œuvre, nous devons employer les forces vives de chaque économie nationale pour créer une stabilité commune. La situation exige une solidarité concrète et immédiate. En d’autres termes, il faut établir des « corona bonds », ou « coronadettes », un instrument de dette commun émis par les États de l’UE. Et il faut le faire avant que la spirale s’accélère et continue de développer sa dynamique dévastatrice. Les outils économiques et financiers décidés au niveau national, tels que les plans de relance, crédits d’urgence, achats d’obligations et autres apports financiers ne suffiront pas – pas davantage qu’une version actualisée du mécanisme européen de stabilité (MES) ou des « lignes de crédit préventives » pour les budgets nationaux. L’onde de choc sera trop violente. Face à une telle situation, qui pourrait assumer la décision de ne pas utiliser le plus efficace des instruments dont nous disposons, nous, Européennes et Européens ?
Telle est l’exigence de l’heure : être aussi forts que possible. Et donc : aussi solidaires que possible. Pour des raisons éthiques, mais aussi culturelles, sociales et, précisément, économiques. À force exceptionnelle, responsabilité exceptionnelle. L’Allemagne dispose de cette force – cela doit être son mandat. L’Europe nous a donné tout ce que nous sommes. C’est notre tour de lui rendre la pareille.
Nous demandons expressément au gouvernement allemand d’approuver, lors du prochain sommet de l’UE, la proposition du président italien Giuseppe Conte et de son homologue français Emmanuel Macron, visant à établir des « coronadettes ». Cette initiative est déjà soutenue par L’Espagne et six autres pays européens. À nous de les rejoindre.
Initiatrices et initiateurs :
Jörg Bong, écrivain et éditeur
Helge Malchow, éditrice-en-chef des Éditions Kiepenheuer & Witsch
Regina Schilling, réalisatrice, curatrice du Festival international de littérature lit.COLOGNE
Signataires :
Johanna Adorján, écrivaine
Adriana Altaras, écrivaine
Prof. Dr. Aleida Assmann, écrivaine et philosophe
Prof. Dr. Jan Assmann, écrivain et éditeur
Sibylle Berg, écrivaine et femme de théâtre
Prof. Dr. Manuela Bojadžijev, Université Humboldt, Berlin
Nora Bossong, écrivaine
Emma Braslavsky, écrivaine
Sonja vom Brocke, écrivaine
Prof. Dr. Heinrich Detering, Université Georg-August, Göttingen
Prof. Dr. Heinz Drügh, Université Johann-Wolfgang-Goethe, Francfort-sur-le-Main
Carolin Emcke, écrivaine et philosophe
Yannic Han Biao Federer, écrivain
Gunther Geltinger, écrivain
Prof. Dietrich Grönemeyer, écrivain, philosophe, médecin
Prof. Dr. Sabine Hark, Université de technologie de Berlin
Josef Haslinger, écrivain
Jakob Hein, écrivain
Prof. Dr. Wilhelm Heitmeyer, Université de Bielefeld
Julia Holbe, écrivaine
Prof. Dr. Rahel Jaeggi, Université Humboldt, Berlin
Hilary Jeffery
Prof. Dr. Dirk Jörke, Université de technologie de Darmstadt
Esther Kinsky, écrivaine
Prof. Dr. Wolfgang Kaschuba, Université Humboldt, Berlin
Jörn Klare, écrivain
Prof. Dr. Albrecht Koschorke, Université de Constance
Claus Leggewie, Publizist, Université de Giessen
Svenja Leiber, écrivaine
Prof. Dr. Stephan Lessenich, Université Ludwig-Maximilian, Munich
Sibylle Lewitscharoff, écrivaine
Prof. Dr. Steffen Mau, Université Humboldt, Berlin
Kristof Magnusson, écrivain
Prof. Dr. Ethel Matala de Mazza, Université Humboldt, Berlin
Thomas Meinecke, écrivain
Eva Menasse, écrivaine
Robert Menasse, écrivain
Prof. Dr. Christoph Menke, Université Goethe, Francfort-sur-le-Main
Robert Misik, écrivain
Prof. Dr. Oliver Nachtwey, Université de Bâle
Falk Nordmann, écrivain
Christoph Nußbaumeder, écrivain
Professor Dr. Claus Offe, Hertie School of Governance
Christoph Ransmayr, écrivain
Moritz Rinke, écrivain
Prof. Dr. Hartmut Rosa, Université Friedrich-Schiller, Jena
Sasha Marianna Salzmann, écrivaine
Frank Schätzing, écrivain
Prof. Dr. Wilhelm Schmid, écrivain
Peter Stamm, écrivain
Dorian Steinhoff, écrivain
Mark Terkessidis, écrivain
Prof. Dr. Philipp Ther, Université de Vienne
Stephan Thome, écrivain
Prof. Dr. Joseph Vogl, Université Humboldt, Berlin
Prof. Dr. Michael Wildt, Université Humboldt, Berlin
Hubert Winkels, écrivain et critique littéraire
Roger de Weck, écrivain et éditeur
Thomas Winkler, écrivain
Prof. Dr. Michael Zürn, Centre d’études pour la recherche en sciences sociales, Berlin
Traduit de l’allemand par Alexandre Pateau